La HAS déconseille l’utilisation du vaccin Moderna chez les moins de 30 ans

Stéphanie Lavaud

9 novembre 2021

Paris, France ― Ce 8 novembre, la Haute Autorité de Santé a fait savoir dans un avis qu’elle déconseillait l’administration du vaccin Spikevax® de Moderna en primovaccination ou en dose de rappel chez les personnes âgées de moins de 30 ans [1]. Cette recommandation fait suite aux dernières données de l’étude Epi-PHARE qui confirment le risque de survenue de très rares cas de myocardites dans les tranches d’âge les plus jeunes [2]. En revanche, le vaccin de Moderna garde toute sa place chez les plus de 30 ans, se montrant même légèrement plus efficace que celui de Pfizer.

Plus de myocardites chez les jeunes avec Spikevax®

La HAS joue la prudence. Après la communication des données de l’étude Epi-PHARE qui « confirment le risque de survenue de très rares cas de myocardites d'évolution favorable », elle a décidé « dans l'attente de données complémentaires sur le risque de myocardites et des conclusions du PRAC attendues dans les prochaines semaines » mais aussi « compte tenu de l'insuffisance de recul sur le risque de myocardites avec le vaccin Spikevax® utilisé en demi-dose pour le rappel (50 µg) », de ne plus recommander l’administration du vaccin Spikevax® de Moderna en primovaccination ou en dose de rappel chez les personnes âgées de moins de 30 ans.

L’étude de pharmaco-vigilance Epi-PHARE montre en effet que, chez les 12-29 ans, le risque de myocardites est environ 5 fois moins élevé pour le vaccin Comirnaty® de Pfizer comparativement au vaccin Spikevax® de Moderna (100 µg) : soit 131,6 par million de doses pour Moderna versus 26,7 pour Pfizer (voir encadré). Des résultats, par ailleurs, concordants avec ceux issus des données américaines. « Ces cas sont survenus principalement dans les 7 jours suivant la vaccination, plus souvent après la seconde dose, et plus souvent chez des hommes de moins de 30 ans » précise la HAS.

La HAS recommande donc, pour la population âgée de moins de 30 ans et dès lors qu'il est disponible, le recours au vaccin Comirnaty® qu'il s'agisse de primo vaccination ou du rappel.

La recommandation de la HAS suit en cela celle de pays nordiques, qui, pour des raisons similaires de sur risque de myocardites et péricardites, ont arrêté l’utilisation de Spikevax chez les tranches d’âges les plus jeunes. Début octobre, la Suède et la Finlande ont ainsi suspendu l'emploi du vaccin de Moderna pour les moins de 30 ans, tandis que le Danemark et la Norvège l'ont formellement déconseillé pour les moins de 18 ans.

Un peu plus d’efficacité pour Spikevax®

Pour autant, la HAS précise que le vaccin Spikevax® garde toute sa place dans la stratégie vaccinale, et ce d’autant que « plusieurs études conduites en conditions réelles d'utilisation tendent à montrer une efficacité vaccinale légèrement supérieure pour Spikevax® (100 µg) par rapport à Comirnaty®, dont l'efficacité est déjà très bonne » indique la HAS. Laquelle recommande donc, à l’inverse, que le vaccin Spikevax®, « dont l'efficacité vaccinale semble légèrement meilleure, puisse être utilisé en primovaccination (en dose complète de 100 µg) et pour l'administration d'une dose de rappel en demi-dose (50 µg) chez les sujets âgés de plus de 30 ans ».

Elle ajoute même que « celui-ci se révèle particulièrement intéressant pour les personnes à risque de forme grave de Covid-19, conformément à la stratégie vaccinale recommandée, en primovaccination, comme en rappel ». Spikevax® (à demi-dose) avait reçu la validation de l’Agence européenne du médicament en dose de rappel fin octobre.

Rappel en population générale : pas encore le moment

Va-t-on devoir recommander un rappel de vaccination contre le Covid-19 à l’ensemble de la population ? Si ce n’est pas l’objet premier de cet avis, la HAS a tenu à faire connaitre – sur cette question d’actualité – sa position en ce début novembre. Elle considère que « dans le contexte sanitaire actuel, compte tenu des données encore limitées sur les conséquences d'un déclin de l'efficacité au cours du temps chez les jeunes adultes et sur l'effet d'un rappel sur la transmission, il n'y a pas lieu pour le moment de modifier ses recommandations quant à la pertinence d'un rappel en population générale ». Néanmoins, la HAS ajoute qu’il est « probable que celui-ci soit nécessaire ultérieurement ». Pour en décider, l’autorité sanitaire dit attendre « les résultats des travaux de modélisation de l'Institut Pasteur ».

En ce qui concerne les populations sévèrement immunodéprimées à très haut risque de forme sévère de Covid-19, la HAS étudie actuellement la démarche préventive globale à adopter. Elle rappelle cependant que « l'administration d'une troisième dose plus précocement voire d'une quatrième dose pour les non-répondeurs aux précédentes injections a déjà été recommandée, cette dose devant être distinguée d'une dose de rappel à 6 mois ».

Comme à chaque fois désormais, la HAS précise que cet avis sera revu en « fonction de l'évolution des connaissances, notamment au regard des données d'efficacité et de sécurité en conditions réelles d'utilisation sur un plus long terme ainsi que des données épidémiologiques et de pharmacovigilance ».

 

Myocardites et les péricardites : les données françaises

Depuis juillet 2021, les myocardites et les péricardites sont considérées comme un effet indésirable pouvant survenir rarement suite à une vaccination par Comirnaty (Pfizer) ou Spikevax (Moderna). Dans ce contexte, EPI-PHARE a conduit une nouvelle étude basée sur les données du Système National des Données de Santé (SNDS) sur toutes les personnes âgées de 12 à 50 hospitalisées en France pour une myocardite ou une péricardite entre le 15 mai et le 31 aout 2021, soit 919 cas de myocardites et 917 cas de péricardites [2]. Ces cas ont été appariés respectivement à 9190 témoins (pour la myocardite) et 9170 témoins (pour la péricardite) de même âge, sexe et département de résidence. Résultat : la deuxième dose de Spikevax serait à l'origine de 132 cas de myocardite supplémentaires par million de doses administrées chez les jeunes hommes de moins de 30 ans et de l'ordre de 37 par un million de doses chez les jeunes femmes de moins de 30 ans. Par comparaison, le risque de myocardite associé à la deuxième dose de vaccin de Pfizer a été estimé à 27 par million et 4 par million respectivement chez les hommes et les femmes de moins de 30 ans. Le risque de péricardite apparait lui aussi plus marqué après le vaccin Spikevax chez les personnes de moins de 30 ans, en particulier après la deuxième dose qui serait à l'origine d'un excès de cas atteignant de l'ordre de 18 par un million de doses chez les jeunes hommes (6/million chez les jeunes femmes). L’évolution clinique des cas de myocardite et de péricardite apparaît généralement favorable. Sur la période étudiée, aucun décès n'a été rapporté parmi les personnes hospitalisées pour une myocardite ou une péricardite suite à la vaccination. Les hospitalisations étaient de 2 à 4 jours en moyenne.

 

 

 

 

 

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