Virtuel – Issues de l’analyse combinée FIDELITY, les nouvelles données sur la finérénone, nouvel antagoniste des récepteurs des minéralocorticoïdes (ARM) non stéroïdiens dans le traitement des diabétiques de type 2 et de l’insuffisance rénale chronique (IRC) font plus que confirmer l’efficacité de ce nouveau médicament chez ces patients en termes de ralentissement de la progression vers la néphropathie terminale et en réduisant les hospitalisations.
Ces résultats présentés lors du congrès de l’ESC 2021 montrent aussi l’intérêt pour les médecins d’être davantage proactifs en recherchant l’albumine des urines des patients diabétiques de type 2 afin de détecter ceux avec une albuminurie mais dont la fonction rénale n’a pas encore chuté sous les 60 mL/min par 1,73 m2, une population que la finérénone peut aider, selon les données de l’étude.
L’analyse de FIDELITY a combiné les données de deux essais pivots sur la finérénone (Kerendia®) chez plus de 13 000 patients diabétiques de type 2 avec une insuffisance rénale chronique. Chacun de ces essais, FIDELIO-DKD et FIGARO-DKD a identifié les patients atteints de néphropathie par deux méthodes ou en utilisant un ensemble de 4 critères.
En résumé, les deux essais ont enrôlé des patients avec un taux de filtration glomérulaire (eGFR) estimé de 25-90 mL/min par 1,73 m2 et un ratio albumine sur créatinine urinaire (UACR) de 30-299, ou un eGFR de 25-75 mL/min par 1,73 m2 et un UACR de 300-5 000.
Il en ressort que 40% de ces patients avait un eGFR d’au moins 60, des niveaux considérés comme normaux, mais qu’ils avaient aussi des taux d’albuminurie qui les mettaient dans la catégorie des patients avec une IRC.
Sur un suivi médian de 36 mois, les patients avec un eGFR normal et une albuminurie, montraient une incidence combinée des événements cardiovasculaires (décès CV, infarctus du myocarde, AVC ou hospitalisation pour insuffisance cardiaque) réduite dans les mêmes proportions environ que celle des patients avec des taux d’eGFR et une fonction rénale plus altérés, un résultat qui montre à quel point les médecins doivent dépister en routine leur patients avec un DT2 pour rechercher une IRC, a considéré le Dr Gerasimos Filippatos, responsable de l’unité dédiée à l’insuffisance cardiaque (hôpital universitaire d’Attikon, Athènes).
« Mesurer l’UACR des patients avec un DT2 est important pour identifier ceux qui bénéficieront d’un traitement par finérénone indépendamment de leur eGFR », a affirmé le Dr Filippatos.
L’analyse combinée de FIDELITY montre une réduction globale significative du critère d'évaluation combiné des maladies cardiovasculaires de 14% par rapport au placebo, qui correspond à une réduction absolue de 1,7% des événements entre les deux bras pendant les 3 années de traitement. Cette réduction s’explique majoritairement par une chute significative des hospitalisations pour insuffisance cardiaque sous finérénone comparé au placebo, qui chute relativement de 22%, et de 1,1% en valeur absolue, rapporte le Dr Filippatos.
Rechercher l’albuminurie en routine change la donne
« C’est vraiment une information qui change la donne en termes de pratique clinique pour les cardiologues » a affirmé le Dr Rajiv L Agarwal, coprésentateur de l’analyse FIDELITY et investigateur principal des deux essais sur la finérénone.
Quand les cardiologues et potentiellement d’autres spécialistes voient des patients avec un DT2, ils se concentrent traditionnellement sur l’évaluation de fraction d’éjection ventriculaire gauche et recherchent d’autres signes d’insuffisance cardiaque. Les nouveaux résultats de FIDELIO-DKD et FIGARO-DKD montrent que le traitement par finérénone peut prévenir la survenue ou l’aggravation de l’IC chez les patients T2D, ce que les cliniciens peuvent faire en mesurant simplement l’UACR, de même que l’eGFR, et en traitant les patients présentant des taux anormaux de l’un ou de l’autre, a expliqué le Dr Agarwal, néphrologue (Faculté de médecine de l’Indiana).
« Les diabétologues savent que lorsqu’ils voient des patients avec un diabète, ils doivent vérifier l’albuminurie. Mais quand d’autres praticiens voient un patient avec un DT2 et un eGFR normal, ils estiment que le patient est OK et ne demandent pas un examen urinaire, note le Dr Bertram Pitt, spécialiste de l’insuffisance cardiaque à l’University du Michigan (Ann Arbour) et investigateur des essais sur la finérénone.
« Nous devons accorder plus d’attention à l’UACR et à l’abuminurie ; alors que jusqu’à présent les praticiens se sont focalisés sur l’eGFR » acquiesce le Dr Dipti Itchhaporia, un cardiologue (Carlton Heart and Vascular Institute of Hoag Hospital, Newport Beach). Le ratio albumine/créatinine urinaire (UACR) « est un marqueur à partager » entre les endocrinologues, les néphrologues et les cardiologues, qui tous trois prennent soin des patients avec un DT2, suggère le Dr Itchhaporia, président de l’American College of Cardiology.
