Virtuel – L'immunothérapie était déjà une avancée considérable pour les patients atteints d'un cancer du poumon non à petites cellules (CPNPC) à un stade avancé. Aujourd'hui de nouvelles données montrent qu'elle l'est aussi pour les stades plus précoces de la maladie. Ainsi, l'analyse intermédiaire de l'étude Impower010 a montré une amélioration remarquable de la survie sans maladie chez des patients atteints d'un CPNPC aux stade 1B -3A lorsque de l'atezolizumab (Tecentriq®) est ajouté à la chimiothérapie adjuvante réalisée après la résection de la tumeur.
Elle montre aussi que le bénéfice de l'ajout de cet anti-PDL1 est plus important, avec une survie sans maladie augmentée de 34%, quand la tumeur exprime PDL1.
C'est le « premier essai clinique global de phase III utilisant un inhibiteur de checkpoint immunitaire à montrer un gain de suvie sans maladie dans le cadre d'un CPNPC à un stade précoce » a indiqué la Pr Heather Wakelee (Stanford University Medical Center, Californie) à l'occasion d'un point presse organisé avant le début du congrès annuel de l'American Society of Clinical Oncology (Asco 2021). Les résultats de cette étude ont été présentés le 6 juin (Abstract 8500).
Le Dr Julie Gralow, cheffe du service médical et vice-présidente exécutive de l'ASCO, a confirmé que « les inhibiteurs de checkpoint immunitaires avaient changé le traitement de nombreux cancers » et qu'avec cette étude « c'est la première fois que nous voyons une immunothérapie efficace dans les stades initiaux du CPNPC. »
« C'est une avancée importante dans la compréhension du rôle de l'immunothérapie dans les stades précoces du cancer du poumon » et « potentiellement un pas en avant pour beaucoup de patients », a-t-elle déclaré.
La prise en charge stantard pour les patients atteints d'un CPNPC de stade 1B à 3A « n'a pas évolué depuis des années » alors que « des progrès significatifs » ont été réalisés dans le traitement des maladies plus avancées, a rappelé la Pr Heather Wakelee. Aussi, la majorité des patients avec un CPNPC opéré reçoit encore une chimiothérapie adjuvante à base de platine, dont on sait qu'elle réduit le risque de récidive de 16 % chez les patients auxquels la tumeur a été totalement ôtée.
L'étude en détails
L'étude présentée au congrès de l'ASCO a évalué le bénéfice qu’il y a à ajouter de l'atezolizumab à la chimiothérapie adjuvante dans la phase III globale de l'étude IMpower010.
Les participants étaient atteints d'un CPNPC de stade 1B à 3A, avec une tumeur d'une taille supérieure ou égale à 4 cm et la possibilité de faire une recherche de PDL1. Après la résection complète, 1280 patients ont reçu quatre cycles d'une chimiothérapie à base de platine.
Parmi eux, 1005 ont ensuite été randomisés pour recevoir soit 16 cycles d'atezolizumab 1200 mg en IV toutes les trois semaines soit le meilleur soin de support.
Les résultats intermédiaires montrent que, après un suivi médian de 32,8 mois, l'ajout d'atezolizumab a significativement réduit le risque de récidive ou de décès en comparaison au meilleur soin de support chez les patients quand la tumeur exprimait PDL1 (≥ 1%), correspondant à un hazard ratio 0,66 (P=0,004).
A 24 mois, le taux de survie sans maladie était de 74,6% dans le groupe traité avec l'atezolizumab versus 61 % dans le groupe avec le meilleur soin de support, puis il diminuait respectivement à
60 % et 48,2 % au bout de 36 mois.
En prenant en compte tous les patients randomisés, l'addition d'atezolizumab à la chimiothérapie était associée à une réduction plus faible du risque de récidive ou de décès en comparaison au meilleur soin de support, correspondant à un hazard ratio de 0,79 après un suivi médian de 32,2 mois (P=0,02).
Dans l'analyse en intention de traiter, la réduction du risque de récidive ou de décès avec l'atezolizumab était à la limite de la significativité, correspondant à un hazard ratio de 0,81 (P=0,04).
Heather Wakelee a précisé que les patients avec une maladie de stade IB, qui représentaient environ 12 % des participants, « avaient tendance à faire mieux mais que plus de temps était nécessaire pour apprécier les effets sur la récidive » et donc que les résultats étaient « préliminaires ».
Elle a aussi bien insisté sur le fait que les données de survie globale n'étaient pas encore suffisamment abouties et que la survie n'avait pas été formellement évaluée dans l'analyse.
Un médicament à passer en clinique ?
Concernant la sécurité du médicament, le profil des effets indésirables de l'atezolizumab était cohérent avec ce qui avait été rapporté jusque-là, indiquent les auteurs dans l'abstract. Cela dit, le Pr Wakelee a dit à la conférence de presse « qu'ils avaient dû arrêter le traitement avec l'atezolizumab chez 18 % des patients à cause de la toxicité ».
Des effets indésirables de tout grade ont été rapportés chez 70,7% des participants du groupe meilleur soin de support, contre 92,7% dans le groupe traité avec l'atezolizumab. Des effets indésirables de grade 3 et 4 ont été rapportés chez respectivement 11,5% et 21,8% des patients.
Reste que les nouveaux résultats montrent que le bénéfice de l'atezolizumab + chimiothérapie est « plus important » qu'avec chimiothérapie + meilleurs soins de soutien, « c'est donc quelque chose que j'aimerais pouvoir proposer à mes patients dans cette situation. ».
Interrogée sur la possibilité de recommander ce médicament aux patients compte tenu de ses résultats, elle a souligné « qu'évidemment une autorisation était nécessaire » pour cette indication, elle a toutefois rappelé que la Food and Drug Administration (FDA) avait approuvé d'autres médicaments, récemment l'osimertinib (Tagrisso®), en s'appuyant sur le critère de survie sans maladie ».
La principale investigatrice a ajouté que « cette analyse de la survie sans maladie et de la survie globale sur des populations « en intention de traiter » va se poursuivre sur une plus longue durée ».
Heather Wakelee a également souligné l'importance du dépistage du cancer du poumon, afin de détecter la maladie dans ses premiers stades, « quand elle est potentiellement curable ».
Elle a également souligné l'importance de l'identification des biomarqueurs pour les patients avec une tumeur opérée « pour rechercher les mutations EGFR, qui peuvent être traités avec des EGFR tyrosine kinase inhibitors (TKIs), et aussi de regarder le statut vis-à-vis de PDL1 … dans la mesure où dans cet essai, le bénéfice le plus important » concernait les patients dont la tumeur exprimait PDL1.
L'étude a été financée par Hoffman-LaRoche. Les Dr Wakelee et Gralow ont des liens d'intérêt avec différentes entreprises.
L’article a été publié initialement sur Medscape.com sous l’intitulé “Immunotherapy Takes First Major Step Into Earlier NSCLC”. Traduit/adapté par Marine Cygler.
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Citer cet article: CPNPC au stade précoce : premiers résultats de survie prometteurs avec une immunothérapie - Medscape - 7 juin 2021.
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