URPS 2021 : les médecins ont boudé les élections

Jean-Bernard Gervais

Auteurs et déclarations

16 avril 2021

Paris, France— Les élections aux Unions régionales des professionnels de santé (URPS) se sont closes le 7 avril et un premier constat s'impose, tout du moins pour le collège des médecins : jamais la participation n'avait été aussi basse. La participation s'est élevée à 22,66%, soit une baisse de... 17,26 points depuis les dernières élections de 2015. Comme l'annonce le ministère de la Santé dans un communiqué, ces « résultats permettent également de mesurer l’audience des syndicats, critère pris en compte ensuite dans le cadre de l’enquête de représentativité ». Autant dire qu'ils sont cruciaux pour les syndicats concernés. Mais pour les médecins libéraux qui étaient appelés au vote, force est de constater que l’indifférence l’a emporté.

Les syndicalistes médecins responsables ?

Un crève-cœur que n'aura pas laissé passer le syndicat Jeunes médecins, qui avait présenté des listes sans pour autant faire élire un seul représentant : « pour notre première participation à ces élections, nous savions d’emblée ne pas pouvoir dépasser celui d’un opposant soviétique (0,2 %). » Surtout, le syndicat est triste car « seulement 20% d’entre nous a voté à ces élections, sensées renouveler pour 5 ans nos représentants régionaux, responsables de tant de choses obscures, et selon les régions parfois assises sur des tas d’or, notre or. Et qu’il est impensable que ce même syndicalisme médical rejette la faute sur le corps électoral en les accusant de manque d’investissement temporel et de vision pour leur profession, de considération envers les possibilités qu’offre une représentation de qualité, de confiance en ses représentants. Car il en est en grande partie responsable ».

 
Seulement 20% d’entre nous a voté à ces élections, sensées renouveler pour 5 ans nos représentants régionaux.
 

Le scrutin numérique, responsable ?

La confédération des syndicats médicaux français regrette aussi « une très faible participation, qui est à 22,66 % contre presque 40 % en 2015 ». La CSMF accuse pour le coup « le nouveau mode de scrutin par voie numérique ainsi que la période de pandémie liée à la Covid-19 ». L'Union française pour une médecine libre (UFML) pointe du doigt les « syndicats historiques », qui « ne mobilisent plus, malgré leur accès aux listings professionnels, malgré leur utilisation de mailing list dans des structures où ils sont élus depuis longtemps ».

La pandémie, responsable ?

Pour MG France, le contexte de pandémie explique cette mobilisation historique en baisse : « L’extrême lassitude entrainée par une année de crise sanitaire explique aussi un pourcentage d’abstention de plus de 75%, niveau que MG France regrette et qui ne favorisera pas l'action des élus. »

MG France en première position chez les généralistes

En termes de résultats, là aussi on assiste à un véritable bouleversement. Tandis que le syndicat MG France conforte sa place de première organisation des médecins généralistes, (31,29 % en 2015 à 36,58 % en 2021), la Fédération des médecins de France (FMF) perd sa position de 2e syndicat des généralistes au profit de la CSMF (respectivement 17,18% contre 17,31%) tout de suite talonnée par l'UFMLS qui obtient 17,08%. Le syndicat des médecins libéraux s'écroule, passant de 16,49% à 9,46% en 2021.

Avenir spé le bloc premier chez les spécialistes

Dans le collège des spécialistes, l'Union syndicale Avenir spé le bloc Union AAL-SYNGOF-UCDF » passe de 24,22 % en 2015 à 39,30 % en 2021, et devient ainsi le premier syndicat des spécialistes, ravissant la pôle position à la CSMF, qui passe de 31,6% en 2015 à 22,36% en 2021. Les autres syndicats perdent des voix de manière massive : « La Fédération des médecins de France (FMF) passe de 16,68 % en 2015 à 7,5 % en 2021 ; Le Syndicat des médecins libéraux (SML) passe de 23,86 % en 2015 à 12,02 % en 2021 ; L’Union collégiale (UC) passe de 2,72 % en 2015 à 1,38 % en 2021.»

La CSMF arrive en deuxième position et la troisième place échoit à l'UFML (16,67%) qui fait donc une entrée remarquable dans le tiercé de tête pour sa première campagne électorale aux URPS. Contrairement aux syndicat jeunes médecins qui obtient pour son coup d'essai 0,75% chez les spécialistes, et 0,22% chez les généralistes.

Réussite de l’UFMLS, échec de Jeunes médecins

L'UFMLS est bien évidemment heureuse de son score et remercie ses électeurs. « Merci de nous avoir fait confiance. Demain se construit aujourd'hui et nous allons, fiers de nos idées, de notre appartenance, continuer à construire cette force qui porte vos espoirs et tout faire pour les concrétiser ». Autant dans les instances des URPRS que lors des négociations conventionnelles, l'UFMLS promet une transparence totale, « balayer la poussière, rajeunir les cadres ».

Autre gagnant de ces élections, MG France, premier syndicat chez les généralistes, et deuxième syndicat en nombre de voix sur l'ensemble des deux collèges. Pour MG France c'est une victoire des syndicats catégoriels : « Ces élections confortent surtout les syndicats qui ont choisi la défense catégorielle de leur profession, MG France depuis plus de 30 ans, Avenir Spécialiste, nouveau venu chez les spécialistes de second recours, aujourd’hui. »

CSMF premier syndicat sur les deux collèges généralistes et spécialistes

Si la CSMF se tasse, ne recueillant que la deuxième position chez les généralistes, tout comme chez les spécialistes, elle reste le premier syndicat en nombre de voix sur l'ensemble des deux collèges : « Dans un contexte particulièrement difficile, la CSMF reste en tête tant en termes de sièges que de voix. Ceci malgré la poussée des « yakafokon » et des replis identitaires qui touchent aussi l'ensemble de notre société. » L'Union avenir spé-Le Bloc fait part de sa joie tout en se réservant pour plus tard une analyse plus fine de ses résultats qui la placent en tête des syndicats spécialistes : « Il faut rendre hommage à tous ceux qui ont participé au succès de nos listes. Chacun est invité à continuer de militer sur le terrain pour promouvoir la démarche d’Avenir spé – Le Bloc dans tous les territoires. »

 
Aujourd’hui, le syndicalisme médical apparait affaibli à l’extrême : divisions, vieilles rancœurs, opacité, procédures, intimidations ...
 

Le syndicat Jeunes médecins, qui n'a pas réussi à convaincre, est « triste » pour le peu d'intérêt qu'a suscité ces élections chez les médecins : « Aujourd’hui, le syndicalisme médical apparait affaibli à l’extrême : divisions, vieilles rancœurs, opacité, procédures, intimidations ... Alors que nous avons un besoin urgent de lisibilité, de transparence, de représentativité, d’inclusivité, de confiance. Au risque de disparaitre », analyse un candidat du syndicat.

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