COVID-19 : 7 maladies chroniques particulièrement à risque de forme grave

Fanny Le Brun, avec Aude Lecrubier

15 février 2021

France — Une étude réalisée à partir du Système National des Données de Santé (SNDS) a permis une analyse quasi-exhaustive des données de la population française afin d’identifier les maladies chroniques et les facteurs (âge, genre…) susceptibles de représenter un surrisque d’hospitalisation ou de décès en cas de Covid-19 [1].

Cette analyse a été faite sur la première vague de l’épidémie, du 15 février au 15 juin 2020, pendant laquelle un peu plus de 87.800 personnes ont été hospitalisées pour Covid-19, dont 15 660 en sont décédées à l’hôpital.

Elle a été réalisée par le Groupement d’intérêt scientifique (GIS) EPI-PHARE de l’ANSM-CNAM.

L’âge : 1er facteur de risque

Les résultats de cette étude confirment que les personnes âgées sont de loin les plus fragiles face à l’infection par le SARS-CoV-2 : les risques d’hospitalisation et de décès augmentent de façon exponentielle avec l’âge. Ainsi, par rapport aux sujets âgés de 40-44 ans, le risque d’hospitalisation est multiplié par :

  • Deux chez les 60-64 ans,

  • Trois chez les 70-74 ans,

  • Six chez les 80-84 ans,

  • Douze chez les 90 ans et plus.

Et le risque de décès est multiplié par :

  • Douze chez les 60-64 ans,

  • Trente chez les 70-74 ans,

  • Cent chez les 80-84 ans,

  • Presque trois cents chez les 90 ans et plus.

Les hommes plus à risque

Cette étude confirme une influence du genre, les hommes ayant un risque d’hospitalisation pour Covid-19 multiplié par 1,4 et de décès par 2,1 par rapport aux femmes.

Sept maladies chroniques les plus à risque

L’impact potentiel de 47 maladies chroniques sur l’évolution du Covid-19 a été étudié. Il ressort des résultats de cette analyse que :

  • La quasi-totalité des affections chroniques est associée à des risques accrus d'hospitalisation et de décès pour Covid-19, à l'exception de la dyslipidémie qui semble plutôt protectrice. « peut-être en raison de la propriété antiinflammatoire des statines », suggèrent les épidémiologistes.

  • Sept pathologies ont été identifiées comme étant les plus à risque :

o   Trisomie 21 : 7 fois plus de risque d’hospitalisation et 23 fois plus de risque de décès,

o   Retard mental : 4 fois plus de risque d’hospitalisation et 7 fois plus de risque de décès,

o   Mucoviscidose : 4 fois plus de risque d’hospitalisation et 6 fois plus de risque de décès,

« Pour la 1ère fois à notre connaissance, nous avons pu spécifiquement identifier la mucoviscidose associée à un risque 6 fois plus élevé de décès en milieu hospitalier », indiquent les chercheurs.

o   Insuffisance rénale chronique terminale sous dialyse : 4 fois plus de risque d’hospitalisation et 5 fois plus de risque de décès,

o   Cancer actif du poumon : 3 fois plus de risque d’hospitalisation et 4 fois plus de risque de décès,

o   Transplantation rénale : 5 fois plus de risque d’hospitalisation et 7 fois plus de risque de décès,

o   Transplantation pulmonaire : 3 fois plus de risque d’hospitalisation et 6 fois plus de risque de décès.

Un risque de décès doublé chez les plus défavorisés

Cette étude montre également que, chez les personnes de moins de 80 ans, il existe un lien fort entre l’indice de défavorisation et le risque de formes graves de Covid-19, avec notamment un risque de décès multiplié par deux chez les plus défavorisés par rapport aux plus favorisés.

« Nous avons identifié un surrisque chez les patients les plus défavorisés après ajustement multivarié, suggérant comme dans l’étude de Williamson et coll.[2] que d’autres facteurs sociaux (logement, nombre de membres du foyer familial, transport, profession,..) que les éléments médicaux pourraient également jouer un rôle dans le développement d’une forme sévère de Covid-19 » , indiquent les auteurs.

Précisions sur l’obésité, le diabète et les autres maladies à risque...

L’obésité, facteur de risque important de développement d’une forme sévère de la maladie [3], ne ressort pas dans l’étude [3]. Pour les chercheurs, l’explication est la suivante : dans l’analyse, n’ont été prises en compte « que les formes les plus sévères nécessitant une hospitalisation ou le recours à la chirurgie bariatrique », l’indice de masse corporelle (IMC) n’étant pas renseigné dans la base de données. Les données ne sont donc pas « interprétables ».

Concernant le diabète, une estimation de 1,8 est mise en évidence dans l’étude, similaire à celle de Williamson et coll.[2].

En revanche, le risque associé au traitement de l’hypertension est plus faible que celui retrouvé dans la littérature. Peut être en raison de ajustements sur des facteurs intermédiaires ou des traitements anti-hypertenseurs IEC ou ARA2, supputent les épidémiologistes.

Pour les maladies cardiovasculaires, le risque d’hospitalisation et de décès est plus élevé, notamment chez les patients insuffisants cardiaques (HR 1,44 et 1.54 respectivement).

Du côté des maladies respiratoires chroniques (hors mucoviscidose), le risque accru associé trouvé semble cohérent avec la littérature.

De même, les patients atteints de cancer actif sont plus à risque de décès que ceux en rémission.

Aussi, les maladies psychiatriques et neurodégénératives sont identifiées comme à risque plus élevé d’hospitalisation pour Covid-19 et de décès en milieu hospitalier. « Les troubles psychotiques et la démence étaient 2 fois plus à risque de décès en milieu hospitalier, « risque dans la tranche basse des estimations actuelles » [2]. « Il est cependant difficile d’expliquer ce surrisque observé », précisent les chercheurs.

Enfin, un résultat plus mitigé est observé chez les patients tabagiques dans cette étude.

« Cette étude vise à permettre aux patients et aux professionnels de santé d’acquérir une meilleure connaissance des pathologies chroniques qui rendraient les patients plus vulnérables au développement d’une forme sévère de Covid-19 et ainsi à optimiser leur prise en charge. Elle met également en lumière pour les autorités de santé les populations pouvant être des cibles prioritaires des campagnes de vaccination », conclut le Groupement d’intérêt scientifique.

 

 

Cet article a été initialement publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape. Complété par Aude Lecrubier

 

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