Vincent Richeux

Auteurs et déclarations

24 mars 2021

Paris, France — L’année 2020 a été marquée par la validation par la Haute autorité de santé (HAS) d’une innovation majeure très attendue dans le traitement du diabète: l’insulinothérapie en boucle fermée, communément nommé « pancréas artificiel ». Alors que la prise en charge par l’assurance maladie du dispositif de la start-up française Diabeloop est actuellement en discussion, d’autres modèles basés sur l’intelligence artificielle devraient bientôt apparaitre sur le marché.

Lorsque les modalités de remboursement du « pancréas artificiel » de la société française Diabeloop (DBLG1) seront établies, « entre 6 000 et 7 000 sujets adultes » atteints de diabète de type 1 (DT1) vont pouvoir, dans un premier temps, en bénéficier, a indiqué le Pr Charles Thivolet (DIAB-eCARE, Hospices civils de Lyon), président de la Société francophone du diabète (SFD), lors d’une conférence de presse en ligne organisée en amont du congrès SFD 2021 [1].

Organisation spécifique et centres labellisés

Une organisation spécifique va être mise en œuvre au niveau national pour pouvoir équiper la population cible, qui pourrait être élargie dans un deuxième temps aux enfants et aux adolescents, a ajouté le diabétologue, qui a évoqué « un besoin en pédiatrie ». La mise en place du dispositif « ne se fera pas sur prescription », mais devra passer par des centres labellisés justifiant d’une expérience suffisante « pour garantir le succès de cette solution ».

Le Comité économique des produits de santé (CEPS), qui conduit actuellement les négociations sur le prix et le remboursement du dispositif, « est absolument convaincu » de son intérêt, a précisé le président de la SFD. « Tout est en ordre pour s’assurer que l’ensemble des diabétiques qui en ont besoin aient accès à cette innovation. » 

Le dispositif DBLG1 est un système de délivrance automatisée d’insuline en boucle fermée. En janvier 2020, il a reçu un avis favorable au remboursement de la commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDIMTS) de la HAS, qui a reconnu son intérêt clinique. Une première pour un dispositif médical s’appuyant sur l’intelligence artificielle.

Ce système de « pancréas artificiel » se compose d’une pompe à insuline, sous forme de patch à coller sur le bras, et d’un capteur de glycémie placé sur l’abdomen. La mesure de la glycémie est transmise toutes les cinq minutes, via bluetooth, à un algorithme contenu dans un smartphone. Celui-ci adapte les doses d’insuline administrées par la pompe, en fonction des divers paramètres renseignés par le patient (repas, activité physique…).

 

Meilleur contrôle glycémique

Dans son avis, le CNEDIMTS a considéré que le dispositif apporte un service attendu suffisant chez les diabétiques de type 1, « dont l’équilibre glycémique préalable est insuffisant (taux d’HbA1c ≥ 8%), en dépit d’une insulinothérapie intensive bien conduite par perfusion sous-cutanée continue (pompe externe) pendant plus de 6 mois et d’une autosurveillance glycémique pluriquotidienne (≥ 4/jours) ».

Cet avis s’est basé notamment sur les résultats de l’essai randomisé SP7, qui a comparé le système de Diabeloop au traitement conventionnel par pompe à insuline externe avec mesure continue du glucose (boucle ouverte) chez des patients diabétiques de type 1 [2]. Avec le système à boucle fermée, le temps passé dans la bonne cible glycémique (70-180 mg/dL) était augmenté en moyenne de 2,2 heures par jour par rapport à la boucle ouverte.

L'avis de la HAS a ouvert la voie aux négociations sur le prix et le remboursement du dispositif, par le biais du CEPS, qui n’a pas encore fixé les conditions de prise en charge du système de Diabeloop. Les discussions, « un peu compliquées », selon le Pr Thivolet, portent sur plusieurs postes de dépenses, dont l’abonnement à l’algorithme.

De son côté, la SFD s’est positionnée pour déterminer le profil des diabétiques potentiellement bons répondeurs avec ce type de dispositif. Si le DBLG1 est réservé pour le moment aux adultes, il est déjà envisagé d’élargir son utilisation aux enfants et aux adolescents, a précisé son président. La start-up française travaille sur une version adaptée aux enfants de 6 à 12 ans.

Des bénéfices en pédiatrie

Dans un récent document, la SFD recommande la mise en place de l’insulinothérapie en boucle fermée dans le traitement du DT1 « dès l’âge de 7 ans, chez les patients dont l’objectif glycémique n’est pas atteint et présentant une grande variabilité glycémique, avec des hyper et des hypoglycémies, induisant une altération de la qualité de vie », a rappelé le Pr Laurence Kessler (CHU de Strasbourg), lors de la conférence de presse.

Dans les essais cliniques, cette approche thérapeutique s’est avérée « très pertinente » chez l’enfant et l’adolescent, a précisé la diabétologue. Parmi les points positifs: les enfants équipés d’une boucle fermée « ont pu retrouver des nuits plus sereines » grâce à « un contrôle glycémique parfait ». Les parents, habituellement stressés par le risque d’hypoglycémie nocturne, n’ont plus à se lever pour vérifier leur niveau de glycémie.

D’autres dispositifs de boucle fermée semi-automatisé, sont actuellement en développement et pourraient faire leur entrée sur le marché français. Un dossier a notamment été déposé pour le système MiniMed 780G de Medtronic, qui a reçu un marquage CE.

Les recherches sur l’intelligence artificielle laissent également espérer une automatisation complète de l’injection d’insuline, ne nécessitant aucune intervention du patient.

 

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