France – Le 4 mars 2021, l’ANRS/Maladies infectieuses émergentes, agence autonome fondée au début de l’année et résultant du rapprochement de l’ANRS (Agence nationale de recherches sur le sida) et du consortium REACTing, a proposé un point presse offrant un tour d’horizon des traitements des formes symptomatiques de COVID-19. Le Pr Yazdan Yazdanpanah, son directeur, accompagné par le virologue Xavier de Lamballerie (Aix-Marseille Université), et les infectiologues Xavier Lescure (hôpital Bichat, Paris) et Guillaume Martin-Blondel (CHU Toulouse) ont abordé tour à tour les traitements antiviraux et immunomodulateurs.
Arrivée prochaine des anticorps antiviraux
Les tentatives de repositionnement des traitements antiviraux existants ont été jusqu’à présent infructueuses. Cependant, le molnupinavir oral, décrit comme efficace contre le MERS et le SARS-CoV, actuellement en cours de phase 2, semble offrir des résultats encourageants. Par ailleurs, plusieurs approches permettent d’envisager un blocage du virus : en premier lieu l’interféron bêta qui permet de restaurer la réponse naturelle des IFN qui est altérée chez une partie significative des patients atteints d’une forme grave de Covid-19. Initié précocement, l’IFN bêta offrirait des résultats cliniques intéressants. Par ailleurs, les anticorps antiviraux, qu’ils soient polyclonaux (hors plasma convalescent) ou monoclonaux ont été évoqués : les premiers étant en cours d’investigation clinique, les potentiels avancées sont à attendre plus volontiers du côté des seconds. Plusieurs font aujourd’hui l’objet d’études cliniques.
Polémique autour du bamlanivimab
La polémique croissante qui entoure le bamlanivimab a été évoquée, puisqu’une partie de la communauté scientifique s’étonne de l’autorisation temporaire d’utilisation de cohorte (ATUc) qui lui a été délivrée par l’ANSM en l’absence de preuve clinique de son efficacité. Les orateurs ont indiqué que deux études étaient pour l’heure disponibles et ont montré des résultats contrastés, avec une efficacité conditionnée à son association en bithérapie. Selon eux, cette ATU s’inscrit dans un cadre strict, réservée à des situations exceptionnelles, chez des patients « triés sur le volet » et qui seraient à haut risque de décès, suggérant une balance bénéfice-risque plus adaptée étant donné que la tolérance des anticorps monoclonaux est connue. Pour autant, de l’aveu même de ces orateurs, il y aurait plus à attendre de cocktails d’anticorps, car il existe un risque de mutation d’échappement si le traitement ne repose que sur un seul anticorps.
Avec l’arrivée attendue des premiers anticorps monoclonaux dans les toutes prochaines semaines, une cohorte baptisée COCOPREV va permettre de suivre l’ensemble des sujets à risque infectés et traités par l’un et/ou l’autre de ces anticorps (monothérapie ou cocktails) afin de prévenir une forme grave de la maladie. Elle permettra ainsi d’évaluer le taux d’hospitalisation, le risque d’émergence de résistance, la réponse immunitaire et la faisabilité d’une prophylaxie IV ambulatoire.
La mise à disposition de prophylaxies post-exposition voire de traitements préventifs reste encore hypothétique mais pourrait émerger si des traitements antiviraux offrent une bonne efficacité : la difficulté d’une telle approche tiendrait à leur initiation précoce dans les cinq premiers jours de symptômes chez des personnes à risque de forme grave.
En phase d'inflammation
Il y a plusieurs mois déjà, l'étude RECOVERY a montré que la dexaméthasone permet de réduire la mortalité associée au Covid-19. Mais cette démonstration flagrante a conduit à stopper la plupart des études consacrées aux corticoïdes, ce qui a rendu l’évidence clinique relative aux autres corticoïdes moins robuste, même si les données permettent d’en soutenir l’emploi, indépendamment de leur nature. Xavier Lescure a toutefois souligné que des questions restaient posées concernant l’optimisation de cette approche : si la posologie de dexaméthasone recommandée est de 6mg par jour, elle fait l’objet d’études d’optimisation en particulier chez les personnes obèses ou chez les patients en situation de syndrome de détresse respiratoire aiguë (étude COVIDICUS).
Parmi les immunomodulateurs plus spécifiques, le tocilizumab (anti-IL-6) a été le plus utilisé. Les données cliniques montrent la difficulté de timing associée à l’anticorps qui ne doit être initié ni trop tôt (avant que l’orage cytokinique se mette en place), ni trop tard (lorsque d’autres mécanismes immunitaires importants interviennent). Pour l’heure, les données suggèrent que le tocilizumab apporte un bénéfice clinique chez les patients qui n’ont répondu que partiellement aux corticoïdes.
Cet article a été initialement publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape.
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Citer cet article: Thérapeutiques anti-COVID-19 : état actuel et perspectives - Medscape - 9 mars 2021.
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