Cancer du sein triple négatif : des bonnes nouvelles – enfin !

Marine Cygler

Auteurs et déclarations

10 novembre 2021

France – Le cancer du sein triple négatif (TNBC) touche environ 9000 femmes chaque année en France, soit 15% de l'ensemble des cancers du sein. Las, les avancées thérapeutiques de ces dernières années ne semblent pas atteindre les patientes qui en sont atteintes et pour lequel le pronostic, faute d'options thérapeutiques efficaces, est très sombre. Pourtant, ces derniers jours, deux bonnes nouvelles viennent relancer l'espoir des patientes et de leur médecin : l’anticorps conjugué Trodelvy® (Gilead) est – enfin –  disponible en accès précoce pour toutes les patientes atteintes d'un TNBC métastatique en échec thérapeutique depuis le 1er novembre et l’immunothérapie pembrolizumab (Keytruda®, Merck) a été autorisée par la Haute Autorité de Santé (HAS) le 5 novembre. « Le message est très positif... pour une fois », confie le Dr Barbara Pistilli (oncologue, cheffe du comité pathologie mammaire à Gustave Roussy, Villejuif) à Medscape édition française.

« L'arrivée de ces deux thérapeutiques peut être considérée comme une avancée considérable car le TNBC est une pathologie avec un vide thérapeutique qui dure depuis des années », rappelle-t-elle. Pour l'instant, ces deux traitements sont réservés aux patientes présentant un cancer avancé.

 
L'arrivée de ces deux thérapeutiques peut être considérée comme une avancée considérable car le TNBC est une pathologie avec un vide thérapeutique qui dure depuis des années. Dr Barbara Pistilli
 

Le Keytruda® peut être utilisé chez les femmes atteintes d’un cancer du sein triple négatif localement récurrent non résécable ou métastatique, dont les tumeurs expriment le marqueur PD-L1 avec un CPS (Score Positif Combiné) ≥ 10 et qui n'ont pas déjà reçu de chimiothérapie au stade métastatique.(lire Cancer du sein triple négatif : la HAS autorise le pembrolizumab en accès précoce).

Le Trodelvy® peut, lui, être administré à un stade un peu plus tardif, après échec de deux lignes de traitements systémiques ou plus (dont au moins une mise en œuvre au stade avancé de la maladie) le cancer du sein métastatique triple négatif. « Même les patientes qui n'ont pas accès à l'immunothérapie peuvent se voir prescrire du Trodelvy® », précise la spécialiste.

Le Trodelvy®, une thérapeutique de rupture très attendue

Premier représentant d’une nouvelle classe thérapeutique, le Trodelvy® (sacituzumab govitecan) était accessible dans le cadre d’une autorisation temporaire d’utilisation nominative depuis le 4 novembre 2020 et d’une autorisation d’accès compassionnel depuis le 1er juillet 2021. « Mais cela ne suffisait pas à couvrir les besoins de toutes les patientes », indiquait la HAS en septembre dernier quand elle a autorisé ce traitement en accès précoce l'ensemble des patientes éligibles.

Les premières doses ne sont disponibles que depuis quelques jours. « Cette classe de médicaments, les anticorps conjugués, est issue d'une technologie complexe, difficile à mettre en place à large échelle rapidement », indique Barbara Pistilli. Avant de détailler les raisons du délai d'attente : « Dès que les résultats de l'étude ASCENT ont été connus, des procédures d'autorisation rapide se sont mises en place. La demande est devenue très importante, la production n'a pas suivi ».

Le ministère de la Santé, via un communiqué, s'est félicité de cette mise à disposition, soulignant que « le ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran s’est mobilisé durant plusieurs mois, en étroite collaboration avec les associations de patientes, pour permettre d’avancer l’accès généralisé à ce traitement au 1er novembre, pour l’ensemble des patientes qui le nécessitent. »

Pour Barbara Pistilli, il y a trois raisons pour lesquelles le Trodelvy était particulièrement attendu. « Premièrement, cet anticorps conjugué a démontré une efficacité importante avec une prolongation significative de la survie sans progression et de la survie globale par rapport à la chimiothérapie standard chez des patientes ayant un très mauvais pronostic », commence-t-elle. Deuxièmement, la technologie elle-même est une stratégie innovante déjà utilisée dans le cancer du sein HER2+ qui permet de véhiculer des chimiothérapies très toxiques directement au sein des cellules tumorales. « C'est pourquoi, et c'est la troisième raison, la toxicité générale est moindre. Ainsi les patientes peuvent rester des mois sous ce traitement », énumère-t-elle.

 
La toxicité générale est moindre. Ainsi les patientes peuvent rester des mois sous ce traitement. Dr Barbara Pistilli
 

Le principe

L’anticorps conjugué sacituzumab govitecan reconnait TROP2, l'antigène de surface cellulaire trophoblastique 2 exprimé à la surface des cellules tumorales dans de nombreux types tumoraux, en particulier dans les cancers du sein. Il est ainsi absorbé par la cellule tumorale et libère du SN-38, de la chimiothérapie (principe actif de l’irinotécan) qui va tuer la cellule.

Trodelvy et Keytruda indiqués dans des stades plus précoces ?

Face à des survies nettement améliorées chez des femmes dont la maladie est pourtant avancée et qui ont déjà eu différents traitements, se pose la question de savoir si le recours au Keytruda ou au Trodelvy précocement pourrait diminuer le risque de progression de la maladie.

« Pour le Trodelvy, il y a une étude en cours dans laquelle l'anticorps conjugué est utilisé en adjuvant pour le traitement de la tumeur résiduelle après chimiothérapie », indique la Dr Pistilli.

En attendant, ces deux nouvelles thérapeutiques peuvent désormais être considérées comme des nouveaux traitements standards du cancer du sein triple négatif avancé.

Le pembrolizumab, lui, a été évalué en néoadjuvant avant la chirurgie dans l'essai KEYNOTE 522 dont les résultats, très positifs, ont été publiés dans le NEJM . « Ce qui est particulièrement intéressant c'est que le statut vis-à-vis de PDL-1 n'a pas d'importance. Autrement dit, le traitement a un effet indépendamment de l'expression de PDL-1 » souligne Barbara Pistilli qui considère qu'avec cette nouvelle étude de phase III « on peut s'attendre à une autorisation pour les stades précoces de la maladie assez rapidement ».

 

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