France — A l’occasion de la Semaine de la dénutrition du 12 au 20 novembre, le Collectif de lutte contre la dénutrition revient sur quelques chiffres qui montrent que ce problème, aux conséquences graves, est largement répandu[1]. Il propose 14 recommandations pratiques pour lutter contre un état pathologique encore trop souvent négligé.
Deux millions de personnes concernées en France
Une personne est considérée comme dénutrie dès lors qu’une perte de poids de plus de 5 % en 1 mois est observée (par rapport à son poids habituel) ou plus de 10 % en 6 mois. On estime qu’en France, 2 millions d’individus souffrent de dénutrition, un phénomène qui touche principalement les personnes âgées mais pas seulement.
En tout, 400 000 personnes âgées à domicile, soit 4 à 10 % des plus de 70 ans vivant chez eux et 270 000 personnes âgées en EHPAD seraient dénutries. Autres chiffres édifiants, 40 % des personnes âgées sont hospitalisées pour des conséquences de dénutrition et 50 % des personnes âgées hospitalisées sont dénutries.
Mais, la dénutrition ne concerne pas que les personnes âgées puisque 10 % des enfants hospitalisés (50% de ces enfants ont moins de 3 ans), 20 à 40 % des personnes hospitalisées, 40 % des malades atteints de cancer et 40 % des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer souffrent de dénutrition[8,9].
Des causes et des conséquences multiples
Les causes de la dénutrition diffèrent. Un malade traité pour un cancer souffre des nausées, alors qu’un patient atteint de la maladie d’Alzheimer peut oublier de s’alimenter et qu’un enfant atteint de la mucoviscidose, épuisé, perd l’envie de manger, indique le collectif.
Les conséquences de cette dénutrition sont multiples : infections, risque de chute, fonte de la masse musculaire, retentissement psychique et relationnel, altération des différentes fonctions physiologiques essentielles (musculaire, immunitaire, cicatrisation), ou même le décès quand la perte de masse protéique excède 50%.
« Pourtant, la dénutrition demeure très largement méconnue ce qui constitue un obstacle à une prise en charge précoce, gage d’efficacité́. Il est essentiel de donner à connaitre, auprès des professionnels comme du grand public, les outils de prévention, de dépistage et de prise en charge qui existent. Il est essentiel de pouvoir la repérer pour prévenir la perte d'autonomie, les chutes et lutter contre l'isolement », indique le ministère de la santé dans un communiqué annonçant la Semaine de la dénutrition[2].
14 propositions pour agir contre la dénutrition
Pour lutter contre la dénutrition, le Collectif de lutte contre la dénutrition a dressé 14 propositions :
Améliorer l’état bucco-dentaire
Éviter les erreurs et combattre les idées reçues. Les principaux sujets à aborder étant les risques du végétalisme chez le nourrisson, les recommandations actuelles sur certaines pratiques alimentaires durant le cancer, les risques des régimes restrictifs prolongés chez la personne âgée et les besoins protéiques augmentés chez les seniors.
Repenser l’offre nutritionnelle pour les malades et les personnes âgées. Ici, le collectif préconise notamment d’imposer un cahier des charges nutritionnel avec des seuils minimaux en calories et en protéines et d’augmenter le budget alloué à l’achat des denrées alimentaires afin d’atteindre 6 euros par jour.
Repenser l’organisation des repas dans les établissements Limiter le jeûne nocturne à 12 h maximum, développer chaque fois que cela est possible une alimentation « socialisée » dans des locaux adaptés, laisser un temps suffisant (45 minutes minimum) dédié au repas…sont autant de recommandations du collectif.
Rediscuter l’utilité des régimes
Promouvoir l’activité physique
Dépistage précoce de la dénutrition
Comprendre les causes pour mieux anticiper
In frigo veritas. Créer un observatoire de la dénutrition en dehors du milieu hospitalier à la fois par une démarche rétrospective et prospective.
Prise en charge de la dénutrition en établissement. Faire en sorte que la prise en charge de la dénutrition dans les hôpitaux devienne un des indicateurs de qualité.
Prise en charge de la dénutrition en ville. « Les soins diététiques et d’activité physique adaptée devront faire l’objet d’une prise en charge par la sécurité sociale. Ce remboursement fera suite à une prescription médicale, sur des critères reconnus de dénutrition. Concernant les diététiciens, ce remboursement sera assujetti à l’obtention d’une qualification authentifiant leur compétence dans le domaine de la nutrition clinique », indique le collectif.
Redéfinition des missions des comités de liaison alimentation nutrition (clan). Les rendre obligatoires et les financer.
Former l’ensemble des professionnels à la prévention, au dépistage et à la prise en charge de la dénutrition
Faire que la lutte contre la dénutrition soit une composante des politiques nationales et locales de santé.
Edition 2021 : une semaine riche en événements
La mise en œuvre de la semaine de la dénutrition est confiée par le ministère des solidarités et de la santé au Collectif de lutte contre la dénutrition, présidé par le Pr Eric Fontaine (HEGP, Paris).
De nombreux événements auront lieu sur tout le territoire dont des webinars thématiques, des animations culinaires en Ehpad, une sensibilisation grand public dans les officines, une campagne de pesées et sensibilisation des professionnels en Ehpad, des ateliers.
Parmi les nombreuses actions, deux nouveaux supports de sensibilisation ont été réalisés : un set de table pour les établissements hospitaliers (exemple de personnalisation pour le CHU de Grenoble Alpes) et un livret de recettes enrichies pour les acteurs du domicile et les aidants, réalisé avec Silver Fourchette !
La première édition en 2020 avait mobilisé plus de 350 partenaires autour de plus de 3000 actions et une vingtaine de webinaires thématiques, en dépit du contexte sanitaire contraignant. L’édition 2021 est déjà bien partie avec 1500 partenaires et plus de 30 webinaires programmés.
Crédit image de Une : Katarzyna Bialasiewicz/Dreamstime.com
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Citer cet article: Qui est touché par la dénutrition et comment changer la donne ? - Medscape - 19 nov 2021.
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