Priorisation de la vaccination : la HAS élargit la liste des pathologies à haut risque

Stéphanie Lavaud

Auteurs et déclarations

3 mars 2021

France Dans l’optique d’accélérer la vaccination contre le Covid-19 des personnes les plus vulnérables, la Haute Autorité de Santé (HAS) actualise ses recommandations relatives aux facteurs de risque de développer une forme grave de la maladie et dont la présence doit faire prioriser la vaccination quel que soit l’âge.

Par rapport à son avis du 30 novembre dernier, elle ajoute donc quatre comorbidités à haut risque de décès nouvellement identifiées, dont les troubles psychiatriques, et insiste sur trois pathologies déjà connues mais qui rendent les patients particulièrement vulnérables, dont la trisomie 21.

Toutes doivent inciter le médecin à vacciner en priorité, ainsi que toutes pathologies (affections préexistantes rares et graves ou des handicaps graves) dont le médecin jugerait qu’elle met son patient particulièrement à risque.

Par ailleurs, la HAS préconise de diversifier le profil des prescripteurs et des vaccinateurs et recommande, à ce titre, l’extension des compétences vaccinales aux pharmaciens, sages-femmes et infirmiers y compris aux vaccins à ARNm – ce qui n’était pas encore le cas.

L’âge, facteur de risque prédominant

Depuis le départ, la France a fait le choix de vacciner en priorité les personnes les plus à risque de faire une forme grave de Covid-19 et les professionnels de santé pour préserver les capacités de notre système de santé. « La France est en tête pour la vaccination des patients les plus exposés aux formes graves », s’est targué le premier ministre lors de la dernière allocution. « Plus du quart des personnes de plus de 75 ans a été vacciné » a-t-il ajouté.

Et, en effet, parmi les facteurs de risque, « l’âge apparait comme le facteur de risque majeur de faire une forme grave, d’hospitalisation et de décès » a rappelé le Pr Dominique le Guludec, présidente de la HAS.

En se fondant sur l’analyse des données issues des séjours hospitaliers en France, il apparait ainsi que, comparativement aux 18 à 49 ans :

  • les 50 à 64 ans atteints de Covid-19 ont 3 fois plus de risque de décéder du Covid-19,

  • les 65 à 74 ans : 7 fois plus de risque,

  • les 75 à 80 ans : 10 fois plus de risque,

  • les plus de 80 ans : 16 fois plus.

4 nouvelles pathologies qui doivent faire prioriser la vaccination

Si l’âge joue un rôle majeur, la présence de certaines comorbidités est également un facteur de risque de formes graves et de décès, même si leur impact est moindre. Aujourd’hui, l’analyse de nouvelles études – près de 200 – relatives aux facteurs de risque de développer une forme grave de la maladie fait apparaitre de nouveaux facteurs de vulnérabilité dans la survenue de formes sévères et de décès liés au Covid-19.

En complément des comorbidités à haut risque de décès, déjà mentionnées dans son avis du 30 novembre dernier*, la HAS ajoute donc les quatre suivantes :

  • les maladies hépatiques chroniques et en particulier la cirrhose ;

  • la démence ;

  • les personnes présentant un antécédent d’accident vasculaire cérébral ;

  • et les troubles psychiatriques « qui recouvrent les psychoses telles que la schizophrénie, les troubles bipolaires, de même que la dépression majeure » a précisé le Pr Elisabeth Bouvet, présidente de la commission technique des vaccinations.

* Diabète (de type 1 et 2), obésité, cancers, en particulier s’il s’agit d’un cancer récent et/ou en progression et/ou sous chimiothérapie, BPCO, insuffisance respiratoire, insuffisance cardiaque et hypertension artérielle compliquée

3 pathologies à très haut risque de décès

Par ailleurs, parmi les comorbidités déjà identifiées dans son avis du 30 novembre dernier*, la HAS insiste sur 3 pathologies qui sont apparues dans les dernières études comme à très haut risque de décès, et justifiant une priorisation quel que soit l’âge. Ce sont des personnes ayant reçu une transplantation d’organe, des insuffisants rénaux dialysés et des personnes atteintes de trisomie 21. Dans ce dernier cas, « un système immunitaire dysfonctionnel, la présence de comorbidités et la difficulté à faire respecter les gestes barrières sont autant de facteurs qui peuvent expliquer la vulnérabilité » a précisé le Pr Daniel Floret, vice-président de la Commission Technique des Vaccinations.

La HAS rappelle, par ailleurs, qu’au-delà de toutes les situations particulières identifiées comme à risque de formes graves, le médecin est à même d’estimer quels sont, parmi ses patients, ceux qui lui semblent particulièrement vulnérables et doivent être également priorisées indépendamment de leur âge. Il peut s’agir, par exemple, de personnes présentant des affections préexistantes rares et graves ou des handicaps graves les prédisposant à un risque particulièrement accru de décéder de l’infection par le SARS-CoV-2 (déficits immunitaires sévères, hémopathies malignes, maladies rares).

Enfin, autres personnes à vacciner en priorité : les personnes polypathologiques. En effet, « les études montrent que le cumul de trois comorbidités fait atteindre quasiment le même niveau de risque de décéder que dans la tranche d’âge supérieure sans polypathologies » a exposé le Pr Bouvet.

Sages-femmes et pharmaciens vont pouvoir vacciner

Un des leviers pour accélérer la vaccination consiste à simplifier l’accès à la vaccination en multipliant les lieux de vaccination et en diversifiant les vaccinateurs. Ainsi, la HAS recommande d’une part que la prescription et la vaccination avec le vaccin AstraZeneca (moins contraignant en termes de stockage) puisse être faite :

  • par les pharmaciens, sauf chez les femmes enceintes, et les personnes présentant un trouble de l’hémostase (les personnes sous traitement anti-coagulant ne sont pas concernées par cette restriction).

  • par les sages-femmes chez la femme, en particulier la femme enceinte, et dans l’entourage de celle-ci et de son enfant.

A ce stade de la campagne vaccinale, compte tenu d’une disponibilité encore limitée des vaccins contre le Covid-19 (et en attendant la publication du décret le permettant), la HAS recommande que la vaccination par les pharmaciens se fasse dans un second temps et de « favoriser la vaccination par les médecins afin de continuer à prioriser la vaccination des personnes les plus à risque de formes sévères » a considéré le Pr Le Guludec.

D’autre part, la HAS préconise que l’administration des vaccins à ARNm (comme ceux de Moderna et Pfizer) comme ceux à vecteur viral (celui d’AstraZeneca, pour le moment) puisse être réalisée par les infirmiers, les sages-femmes et par les pharmaciens (ces derniers devant être formés et avoir déclaré une activité de vaccination auprès de leur ARS). Les contraintes de stockage des vaccins ARNm – qui constituaient jusqu’à présent un obstacle à la vaccination par ces professionnels de santé – devraient s’alléger dans les semaines à venir « grâce à la mise au point par les laboratoires de vaccins plus stables » a précisé la présidente de la HAS.

Enfin, pour lutter contre les inégalités d’accès à la vaccination des personnes très âgées, ne pouvant se déplacer, précaires ou défavorisées, la HAS recommande des dispositifs permettant d’aller vers…notamment en favorisant le déploiement d’équipes mobiles.

 

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