France — Alors que le gouvernement fait évoluer sa stratégie concernant les étapes successives de vaccination pour y inclure les soignants, ceux-ci sont-ils prêts à recevoir le vaccin anti-Covid ? Pour le savoir, nous avons réalisé un sondage mi-décembre auprès de lecteurs de Medscape édition Française auquel vous avez d’ailleurs peut-être participé. Il en ressort que les médecins sont majoritairement prêts à se faire vacciner, tandis que le monde infirmier semble lui plutôt réticent. D’une façon générale, les soignants qui disent ne pas vouloir se faire vacciner ne sont pas opposés par principe à la vaccination mais attendent de disposer de plus d’informations pour prendre leur décision. Infectiologue à l’hôpital Tenon, le Pr Gilles Pialoux a commenté ces résultats.
61% des médecins envisagent de se faire vacciner
Invités par mail entre le 11 décembre et le 4 janvier, vous avez été près de 2850 inscrits sur le site à répondre à un court questionnaire (7 items), dont 1039 médecins excerçant en France. A la question « Envisagez-vous de vous faire vacciner contre le SARS-CoV-2 dès lors que vous y serez autorisé en France ? », 61% des médecins français ont répondu affirmativement, 26% ont dit ne pas vouloir se faire vacciner et 13% ne savent pas encore.
Les chiffres sont globalement les mêmes pour les pharmaciens qui sont 62% à vouloir se faire vacciner (sur 106 répondants au total), alors que les étudiants en médecine sont 56% à affirmer vouloir se faire vacciner (sur 130 réponses au total). Cette volonté de se faire vacciner est en revanche bien moindre chez les soignants non médecins. Les lecteurs de Medscape qui se sont définis comme professionnels de santé (soit 287 personnes autres que médecin, pharmacien et infirmier.e) sont 43% à être d’accord pour recevoir le vaccin anti-Covid. Bien que le nombre de répondants soit limité, il semble que ce soit véritablement du côté du monde infirmier (169 répondants) que les réticences sont les plus fortes avec 55% de refus pour 31% d’acceptation du vaccin. Pour Gilles Pialoux, « c'est traditionnel cette défiance chez les infirmièr.e.s (IDE) et les aide-soignant.e.s. [...] Le message de la nosocomialité n'est pas passé [...] Aussi, le Covid reste une maladie de vieux selon les soignant.e.s ». Selon l’infectiologue, « les polémiques autour des vaccins (HPV et Gillain Barré, Hépatite B et SEP) ont laissé des traces, malgré les preuves contraires ». Il reconnait néanmoins que « le message sur le risque moindre de formes graves est bien passé, que ce soit pour la grippe comme le Covid . »
En attente d’informations
Voici dans le détail les résultats obtenus chez les médecins – la catégorie la plus représentée dans ce sondage en nombre de répondants. Ceux qui ont répondu NON, à la question «Envisagez-vous de vous faire vacciner contre le SARS-CoV-2 », se sont vu proposer plusieurs raisons pour expliquer leur choix? On constate que la première raison évoquée par ceux qui ne souhaitent pas se faire vacciner ou hésitent encore à le faire est qu’ils préfèrent attendre et disposer de plus d’informations (26% des médecins). Ils sont ensuite 20% à exprimer des doutes sur la sécurité des vaccins anti-SARS-CoV-2, et 14% à douter de leur efficacité. La proportion de ceux qui remettent en cause l’intérêt même de la vaccination en général est faible (3%), tandis que 2% disent présenter des contre-indications (grossesse, allergie, immuno-déprimés*).
*A noter : les vaccins de Pfizer/BioNTech et de Moderna ne sont pas contre-indiqués chez les immuno-déprimés.
A la question « Redoutez-vous les effets secondaires des vaccins à ARNm? », c’est-à-dire ceux utilisant une technologie inédite comme ceux de Pfizer-BioNTech et de Moderna, 24% des médecins interrogés ont répondu par l’affirmative tandis que 37% se montrent confiants. Néanmoins, là encore, 39% ont jugé qu’ils n’avaient pas assez d’informations pour se faire un avis.
La même question posée pour les vaccins à adénovirus inactivé , à l’instar de celui développé par AstraZeneca-Oxford utilisant une plateforme plus classique, entraine logiquement des réponses légèrement différentes. Les médecins ne sont plus que 14% à redouter des effets secondaires, et 48% ne les craignent pas. Pour autant, 38% considèrent là encore ne pas disposer d’informations suffisantes pour se faire un avis.
Lors de ses vœux vendredi 8 janvier, le président du Conseil de l’Ordre des Médecins, le Dr Patrick Bouet a appelé les médecins à se faire vacciner et à promouvoir la vaccination contre le Covid. « Non seulement les médecins doivent se faire vacciner, mais ils doivent le faire savoir. Plus un grand nombre d'entre nous sera immunisé, plus on enclenchera la roue de la confiance [...] notre responsabilité, individuelle et collective, est de nous engager, pleinement, dans la campagne de vaccination. Le gouvernement doit rapidement nous en donner les moyens », a indiqué le médecine généraliste au Parisien . En parallèle, plusieurs médecins de renom se sont déjà exprimés dans la presse pour inciter les professionnels de santé à montrer l’exemple. « L’exemplarité des professionnels est cruciale pour l’adhésion des patients à la vaccination anti-Covid ». Il s’agit « d’un levier reconnu pour l’efficacité d’un programme de vaccination », ont indiqué 4 spécialistes dont le Pr Gilles Pialoux dans une tribune du Monde le 15 décembre dernier. AL
Pas obligatoire
Faut-il rendre le vaccin obligatoire ? Sur ce point, 56% des médecins répondent par la négative, 32% considèrent cependant qu’il devrait l’être pour les professionnels de santé et autres professions en contact étroit avec des personnes à risque. Seul 11% estiment qu’il devrait être obligatoire pour tous.
Pour autant, les médecins sont 39% à penser qu’il faudrait exiger une preuve de vaccination contre le SARS-CoV-2 lorsque les personnes voyageront.
Si l’on regarde les résultats par spécialité, deux tiers des pédiatres qui ont répondu au questionnaire envisagent de se faire vacciner, suivi des anesthésistes-réanimateurs et des cardiologues. Un peu plus de la moitié des urgentistes et des médecins généralistes sont eux aussi favorables au vaccin, les psychiatres se montrent en revanche très réservés.
Mais les chiffres sont amenés à évoluer dans les semaines qui viennent.
« A Tenon, depuis 48 heures, on croule sous les demandes (de vaccination) – avec certes plus de médecins de ville et de l'hôpital que d'IDE, témoigne le Pr Pialoux, qui dénonce « des critères (pour se faire vacciner) qui sont encore scandaleusement restreints par les recommandations inadaptées de la Haute Autorité de Santé (HAS) concernant les soignants ».
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Citer cet article: Sondage Medscape : 61% des médecins prêts à se faire vacciner contre le COVID-19 - Medscape - 8 janv 2021.
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