POINT DE VUE

Omicron : pourquoi ce variant est-il préoccupant ?

Pr Gilles Pialoux

Auteurs et déclarations

30 novembre 2021

TRANSCRIPTION/ADAPTATION (vidéo enregistrée le 28 novembre 2021)

Bonjour. Gilles Pialoux. Je suis infectiologue à l’hôpital Tenon, à Paris dans le 20e, et professeur de maladies infectieuses à Sorbonne université. On se retrouve pour faire un petit point sur le variant qui affole les bourses, avec une baisse des cotes boursières, ce qui est un indicateur non épidémiologique, mais un indicateur sociétal tout à fait préoccupant – donc, le variant Omicron.

On est dans la quinzième lettre de l’alphabet grec, ce qui, par définition, laisse à penser que les quatorze premières sont occupées – et vous connaissez, évidemment, les autres variants de préoccupation, les VOC, en anglais, puisque l’OMS l’a classé directement comme variant préoccupant, comme le sont l’Alpha, le Beta et la Gamma que vous connaissez, par ailleurs, sachant que c’est le Delta qui est actuellement dominant dans notre pays.

Il a été découvert, semble-t-il, autour du 11 novembre 2021. Il s’agit de la lignée B.1.1.529, baptisée par la suite Omicron. Elle a été découverte en Afrique du Sud.

Il y a eu aussi d’autres cas, dont un patient à Hong Kong, c’est un patient qui venait d’Afrique du Sud et du Botswana. Pour l’instant on se base sur très peu de séquences, notamment sur les quatre premières séquences. Il faut rappeler que quand un variant est considéré comme préoccupant, les pays dans lequel circule ce virus ont des obligations qui sont fixées par l’OMS, notamment de mettre en commun les séquences, notamment sur la base internationale qui s’appelle GISAID.

Pourquoi ce variant préoccupe tant ?

Il y a des mauvaises nouvelles et on verra aussi ce qui peut faire relativiser.

La très mauvaise nouvelle, c’est la vitesse avec laquelle sont apparues les mutations, d’une part, et le niveau de mutation. C’est-à-dire qu’on n’est pas, comme pour le variant Delta, avec une dizaine de mutations – on est déjà à 32 mutations sur la protéine spike. Et, il n’y a pas seulement des mutations, il y a aussi des délétions, des substitutions…

 
Il y a des mauvaises nouvelles et on verra aussi ce qui peut faire relativiser.
 

 Il y a aussi un certain nombre de mutations sur d’autres protéines, notamment la protéine M, de membrane, et puis, à l’intérieur de spike il y a une partie qui est très préoccupante, qui s’appelle la RBM, qui est précisément le site de fixation sur la cellule cible. Evidemment, on pense tout de suite à l’impact que ça pourrait avoir sur les anticorps monoclonaux et sur la réponse vaccinale.

Donc beaucoup de mutations, des mutations qui dépassent le spike et des mutations à l’intérieur du spike qui sont, pour la plupart, connues et qu’on a vues, déjà, mais très peu dans le Delta – qu’on a vues plutôt avec l’Alpha, le Beta et le Gamma.

Le deuxième niveau d’inquiétude vient des figures qui ont émané, notamment, de Tulio de Oliveira, qu’on peut retrouver sur tous les réseaux sociaux, qui est responsable du centre pour la réponse épidémique en Afrique du Sud, du CERI. Elles montrent qu’il y a une rapidité incroyable avec laquelle ce variant B.1.1.529 occupe l’espace en Afrique du Sud quand on le compare, justement, à ce qui s’est passé juste avant, avec le variant Delta, et encore avant, avec le variant Beta, pour l’Afrique du Sud. Une vitesse de prise de place qui est effectivement un facteur d’inquiétude et qui a été rapportée partout.

 
Il y a une rapidité incroyable avec laquelle ce variant B.1.1.529 occupe l’espace en Afrique du Sud.
 

Concernant la diffusion, on est vraiment au début de l’histoire, mais on voit bien qu’il n’y a aucun pays qui pourrait échapper à ce mutant – la seule question qui se pose pour laquelle on n’a pas de réponse est « est-il appelé à rester minoritaire ou à devenir majoritaire ? »

Si on fait deux colonnes des aspects positifs et des aspects négatifs, je dirais les aspects négatifs on vient de les rappeler – c’est l’amplitude de mutation, la vitesse de propagation, la diffusion à tendance majoritaire en Afrique du Sud, ces mutations de spike qui posent la question de l’impact, le fait que cela survienne en Afrique du Sud au moment où il y a une poussée très importante du virus dans ce pays, le fait qu’il soit classé directement comme variant de préoccupation par l’OMS, et puis l’incertitude sur la morbidité, sur la transmissibilité accrue ou pas et sur la réponse vaccinale ou l’utilisation des anticorps monoclonaux.

Des éléments pour relativiser ?

Si on essaie de trouver des éléments pour relativiser, on dira qu’à force d’en faire trop un virus peut perdre les capacités réplicatives et que là, c’est peut être le cas de ce virus. On espère que c’est une situation différente en Europe par rapport au vaccin. Autre point positif : l’industrie du vaccin ARN peut s’adapter très rapidement à un mutant.

Et puis il faut savoir, aussi, que les antiviraux qui arrivent, le molnupiravir de Merck et, le Paxlovid de Pfizer, qui sont des antiviraux directs inhibiteurs de polymérase ou inhibiteurs de protéase, ne seront pas influencés par ces mutations, donc c’est quand même un élément très important.

 
Les antiviraux qui arrivent, le molnupiravir de Merck et, le Paxlovid de Pfizer, qui sont des antiviraux directs inhibiteurs de polymérase ou inhibiteurs de protéase, ne seront pas influencés par ces mutations.
 

Enfin, autre élément qui relativise pour le ciblage et le dépistage : on est dans un système où on a une délétion qui fait que la PCR est utilisable pour le détecter sans passer par le séquençage du génome, comme on a pu le faire pour le variant Delta, donc on va repérer très facilement ce mutant Omicron.

Consultez les dernières informations de l'OMS sur le variant Omicron ici.

Voir tous les blogs du Pr Pialoux ici

 

 

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