France – Selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), 2,1 millions de tests, dont 52,8 % d’antigéniques, ont été validés par des professionnels de santé la semaine du 8 au 14 novembre. Soit une augmentation de 286 100 tests par rapport à la semaine précédente, qui en avait enregistré 1,8 million. Cette hausse du nombre de tests, la première depuis fin août, s’observe sur toutes les tranches d’âge, mais une grande partie est due à la fin des vacances scolaires qui ont provoqué l’utilisation de 110 000 tests RT-PCR salivaires supplémentaires chez les moins de 16 ans.
D’après les données de Santé publique France, le nombre de tests quotidiens a baissé d'environ 35 % depuis le 15 octobre, date de fin du remboursement systématique. Cependant, ce chiffre est à nuancer à cause de différents facteurs (baisse du nombre de tests déjà amorcée avant le 15 octobre, effet des vacances scolaires, etc.).
Délai plus long entre début des symptômes et tests
Pour certains spécialistes, comme le Pr Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital Tenon (Paris), il faudrait revenir à la prise en charge systématique des tests Covid. « Cet hiver, on va se retrouver dans une situation où plein de gens auront des symptômes qui ressemblent à un Covid bénin et n'iront pas se faire dépister. Comme l'a montré Santé Publique France, le délai entre le début des symptômes et les tests n'a jamais été aussi long en 2021 qu'aujourd'hui (2,5 jours en moyenne) », a-t-il déploré sur BFM TV.
Un avis partagé par l’épidémiologiste Pascal Crépey. Dans une interview publiée dans l’Obs, il déclare que « dans une période de rebond épidémique, pendant laquelle l’enjeu est de s’assurer que tous les outils de lutte contre le Covid-19 sont au maximum de leur efficacité, il faut pouvoir s’assurer que les personnes infectées, quel que soit leur statut vaccinal, soient détectées le plus rapidement possible ».
De son côté, le Pr Mahmoud Zureik, professeur d'épidémiologie et de santé publique à l'université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines et directeur d'Epi-Phare souligne, dans un entretien accordé à l’Express, que « le déremboursement n'est désormais plus un argument pour inciter les récalcitrants à se faire vacciner. Le nombre de tests baisse mais les nouvelles injections n'augmentent pas ».
Moins de tests de convenance
Néanmoins, tous ne partagent pas ces opinions. Le Pr Yves Buisson, épidémiologiste et président du groupe Covid-19 à l’Académie nationale de médecine, interrogé par Medscape, assure pour sa part que « l’arrêt du remboursement a freiné le nombre de tests de convenance, qui pour leur immense majorité, n’étaient fait que pour maintenir la validité du pass sanitaire et qui n’avaient aucun intérêt épidémiologique ».
Il estime que « le fait d’avoir supprimé cette facilité accordée depuis 2020 n’a pas handicapé la surveillance épidémiologique du Covid ».
Le système SI-DEP, qui comptabilise le nombre de tests, s’est adapté à cette nouvelle disposition. « Il y a eu beaucoup moins de personnes testées dès le 15 octobre, mais le taux de positivité des tests est plus élevé qu’avant. Les personnes qui se font tester sont plus souvent celles qui ont des symptômes ou qui ont été en contact avec une personne ayant des symptômes », souligne le Pr Buisson.
« Revenir au remboursement des tests pour tous, je ne suis pas d’accord du tout. Je pense que cela n’apporterait rien de plus ». Pour lui, « les tests sont très utiles pour diagnostiquer la maladie et faire des enquêtes de traçage, mais on a vu les limites de la stratégie tester-alerter-isoler car ce n’est pas obligatoire. Tout cela reposant sur le volontariat, c’est bien mais chacun fait un peu comme il veut. Cette stratégie a très bien marché dans des pays autoritaires, mais en France nous ne fonctionnons pas de la même façon ».
Redonner la main au prescripteur
Le Pr Buisson note qu’en France « on a testé massivement, avec des résultats décevants. On a trop souvent visé la quantité plutôt que la qualité. Si une politique de tests ne s’inscrit pas dans une stratégie, ça ne sert à rien. Il faut arrêter la débauche de tests qui sont faits pour rien, essentiellement pour échapper à la vaccination », juge-t-il.
Selon lui, « le médecin a désormais retrouvé sa place : les personnes qui ont des symptômes vont le voir et il peut prendre en charge le suivi de son patient ».
