France – Depuis les premières fiches pratiques publiées par la Haute Autorité de Santé (HAS) pour orienter le diagnostic et la prise en charge des symptômes prolongés du Covid-19 début 2021, « de nouvelles données ont permis d'identifier de nouveaux symptômes impliqués et de préciser les facteurs de risque », indique l’institution qui précise que « le tube digestif a sans doute un rôle important dans les symptômes prolongés de la Covid-19 ».
La HAS a donc publié une nouvelle fiche pratique consacrée aux symptômes digestifs persistants du Covid[1].
Cette fiche, est accompagnée de deux autres sur les symptômes cutanés et oculaires prolongés. Elles viennent compléter celles déjà disponibles, dont certaines ont été actualisées, sur la fatigue et l’épuisement (actualisée), la dyspnée, les douleurs thoraciques, le trouble du goût et de l'odorat, les douleurs (actualisée), la kinésithérapie – réentrainement à l'effort, la kinésithérapie – syndrome d'hyperventilation, les troubles somatiques fonctionnels, les manifestations neurologiques et les symptômes dysautonomiques (actualisée).
Dans un communiqué, la HAS précise que depuis le début de l'épidémie, la persistance de symptômes divers après l'infection au SARS-CoV-2 a été observée chez plus de 20% des patients après 5 semaines et chez plus de 10% des patients après 3 mois[1]. Les facteurs de risques de Covid-long identifiés à ce jour restent l'hospitalisation et le cumul d'un grand nombre de symptômes au moment de la maladie.
L'objectif de ces fiches est d’aider à repérer les personnes atteintes par des symptômes prolongés et les éventuelles situations d'urgence « pour pouvoir débuter le traitement et la rééducation le plus rapidement possible, tout en évitant des examens trop nombreux et non pertinents ».
Un patient sur cinq a des symptômes digestifs prolongés
Environ 20 % des patients rapportent des symptômes digestifs lors de la phase prolongée de Covid[2,3,4]. Il peut s’agir :
d’une diarrhée chronique, qui est le symptôme le plus fréquent (environ 6 à 10 % des patients) ;
de symptômes de reflux gastro-œsophagiens (pyrosis, régurgitations) ;
d’une dyspepsie douloureuse associant douleurs épigastriques rythmées par l’alimentation, satiété précoce, lenteur à la digestion, plénitude épigastrique. Moins souvent des nausées et des vomissements ;
de douleurs abdominales isolées, parfois rythmées par l’alimentation, le plus souvent diffuses ;
plus rarement des ballonnements et une constipation ;
certains patients se plaignent d’avoir développé une intolérance à certains aliments et procèdent d’eux-mêmes à l’éviction de glucides, de gluten ou de laitages pouvant parfois aboutir à un régime très restrictif.
Ces symptômes digestifs peuvent entraîner un amaigrissement marqué. Ils sont souvent d’intensité modérée[5], rarement isolés et s’intègrent en général dans le cadre de plaintes somatoformes systémiques multiples [3,5].
Quels mécanismes en jeu ?
« Aucun mécanisme n’a à ce jour été clairement identifié », indique la HAS qui ajoute que « plusieurs hypothèses, qui peuvent être associées, sont évoquées » :
une conséquence de l’anxiété et du stress générés par l’épidémie et les périodes de confinement ;
une dysautonomie par atteinte de la 10e paire crânienne (nerf vague ou pneumogastrique) ;
une infection virale digestive persistante ;
un orage cytokinique avec une sécrétion inappropriée d’interféron, de cytokines ou d’histamine ;
Quelles explorations ?
La HAS incite avant tout à tout rechercher les signes qui pourraient évoquer une autre pathologie.
Les examens qui peuvent être réalisés sont :
un bilan biologique standard à la recherche d’un syndrome inflammatoire, d’une anémie ;
une coproculture et examen parasitologique des selles.
Selon les symptômes, leur intensité et la réponse au traitement :
une endoscopie oeso-gastro-duodénale et/ou coloscopie (avec biopsies systématiques en cas de diarrhée) ;
des examens radiographiques : échographie, imagerie en coupe.
Quelle prise charge proposer ?
En l’absence de mécanisme physiopathologique clair, le traitement est essentiellement symptomatique, reposant sur les traitements classiques des syndromes fonctionnels digestifs. « Aucune étude bien menée n’a été rapportée dans la littérature. La prise en charge des symptômes digestifs doit être progressive et s’intégrer dans une prise en charge multidisciplinaire globale », souligne la HAS qui précise qu’en cas de résistance aux traitements habituels de première ligne, il faut prendre un avis spécialisé et de recourir à des examens complémentaires.
En cas d’œsophagite ou de gastrite :
traitements par anti-reflux (alginates, antiacides) et IPP à dose adaptée.
En cas de diarrhée, sans lésion identifiée :
ralentisseurs du transit (lopéramide) ou anti-sécrétoires (racécadotril), à dose adaptée.
En cas de douleurs :
antispasmodiques (phloroglucinol, alvérine, trimébutine, mébévérine…).
antalgiques de niveau 1 et 2 : en général peu efficace sur les douleurs abdominales fonctionnelles. Il ne faut pas recourir aux opiacés.
néfopam : pris de manière ponctuelle, efficace dans la gestion des crises douloureuses intenses.
molécules à action centrale (antidépresseurs, prégabaline…) : uniquement dans les formes rebelles, après un bilan complet.
Dans l’hypothèse d’une dysbiose persistante un traitement par probiotiques pourrait être envisagé.
Sur certains symptômes fonctionnels : des données parcellaires suggèrent que les anti-H2 (famotidine) pourraient avoir une certaine efficacité.
La place des thérapies cognitivo-comportementales reste à définir.
Quel régime alimentaire ?
Au cours des syndromes fonctionnels digestifs, un régime pauvre en FODMAPs (Fructo- Oligo Di- Monosaccharides And Polyols) a montré une efficacité. Il pourrait être proposé en cas d’intolérances alimentaires, selon la HAS qui ajoute qu’il est important d’éviter des régimes trop restrictifs qui pourraient entraîner un amaigrissement ou des carences.
Retrouvez toutes les fiches réponses rapides de la HAS dans le dossier Covid-19.
Crédit image de Une : Rafael Ben Ari/Dreamstime.com
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Citer cet article: COVID long : les symptômes digestifs font l’objet d’une nouvelle fiche pratique de la HAS - Medscape - 23 nov 2021.
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