POINT DE VUE

Cancer colorectal métastatique MSI: l’immunothérapie bien supérieure au traitement standard

Dr Manuel Rodrigues

Auteurs et déclarations

15 mars 2021

COLLABORATION EDITORIALE

Medscape &

TRANSCRIPTION/ADAPTATION :

 

A l'occasion du mois de mobilisation contre le cancer colorectal "mars bleu", le Dr Manuel Rodrigues revient sur les dernières avancées dans le cancer colorectal métastatique MSI.

Paris, France— Bonjour et bienvenue sur le site de Medscape. Je suis le docteur Manuel Rodrigues, je suis oncologue médical à l’Institut Curie à Paris. Je vais vous parler aujourd’hui de cancer du côlon et plus particulièrement de cancer du côlon métastatique avec un déficit de la réparation de l’ADN, la réparation des mésappariements de l’ADN, qu’on appelle Mismach repair déficient (dMMR) ou microsatellites instables (MSI). Disons MSI pour la suite de la discussion.

Ces tumeurs, représentent à peu près 15 % des tumeurs, au diagnostic — elles sont moins fréquentes au stade métastatique, parce qu’elles sont habituellement d’un pronostic plus favorable.

On les diagnostique par deux moyens différents : d’une part une PCR qui va chercher cinq marqueurs de microsatellites, qui repérer s’ils sont instables — MSI — et en immunohistochimie en faisant quatre anticorps : PMS-2, MLH-1, MSH-2, MSH-6. Dans ce cas, on va regarder s’il y a un ou deux de ces anticorps qui sont éteints, ce qui est signe d’une inactivation d’un gène. On fait parfois moins de quatre anticorps, mais disons que si on veut être extensif, quatre anticorps, c’est ce qu’il y a de mieux avec la PCR pour les microsatellites.

Ces tumeurs dites microsatellites instables, MSI, sont des tumeurs qui vont accumuler énormément de mutations et, de ce fait, elles vont être plus sensibles à l’immunothérapie. Cela a été montré dans des essais cliniques et à tel point que cette information a permis d’obtenir une AMM aux États-Unis, par la FDA, pour les tumeurs MSI, quelle qu’en soit l’origine, quand elles sont en énième ligne de traitement métastatique. Nous ne disposons pas de cette AMM, en Europe, ni du remboursement.

L’étude Keynote 177

Au stade métastatique première ligne, dans la prise en charge des patients qui ont des cancers de côlon, on va faire du FOLFIRI ou du FOLFOX, éventuellement associés à du bévacizumab ou du cétuximab, en fonction du statut EGFR, par exemple.

La question est de se dire « est-ce qu’il s’agit du meilleur traitement pour les patients avec des tumeurs MSI ou est-ce qu’on peut leur proposer une immunothérapie avec un anti PD-1 administré seul ? », le pembrolizumab, dans ce cas. Une étude française, publiée fin 2020 dans le NEJM a répondu à cette question[1].

Les résultats sont très nets : le pembrolizumab administré maximum pendant deux ans dans cette étude a apporté un bénéfice très net en survie sans progression, puisqu’on passe d’une médiane de survie sans progression de 8,2 à 16,5 mois. Mais également en taux de réponse, puisqu’avec suffisamment de recul, le taux de réponse passe de 35 % dans le bras chimiothérapie à 83 % dans le bras pembrolizumab, ce qui est très notable.

On remarque, d’ailleurs, que concernant les courbes de survie sans progression, la courbe chute plus vite pour les patients sous immunothérapie, comme si les patients qui devaient progresser, qui devaient résister à l’immunothérapie, progressaient vite et, qu’ensuite, on voyait le bénéfice apparaître chez les autres.

En plus, ce bénéfice très net en réponse et en survie sans progression ne s’est pas traduit par une augmentation des effets secondaires. Bien au contraire, les effets secondaires ont diminué, puisqu’on et passé de 78 % de toxicité grade 3-4 avec la chimiothérapie à 56 % dans le bras avec de l’immunothérapie seule.

Ce sont des résultats très enthousiasmants. On espère avoir rapidement accès à l’immunothérapie chez ces patients en première ligne métastatique puisqu’elle devient clairement le standard avec un bénéfice en termes d’efficacité, mais également en termes de tolérance, ce qui est très important.

 
On espère avoir rapidement accès à l’immunothérapie chez ces patients en première ligne métastatique.
 

Des questions en suspens

À l’avenir, restera à savoir comment on peut augmenter l’efficacité de cette immunothérapie. Est-ce qu’il faudra associer différentes immunothérapies  ? Est-ce qu’il faudra associer les deux, la chimiothérapie avec l’immunothérapie, justement pour rattraper ces patients chez qui l’immunothérapie seule ne suffit pas au tout début, comme on a pu le faire pour des patients atteints de cancer du poumon, en l’occurrence ? Est-ce qu’on va basculer en phase adjuvante pour des patients avec des tumeurs MSI qu’on opère ? Ce sont des questions qui s’ouvrent à nous.

Mais en tout cas, c’est enthousiasmant pour ces patients, puisque ces dernières années il y a eu moins d’innovations dans le cancer colorectal.

A bientôt sur le site de Medscape.

 

Voir tous les blogs du Dr Rodrigues ici.

 

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