France – Si la situation épidémique s’améliore grandement en France, du fait, en grande partie de la progression de la vaccination, il ne faudrait pour autant oublier les personnes les plus les plus démunies et les moins visibles, y notamment les migrants, ont rappelé en chœur l’Académie de médecine, la Haute autorité de santé (HAS) [1,2] et le Conseil scientifique[3] : « Une stratégie de vaccination « aller vers » doit être systématiquement mise en œuvre pour toucher les populations éloignées du système de soins », encourage ce-dernier.
L’une des priorités actuelles doit être la vaccination contre le Covid-19 des personnes précaires, à savoir les personnes en situation de vulnérabilité sur le plan socio-économique : conditions de vie précaire, résidence en milieux collectifs notamment dans les logements pour travailleurs migrants, prisons, foyers d’accueil…
Pourquoi cibler les personnes précaires ?
Il est important d’augmenter la couverture vaccinale en touchant toutes les populations et en limitant les inégalités d’accès à la vaccination, d’autant plus que les inégalités sociales sont associées au risque d’infection et possiblement de formes graves de Covid-19. « Ce lien repose sur une combinaison complexe de facteurs associés à une augmentation de l’exposition, de la transmission, de la susceptibilité et de la vulnérabilité : travail précaire, profession dite de « première ligne » en contact avec le public, habitat dans des logements collectifs ou surpeuplés, foyers multi-générationnels, forte densité de population » rappelle la HAS. Cette vulnérabilité est également augmentée par la présence de comorbidités constituant des facteurs de risque de formes graves de Covid-19.
Concernant les migrants, l’Académie de médecine déplore « l’absence ou l’insignifiance des données, qu’il s’agisse des indicateurs épidémiologiques ou de la couverture vaccinale contre le Covid-19 », sachant qu’ils vivent dans des conditions rendant les gestes barrière et l’accès à l’eau ou au gel hydroalcoolique improbables. Le fardeau réel du Covid-19 dans ces communautés n’est donc pas connu.
Les sages reconnaissent que « des initiatives ont été prises pour vacciner ces populations, grâce à l’action de collectivités locales, d’associations bénévoles ou du SAMU social », cependant « elles restent ponctuelles, disparates, et au total, insuffisantes ». D’où l’importance « de déployer des moyens humains et financiers spécifiquement dédiés » pour étendre la campagne de vaccination à toutes les personnes migrantes sur l’ensemble du territoire national. Car, pour l’Académie de Médecine, « la politique de vaccination devant être inclusive pour être efficace ».
Que faire en pratique ?
Pour ce qui est des populations précaires, une stratégie « aller-vers » a déjà été mise en place, reconnait de son côté la HAS, mais reste insuffisante et doit être amplifiée : « actions de sensibilisation, mobilisation d’équipes mobiles de vaccination, création de centres de vaccination éphémères, aide à la prise de rendez-vous, accompagnement physique, recours à l’interprétariat linguistique et à la médiation en santé »… Il paraît également nécessaire de mettre en place une communication adaptée en direction de ces publics et de déployer des moyens humains et financiers spécifiquement dédiés.
Concernant les migrants, l’Académie de médecine recommande :
D’inclure l’ensemble des personnes migrantes dans la surveillance épidémiologique du COVID-19 et dans le suivi de la campagne nationale de vaccination ;
De recruter des interprètes pour mener de vastes campagnes d’information et de sensibilisation à la vaccination auprès de ces populations vivant hors de portée des messages de santé publique ;
D’associer systématiquement la vaccination contre le Covid-19 au rattrapage vaccinal préconisé par la HAS pour les migrants primo-arrivants ;
D’octroyer aux centres médico-sociaux et aux associations engagées auprès des personnes précaires et migrantes, des réfugiés, des demandeurs d’asile, les moyens humains et techniques nécessaires pour vacciner dans les meilleures conditions de sécurité et de dignité ;
De promouvoir des campagnes de vaccination par des équipes mobiles opérant dans les campements et les lieux d’hébergement des personnes migrantes.
La HAS encourage également une politique « d’aller-vers » les travailleurs précaires (saisonniers, intérimaires, ouvriers de chantiers…), par exemple en sensibilisant les employeurs sur les enjeux de la vaccination.
La HAS rappelle qu’elle recommande la réalisation d’un test sérologique rapide de type TROD lors de la première injection d’un vaccin à deux doses, ce qui permet de repérer les personnes ayant eu le Covid-19 sans le savoir et ne nécessitant ainsi qu’une seule dose. Ce test a d’autant plus de sens pour une population précaire difficile d’accès pour une 2ème dose et dans laquelle la séroprévalence apparaît particulièrement élevée.
Le bilan des dispositifs « d’aller-vers » en chiffres
Le ministère de la santé a fourni un premier état des lieux chiffré des différents dispositifs « d’aller-vers » mis en place par l’Etat depuis le début de la campagne de vaccination.
Pour les plus de 65 ans, 3 millions de SMS et 3,5 millions de courriers ont été envoyés avec un numéro coupe-file pour faciliter la prise de rendez-vous. Auxquels se sont ajoutés 1,4 millions d’appels passés par l’assurance maladie. Au terme de ces actions, 130 000 rendez-vous ont été pris. « Il y a beaucoup d’efforts d’aller vers mais le taux de transformation est ce qu’il est. C’est mieux que si l’on n’avait pas pu faciliter la prise de rendez-vous mais cela ne peut pas être l’unique action. Ces efforts doivent s’accompagner de toutes les actions de terrain et notamment de la médiation des acteurs locaux », a souligné le ministère de la santé.
Concernant les personnes en situation de précarité, 3 millions de SMS indiquant le numéro coupe-file ont aussi été envoyés aux personnes qui touchent la complémentaire santé solidaire.
Par ailleurs, la vaccination en équipes mobiles a permis de réaliser 410 000 injections depuis le début de la campagne.
Aussi, sur tout le territoire, 700 partenariats avec des associations ont été montés pour de la sensibilisation et 200 partenariats ont été formés pour de la vaccination.
« Les objectifs fixés aux acteurs locaux d’ici la fin de l’été sont que la vaccination en primo-injection soit proposée à l’ensemble des personnes en très grande précarité (vivant en structures d’hébergement ou détenues) », précise le ministère.
Cet article a été initialement publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape. Complété par Aude Lecrubier.
Crédit photo : Getty Images
Medscape © 2021 WebMD, LLC
Les opinions exprimées dans cet article ou cette vidéo n'engagent que leur(s) auteur(s) et ne reflètent pas nécessairement celles de WebMD ou Medscape.
Citer cet article: COVID-19 : vacciner les populations précaires est une priorité ! - Medscape - 12 juil 2021.
Commenter