Un avis partagé par le Dr Jean Tafazzoli, médecin généraliste et secrétaire général de l’URPS Médecins d’Auvergne-Rhône-Alpes. « L’État redonne la main au prescripteur », se félicite-t-il auprès de Medscape.
« Si quelqu’un veut faire un test hors prescription et ne veut pas se faire vacciner, c’est de sa responsabilité de citoyen et il peut faire comme dans tous les pays du monde et payer son test. Mais à aucun moment il n’est justifié de faire des tests tous les 2 jours ou 3 jours en médecine », tranche-t-il.
« Des demandes de tests pour des gens non vaccinés, nous en avons, mais nous avons très vite remis les pendules à l’heure en disant qu’ils n’auraient une ordonnance que s’ils étaient symptomatiques », complète le Dr Margot Bayart, médecin généraliste dans le Tarn et première vice-présidente MG France, interrogée par Medscape.
« Le fait qu’il y ait des tests remboursés et d’autres non est compliqué et cela retentit sur les médecins généralistes. Pour autant, il faut éviter la gabegie de tests pour les patients non vaccinés », estime-t-elle. « Il faut responsabiliser chacun. On ne peut pas continuer à rembourser quoiqu’il en coûte ». Elle remarque que « la contrainte du pass sanitaire fonctionne et que certaines personnes se vaccinent. A MG-France, nous sommes favorables à tout ce qui peut encourager la vaccination », conclut-elle.
Du côté du gouvernement, alors qu'Olivier Véran prendra la parole le 25 novembre pour annoncer plusieurs mesures visant à diminuer l'ampleur de la cinquième vague, aucune annonce dans le sens d'un retour vers la gratuité des tests de dépistage pour tous n'est prévue.
Les cas où les tests restent remboursés
Depuis le 15 octobre 2021, les tests restent pris en charge par l’Assurance Maladie sur justificatif dans les conditions suivantes :
Dans tous les cas pour les personnes :
justifiant d’un schéma vaccinal complet, d’un certificat de rétablissement de moins de 6 mois ou d’une contre-indication à la vaccination. Ces pièces et certificats peuvent être présentés sous format numérique ou papier ;
mineures, sur présentation d’une pièce d’identité.
En dehors des personnes répondant à ces conditions, uniquement dans les cas suivants :
personnes identifiées comme cas contact à risque :
dans le cadre du contact tracing réalisé par l’Assurance Maladie. Elles devront présenter un justificatif de contact à risque (mail ou sms) envoyé par l’Assurance Maladie qui sera valable pour 2 tests : le premier sous 48 heures ; le second à réaliser 7 jours après le dernier contact avec la personne malade ou 17 jours après son début de symptômes.
dans l'application TousAntiCovid. Elles devront présenter la notification originale TousAntiCovid ;
par l'agence régionale de santé (ARS). Elles devront présenter le justificatif nominatif de l'ARS sous format papier, qui sera valable pour 2 tests : le premier sous 48 heures ; le second à réaliser 7 jours après le dernier contact avec la personne malade ou 17 jours après son début de symptômes.
étant élève du secondaire, de classe préparatoires ou BTS de plus de 18 ans, sur présentation d'un courrier type de l'Éducation nationale.
personnes participant à un dépistage organisé par l’ARS ;
personnes présentant une prescription médicale : pour une personne symptomatique, cette prescription n'est valable que 48 heures ;
pour une personne devant se faire tester avant de recevoir des soins en établissement de santé :
sur présentation d'une prescription du médecin traitant ou du spécialiste (prescription valable 72 heures avant la date des soins programmés) ;
sur convocation nominative émise par l'établissement de santé (test à réaliser 72 heures avant la date des soins programmés mentionnée sur la convocation) ;
personnes concernées par des campagnes de dépistage collectif (ex : campagnes organisées par les agences régionales de santé (ARS) ou au sein des établissements de l’Éducation nationale) ;
personnes de retour d'un pays en liste rouge et devant réaliser un test de sortie de quarantaine, sur présentation de l'arrêté de quarantaine ;
personnes devant réaliser un test RT-PCR confirmant un autotest réalisé sous supervision positif de moins de 48 heures sur présentation du résultat de l’autotest ;
personnes devant réaliser un test RT-PCR confirmant un test antigénique positif de moins de 48 heures, sur présentation du résultat de test antigénique.
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Citer cet article: Tests COVID : faut-il un retour à la prise en charge pour tous ? - Medscape - 25 nov 2021.
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