Deux essais pivots avec des résultats cohérents
L’analyse FIDELITY a combiné les données de l’essai FIDELIO-DKD, rapportés en 2020, et ceux de FIGARO-DKD qui ont été dévoilés pendant ce congrès et publiés en ligne.
Les résultats des deux études allaient dans le même sens, même si le critère primaire de FIDELIO-DKD était une mesure composite concernant la maladie rénale alors que le critère secondaire portait sur la maladie cardiovasculaire, alors que c’était l’inverse dans FIGARO-DKD où le critère primaire portait sur une évaluation CV tandis que les résultats sur le rein faisaient office de critères secondaires.
En plus de montrer une réduction significative à la fois sur les événements CV combinés et sur le point particulier des hospitalisations pour insuffisance cardiaque, les deux essais ont aussi montré un bénéfice sur la réduction de la progression de la maladie rénale, avec notamment significativement moins de patients développant une maladie rénale au stade terminal.
Dans l’analyse combinée de FIDELITY, le traitement par la finérénone a réduit l’incidence de la maladie rénale terminale de 20% comparé au placebo, avec une réduction absolue de 0,6%.
Un autre résultat régulièrement retrouvé était la relativement faible incidence de l’hyperkaliémie comparé à ce qui est couramment observé avec d’autres minéralocorticoïdes (ARM) comme la spironolactone ou l’éplérénone. Dans l’analyse combinée, le traitement pas la finérénone était associé à une incidence de 1’% de l’hyperkaliémie versus 7% chez les patients sous placebo, et le taux d’arrêt de traitement pour cause d’hyperkialémie a été de 1,7% sous finérénone et de 0,6% avec le placebo.
« La finérénone est bien mieux tolérée » que les autres ARM pour ce qui est de l’hyperkialiémie, note le Dr Pitt. « Il y a beaucoup d’idées fausses » autour de la capacité des ARM à augmenter la kaliémie et « les gens ont peur ».
« Communiquer sur la sécurité de la finérénone va demander beaucoup de travail, reconnait-il. Monitorer le potassium en routine est un bon moyen de minimiser les risques d’hyperkaliémie sous finérénone » ajoute-t-il.
Un bénéfice à combiner les traitements
Autre observation surprenante tirée de FIDELITY : environ 7% des patients enrôlés étaient aussi sous traitement avec un inhibiteur du cotransporteur 2 sodium-glucose (SGLT2) à l’entrée dans l’essai, et 7% étaient sous traitement par antagoniste des récepteurs de peptide-1 glucagon-like (GLP-1), et dans les deux sous-groupes, l’incidence du critère composite cardiovasculaire semble suggérer des effets additifs de l’une ou l’autre de ces classes quand elles sont combinées à la finérénone. Même si le nombre de patients était trop faible pour montrer un résultat définitif, « nous espérons voir un effet additif », a expliqué le Dr Pitt.
Idéalement, les patients avec un DT2 et une IRC « devraient être sous les deux », un inhibiteur de SGLT2 et la finérénone, prédit-il.
Les inhibiteurs de SGLT2 sont désormais considérés comme un traitement -clé pour les patients avec un DT2 ou une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection réduite, et des données préliminaires suggèrent que combiner ces traitements avec la finérénone pourraient apporter des bénéfices supplémentaires, approuve le Dr Itchhaporia. Au-delà du besoin d’avoir davantage de preuves pour le prouver, restent les considérations pratiques comme « comment allons-nous payer ces traitements formidables » ? Question à laquelle le Dr Itchhaporia répond avec optimisme que des analyses coût-efficacité établiront peut-être que le bénéfice additionnel de la combinaison justifie les coûts additionnels.
Largement fondé sur les résultats de FIDELIO-DKD, la finérénone a reçu une autorisation de mise sur le marché de la FDA en juillet 2021 pour le traitement des patients diabétiques de type 2 avec une maladie rénale chronique.
FIGARO-DKD, FIDELIO-DKD, et FIDELITY ont été financées par Bayer, la société pharmaceutique qui fabrique la finérénone. Le Dr Filippatos a reçu des honoraires de Bayer, et a des liens financiers avec Amgen, Boehringer Ingelheim, Medtronic, Novartis, Servier, et Vifor. Le Dr Agarwal a été consultant pour Bayer et de nombreuses autres industries pharmaceutiques. Le Dr Pitt a été consultant pour Bayer et d’autres compagnies pharmaceutiques. Le Dr Itchhaporia n’a pas de liens d’intérêt.
L’article a été publié sur Medscape.com sous le titre FIDELITY: Finerenone Cuts CV Risk in T2D Across CKD Spectrum. Traduit par Stéphanie Lavaud.
Crédit photo : Getty Images
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Citer cet article: FIDELITY : la finérénone protège le cœur et les reins des patients DT2 avec une IRC - Medscape - 6 sept 2021.
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