Copenhague, Danemark – Une vaste étude observationnelle danoise révèle que les réinfections au SARS-CoV-2 restent rares mais aussi que les personnes de plus de 65 ans sont les plus à risque.
Les chercheurs danois ont découvert que moins de 1% de ceux qui avaient déjà été testés positifs étaient recontaminés. L'infection initiale était associée à environ 80 % de protection contre une nouvelle recontamination au coronavirus. Cependant pour ceux âgés de plus de 65 ans, ce pourcentage chutait à 47 %. Les résultats ont été publiés en ligne dans le Lancet [1].
Malgré la preuve que les réinfections sont assez rares, « nombreux sont ceux qui qualifieront les données rapportées par Christian Hansen et ses collègues de relativement alarmantes », indiquent Rosemary Boyton et Daniel Altmann, chercheurs à l'Imperial College London (Grande-Bretagne), dans un éditorial du Lancet qui accompagne l'article [2]. La protection de 80 % contre les réinfections et de 47 % pour ceux de plus de 65 ans « sont des chiffres plus inquiétants que dans d'autres études ».
« Personne n’est protégé contre une réinfection. Et les plus âgés présentent un risque plus élevé de l'attraper une nouvelle fois » a expliqué Daniela Michlmayr (Institut Staten Serums, Copenhague), co-auteur de l'étude, à Medscape Medical News. « Nos résultats soulignent l'importance des mesures de protection des personnes âgées et l'importance de respecter les mesures de restriction, y compris pour les personnes ayant déjà contracté le Covid ».
Aussi, les éditorialistes, Rosemary Boyton et Daniel Altmann insistent sur le fait que [par rapport à l’immunité naturelle] la vaccination confère une protection meilleure en quantité et en qualité, et plus durable – mesurée avec les anticorps neutralisants et les lymphocytes T, contre une nouvelle infection.
Une vaste base de données
Cette étude observationnelle danoise a permis de recueillir les données individuelles de sujets ayant bénéficié de tests PCR en 2020. En 2020, environ 4 millions de Danois ont réalisé près de 10,6 millions de tests PCR COVID-19. À partir de ces données, le taux des sujets infectés durant la première vague de l’épidémie à SARS-CoV-2 (mars-mai 2020) et réinfectés au cours de la seconde vague (septembre-décembre 2020) a été mesuré.
Au cours de l’année 2020, les capacités d’utilisation des tests ont rapidement augmenté au Danemark. En fin d’année, 10% de la population étaient testés en moyenne chaque semaine.
Au cours de la première vague 533 381 sujets ont bénéficié d’un test PCR (taux de positivité 2,20%) et 525 339 ont été suivis durant la seconde vague. Ceux qui ont été testés positifs entre les deux vagues et ceux qui sont décédés avant la seconde vague ont été exclus du suivi.
Un taux de protection contre la réinfection de 80,5% à 6 mois
Daniela Michlmayr et ses collègues ont découvert que 2,11% des 525 339 individus avaient été testés positifs pour le SARS-CoV-2 pendant la première vague au Danemark entre mars et mai 2020. Dans ce groupe, 0,65% ont été testés positifs pendant la seconde vague, entre septembre et décembre.
Pour limiter le biais possible lié aux individus qui sont testés de façon répétée, les chercheurs ont pris soin de réaliser une analyse de sensibilité dans le sous-groupe de soignants dont ils ont évalué le taux de réinfection. Ils ont découvert que 1,2% ont été testés positifs une seconde fois pendant la deuxième vague.
Globalement, les chercheurs ont estimé que le taux de protection contre la réinfection au SARS-CoV-2 était de 80,5% (risque relatif 0,195 [0,155-0,246]).
Des analyses complémentaires réalisées sur la cohorte alternative ont montré qu’environ 47,1% des sujets de 65 ans et plus n’étaient pas de nouveau réinfectés.
Aucune différence entre les sexes ou en fonction du temps (protection sur 3-6 mois de suivi versus ≥7 mois) n’a pu être mise en évidence.
Une limite de l'étude est l'impossibilité de corréler les symptômes au risque de réinfection.
Vacciner les plus âgés qui ont déjà eu le Covid
« Ces résultats soulignent la nécessité de vacciner les gens qui ont déjà été malades du Covid-19 dans la mesure où l'on ne peut pas vraiment être sûr de l'immunité naturelle vis-à-vis de l'infection, en particulier parmi la population des plus de 65 ans », considère Daniela Michlmayr.
« Le fait que les personnes les plus âgées ont plus tendance que les plus jeunes à contracter de nouveau la maladie peut s'expliquer par le vieillissement du système immunitaire, ce qu'on nomme la sénescence immunitaire », indiquent les auteurs, qui n'ont pas mis en évidence de différences significatives entre les hommes et les femmes.
« Ces résultats sont cohérents : la réponse immunitaire des patients immunodéprimés ou d'un âge avancé n'est pas persistante », a indiqué le Dr David Hirschwerk (spécialiste des maladies infectieuses, Manhasset, New York) à Medscape Medical News. Invité à commenter ce travail, il confirme : « Ces résultats soulignent aussi l'importance de la vaccination des personnes âgées, même celles qui ont déjà été malades du Covid ».
Les chercheurs ne se sont pas penchés sur la problématique des variants car ceux-ci n'étaient pas en circulation au Danemark pendant la période de l'étude.
Les résultats seraient-ils différents si les auteurs avaient pu tenir compte des variants ? « Cela dépend du variant, mais certainement pour le variant B.1.351[dit « variant sud-africain »] dans la mesure où il y a déjà des données claires qui démontrent clairement un risque de réinfection avec la souche initiale du virus ».
L'émergence des variants du SARS-CoV-2 qui pourraient échapper à l'immunité naturelle acquise par une première infection « complique les choses », indiquent les éditorialistes.
« Les variants émergents risquent de placer l'immunité sous un seuil nécessaire à la protection, ce qui devrait inciter à mettre à jour les vaccins. Ce qui est intéressant, c'est que la réponse immunitaire est significativement augmentée après une seule dose de vaccin chez les personnes ayant déjà été infectées par le SARS-CoV-2. » écrivent-ils.
Cette étude confirme qu' « espérer l'immunité collective grâce aux infections naturelles n'est pas possible et qu'un programme de vaccination globale est la solution » indiquent-ils.
Durée de l’immunité : questions en suspens
Les preuves du risque de réinfection étaient limitées avant cette étude. « On en sait peu sur la protection conférée par les infections répétées au SARS-CoV-2, mais deux études britanniques ont montré que l'immunité pouvait se maintenir pendant au moins 5 à 6 mois après l'infection », écrivent les auteurs.
Cette vaste étude confirme que l’infection initiale au SARS-CoV-2 confère une protection pour au moins six mois. Les chercheurs n'ont pas trouvé de différences significatives entre les gens qui ont été suivis entre 3 et 6 mois et ceux suivis pendant 7 mois ou plus.
La durée de la protection naturelle contre la réinfection demeure toutefois inconnue « parce que trop peu de temps s'est écoulé depuis le début de la pandémie » indiquent les chercheurs.
Cet article a été publié initialement publié sur medscape.com. Traduit par Marine Cygler.
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Citer cet article: COVID-19: 47% de réinfections chez les plus de 65 ans, dans une étude danoise - Medscape - 8 avr 2021.
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