Cancer du sein métastatique HER-2+ : deux études positives avec des anticorps conjugués

Dr Barbara Pistilli

Auteurs et déclarations

24 septembre 2021

Le Dr Barbara Pistilli (Institut Gustave Roussy) présente deux études évaluant des anticorps conjugués qui, selon elle, constitueront le « futur du traitement » des cancers du sein métastatiques HER-2 positifs.

  • DESTINY Breast03 : le trastuzumab deruxtecan en 2e ligne améliore la survie sans progression de 75% (vs 35% avec le T-DM1) chez patientes avec un cancer du sein métastatique HER2+

  • TULIP : la survie sans progression avec le trastuzumab duocarmazine était de 7 mois, vs 4 mois dans le bras avec un traitement standard au choix de l’investigateur.

TRANSCRIPTION

Barbara Pistilli Bonjour, je suis Barbara Pistilli, oncologue médicale à l’Institut Gustave Roussy, dans le comité pathologie mammaire, et aujourd’hui je voudrais commenter deux essais cliniques que je trouve assez importants, présentés cette année au congrès de l’ESMO. C’était un ESMO assez riche pour tout ce qui concerne la pathologie mammaire et surtout dans le cancer du sein métastatique.

DESTINY Breast03 : le trastuzumab deruxtecan en 2e ligne dans le cancer du sein métastatique HER2+

La première étude importante était DESTINY Breast03 [NCT03529110] qui était présentée par Javier Cortés. Elle montrait les premiers résultats d’une étude de phase 3 randomisée avec le trastuzumab deruxtecan. Il s'agit d'un anticorps conjugué à la chimiothérapie qui cible l’HER-2, un peu comme les T–DM1, avec la différence d’être un anticorps drug-conjugué de troisième génération et donc plus puissant.

Cette étude a comparé le trastuzumab deruxtecan au T–DM1 en deuxième ligne, c’est-à-dire chez des patients atteintes d’un cancer du sein HER-2 positif métastatique qui avaient reçu une première ligne par du trastuzumab et du taxane.

Résultats : les résultats sont vraiment impressionnants parce que c’est la première analyse, donc une analyse intermédiaire, qui démontre que la survie sans progression était énormément améliorée chez les patientes sous trastuzumab deruxtecan. Dès la première année, on a 75 % des patientes qui sont libres de progression avec le trastuzumab deruxtecan, contre 35 % dans le bras traité avec le T-DM1. Donc les données sont assez impressionnantes, avec deux courbes qui se séparent assez précocement.

Ces données sont d’autant plus importantes qu’elles sont assez rassurantes en termes de toxicité et d’effets secondaires. Pourquoi ? Parce que le trastuzumab deruxtecan est un médicament qui peut être associé à des pneumopathies, à des interstitiopathies ― on le savait depuis les données de l’année dernière, avec DESTINY Breast01. Dans cette étude, qui était une étude de phase 2 avec une population un peu plus lourdement prétraitée, toujours HER-2 + ; nous avions vu que la prévalence de l’interstitiopathie était de 13 %, avec surtout des grades 1 et 2. Dans l’étude DESTINY Breast03 présentée cette année à l’ESMO, seulement 10 % – donc une proportion plus faible de patientes – ont eu une interstitiopathie, et encore une fois, c’est surtout en grades 1 et  2.

Donc le message important est qu’on a un médicament qui est très puissant, qui deviendra la deuxième ligne de traitement dans les cancers du sein HER-2 positifs, donc c'est une étude qui va vraiment changer les pratiques, avec des données plutôt rassurantes en termes de toxicité, mais avec le message important d’identifier précocement ces patientes, comprendre quand elles sont en train de développer une interstitiopathie et arrêter rapidement les traitements. Cela permet d’avoir une récupération presque complète et de pouvoir remettre la patiente sous la même thérapie. C’est vraiment l’étude la plus importante en ce qui concerne le cancer du sein.

 
On a un médicament (le trastuzumab deruxtecan) qui est très puissant, qui deviendra la 2e ligne de traitement dans les cancers du sein HER-2+.
 

TULIP : trastuzumab duocarmazine vs thérapie standard au choix de l’investigateur

Il y a eu une deuxième étude, TULIP [NCT03262935], qui évaluait l’efficacité du trastuzumab duocarmazine, un anticorps drug-conjugué qui cible toujours l’HER-2. C’est une étude de phase 3 qui a comparé le trastuzumab duocarmazine à un traitement au choix de l’investigateur. C’était une population plus lourdement prétraitée par rapport à celle incluse dans DESTINY Breast03 – c’est-à-dire des patientes qui avaient déjà reçu un précédent traitement par trastuzumab et taxane, mais aussi du T-DM1 ou même d'autres lignes de thérapie, toujours ciblant l’HER-2.

Quel est l’intérêt de cette étude ? Encore une fois, le traitement par un anticorps drug-conjugué démontre une certaine supériorité par rapport à tous les traitements standards qu’on peut choisir dans ce contexte, parce que la comparaison était par rapport à une thérapie standard au choix de l’investigateur. On a une survie sans progression avec le trastuzumab duocarmazine de 7 mois par rapport à un peu plus de 4 mois dans le bras standard. Par contre on a des toxicités qu’il faut bien considérer, qu’il faut savoir monitorer et gérer. La toxicité la plus fréquente avec ce médicament est la toxicité oculaire, donc plutôt des conjonctivites, qui étaient plutôt fréquentes (70 % des patientes traitées dans l’étude), et pour lesquelles il y a actuellement une vraie intervention, une prise en charge spécifique avec des études en cours qui sont en train d’évaluer comment gérer ces toxicités qui sont plutôt typiques de cette classe de médicament que sont les anticorps drug-conjugués.

Conclusion

Voilà donc deux études assez importantes dans les cancers du sein HER-2+ avec deux anticorps drug-conjugués qui, à mon avis, sont vraiment le futur dans le traitement du cancer en général, plus spécifiquement du cancer du sein métastatique.

 

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