Antidépresseurs : quels sont ceux qui exposent le plus à un risque de syndrome de sevrage ?

Caroline Guignot

15 novembre 2021

France-- L’analyse de la base de données de pharmacovigilance de l’OMS montre que les antidépresseurs à courte demi-vie exposent les patients à un risque plus élevé de syndrome de sevrage que ceux à demi-vie longue, selon une recherche française [1].

Auparavant, une revue systématique évoquait un syndrome de sevrage chez la moitié environ des personnes traitées par antidépresseurs. Des études cliniques ainsi que des méta-analyses avaient cherché à confirmer ces observations et suggéré que le temps de demi-vie des molécules avait un impact déterminant sur ce risque. Cependant, les premières présentaient des limites méthodologiques (définition du critère d’évaluation, antidépresseurs pris en compte, effectifs…), et les secondes n’avaient pu intégrer des paramètres manquants (données sociodémographiques manquantes), ce qui ne permettait pas de conclure formellement sur le sujet.

Une équipe toulousaine a donc conduit une analyse à partir de la base de données de pharmacovigilance de l’OMS afin de disposer d’un bon niveau de preuve.

Méthodologie

VigiBase est la base de données de pharmacovigilance de l’OMS qui comporte plus de 26 millions de notifications faites par des patients, des professionnels de santé ou des industriels issus de 130 pays. Les chercheurs l’ont exploitée en identifiant toutes les manifestations de sevrage parmi les notifications émises entre 1988 et 2020 concernant des traitements par antidépresseurs - inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (ISRS), inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN), antidépresseurs tricycliques (ATC) - chez des sujets de 6 ans ou plus. Ils ont ensuite catégorisé ces notifications selon le temps de demi-vie de la molécule associée, avec un groupe d’antidépresseurs à courte demi-vie (dont paroxétine, fluvoxamine, duloxétine, venlafaxine, milnacipran, desvenlafaxine, réboxétine, miansérine et agomélatine) ou à longue demi-vie (dont citalopram, escitalopram, sertraline, fluoxétine, mirtazapine et vortioxétine). Une analyse secondaire a été menée afin d’évaluer le risque relatif comparativement aux antidépresseurs tricycliques.

Principaux résultats

Au total, 15 507 notifications de syndrome de sevrage ont été enregistrées, qui concernaient surtout des femmes et des sujets de 18-44 ans. Les principales molécules concernées étaient la paroxétine (30,8%), la venlafaxine (23,3%) et la duloxétine (21,3%).

Le risque relatif de syndrome de sevrage était plus élevé sous antidépresseurs à demi-vie courte que sous antidépresseurs à demi-vie longue (risque relatif 5,38 [5,16-5,61]). Ce risque était également supérieur pour les femmes (RR 1,38 [1,33-1,43] vs hommes) et les 18-44 ans ou les 45-64 ans vs ≥75 ans (6,86 [6,17-7,62] et 5,1 [4,58-5,67] respectivement). La paroxétine, la desvenlafaxine, la venlafaxine et la duloxétine étaient les molécules les plus à risque (risque relatif compris entre 2 et 3,1), tandis que l'agomélatine et la vortioxétine étaient associées aux risques les plus faibles.

L’analyse des seules notifications faites par les médecins conduisait à la même conclusion. Enfin, comparativement à celui déclaré sous ATC, le risque de syndrome de sevrage était aussi plus élevé pour les antidépresseurs à demi-vie courte (9,15 [8,3-10,09]) que pour ceux à demi-vie longue (1,7 [1,53-1,88]).

Les chercheurs appellent à mener de nouvelles études pour corroborer ces résultats.

 

Cet article a été initialement publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape.

 

Commenter

3090D553-9492-4563-8681-AD288FA52ACE
Les commentaires peuvent être sujets à modération. Veuillez consulter les Conditions d'utilisation du forum.

Traitement....