Paris, France—Une semaine après sa prise de parole sur l’organisation d’un déconfinement progressif en France, le Premier ministre Jean Castex a tenu un nouveau point presse le 3 décembre pour présenter la stratégie vaccinale contre le coronavirus.
« La situation sanitaire s’améliore. La circulation du virus continue de reculer et le nombre de cas positifs diminue. Hier, il y avait 3488 personnes hospitalisées en réanimation », a-t-il détaillé. Néanmoins « la situation reste fragile et la circulation du virus reste supérieure à ce qu’elle était en mai dernier. Nous ne sommes pas encore venus à bout de ce virus », a-t-il mis en garde. Ainsi, le confinement va encore durer deux semaines avant le passage à un régime de couvre-feu à partir du 15 décembre, sauf pour les réveillons du 24 et du 31 décembre. Dès aujourd’hui, 4 décembre, les lieux de culte pourront accueillir les fidèles avec la règle d’un siège sur trois occupés et une rangée sur deux.
Concernant les fêtes de fin d’année, le Premier ministre a conseillé de limiter les rassemblements à 6 personnes adultes, sans compter les enfants et a rappelé l’importance de respecter les gestes barrières. « Nous devons être ensemble attentifs et solidaires pour écarter le risque d’un reconfinement après les fêtes de fin d’année », a-t-il insisté.
200 millions de doses de vaccins
Jean Castex a par ailleurs longuement détaillé la stratégie vaccinale de la France. « La vaccination est une arme supplémentaire à notre disposition qui va nous permettre de mieux nous protéger », a-t-il souligné, indiquant que les premières autorisations de mise sur le marché devraient intervenir d’ici la fin de l’année. « Nous avons signé six contrats d’approvisionnement au niveau européen. La France disposera d’un potentiel de 200 millions de doses, nous permettant de vacciner 100 millions de personnes. C’est plus que nos besoins mais un taux de perte devra être pris en compte », a-t-il détaillé. Le gouvernement a d’ores et déjà budgété 1,5 milliard d’euros pour les vaccins dans le budget de la Sécurité sociale pour 2021.
Concernant la population qui pourra en bénéficier, il a rappelé que l’objectif serait de « vacciner en priorité les personnes pour lesquels la Covid-19 est la plus dangereuse. Tout le monde ne pourra pas se faire vacciner immédiatement », a-t-il prévenu.
La Haute autorité de santé (HAS) recommande de vacciner d’abord les personnes âgées en établissements et les personnels de ces établissements ayant des risques accrus de formes graves. « Cela correspond à environ un million de personnes et coïncide avec les quantités de vaccins livrées le premier mois », a expliqué Jean Castex. Cette première phase pourrait commencer dès janvier 2021. Puis, 14 millions de personnes présentant un facteur de risque lié à l’âge ou une pathologie chronique pourraient être à leur tour vaccinées de février au printemps. « Nous ouvrirons progressivement à partir du printemps la vaccination à l’ensemble de la population », a ajouté le Premier ministre. Pour lui, le rôle de l’État se situe à quatre niveaux : vérifier que chaque vaccin ait reçu toutes les autorisations nécessaires, garantir que les vaccins arrivent rapidement avec une logistique adaptée, mobiliser l’ensemble des professionnels de santé et construire une stratégie vaccinale qui réponde à trois impératifs : sécurité, transparence, proximité. Il indique ainsi que les vaccins mis sur le marché bénéficieront d’un dispositif renforcé de pharmacovigilance mis en place par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
Le médecin généraliste au cœur du dispositif
Au sujet de la transparence, il assure que le projet de campagne vaccinale sera présenté au Parlement au cours du mois de décembre et que le Conseil économique, social et environnemental a été saisi de cette question. Concernant la proximité, il souhaite que le médecin généraliste soit au cœur du dispositif, en particulier le médecin traitant. « Chacun doit pouvoir se faire vacciner par un professionnel de santé en qui il a confiance », a estimé Jean Castex.
Un nouvel organe, le conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, verra le jour, présidé par l’infectiologue Alain Fischer. Ce dernier a appelé à la prudence au sujet des vaccins, rappelant que « pour l’instant, nous ne disposons que de communiqués de presse de la part des industriels. Nous attendons des publications scientifiques », a-t-il souligné, notant au passage que « les données ne sont pas complètes sur l’efficacité des vaccins sur les personnes les plus fragiles » et que « le recul ne dépasse pas deux à trois mois ». Cependant, pour lui, « il ne faut pas trop craindre que, du fait de l’accélération de la recherche, on commence à vacciner des personnes sans que toutes les précautions aient été prises. C’est le rôle des agences sanitaires » d’y veiller, a-t-il rappelé. « Pour que cette vaccination soit efficace il faut établir la confiance. Cela implique les professionnels de santé, la société civile et les scientifiques, y compris des sciences humaines et sociales », a-t-il conclu.
Consultation en amont de la vaccination
Olivier Véran, le ministre de la Santé, a pour sa part estimé que le vaccin représentait « un formidable espoir » et « pourrait être une arme décisive pour vaincre le virus ». Néanmoins, a-t-il mis en garde, « il faut rester prudent : au cours des prochains mois, le vaccin ne changera pas le cours de l’épidémie ». Il a souligné que trois principes seraient respectés : « libre choix du patient, gratuité du vaccin, sécurité de la vaccination ». « La peur du vaccin n’arrêtera pas le virus », a-t-il insisté.
Rappelant que le vaccin Pfizer/Biontech devait être stocké à -80°C, il a annoncé que des supercongélateurs avaient été commandés. « Il y aura deux circuits d’approvisionnement complémentaires : un pour les Ehpad et un qui s’appuiera sur une centaine d’établissements hospitaliers », a-t-il détaillé.
Les personnes prioritaires se verront proposer une consultation en amont de la vaccination pour vérifier leur état de santé et recueillir leur consentement. En Ehpad, les familles seront étroitement associées à cette démarche. Puis les injections du vaccin seront réalisées : le vaccin Pfizer/Biontech nécessite deux injections à 21 jours d’écart. « Ensuite, un suivi médical sera prévu dans la durée », a indiqué le ministre de la Santé.
« Les recommandations de la HAS seront actualisées en fonction de chaque vaccin. Nous ajusterons notre approche au fur et à mesure de la progression de nos connaissances », a-t-il détaillé. « Aujourd’hui, avant même de nous immuniser contre le coronavirus, nous devons nous immuniser contre les peurs. Je m’engage à ce que nous fassions preuve de la transparence la plus totale », a promis Olivier Véran.
« L’arrivée du vaccin fera appel à notre sens des responsabilités et de la solidarité. Se faire vacciner c’est se protéger et protéger les autres », a repris Jean Castex.
« Une nouvelle étape va s’ouvrir, qui ne marquera pas la fin de l’épidémie », a-t-il cependant mis en garde. La campagne de vaccination va s’étaler sur plusieurs mois. Pendant ce temps, la stratégie « Tester, Tracer, Isoler » restera d’actualité, avec quelques évolutions importantes prochainement, en particulier des opérations de dépistage massif dans trois grandes agglomérations, l’enrichissement de l’application TousAntiCovid, ou encore un accompagnement renforcé pour l’isolement des cas.
Chiffres clés en France de Santé publique France, semaine 48 :
Nombre de nouveaux cas confirmés de COVID-19 par tests RT-PCR et antigéniques (SI-DEP et ContactCovid) : 75 096 (-34%)
Taux de positivité (%) pour SARS-CoV-2 (RT-PCR seules, Si-DEP) : 10,7% (-2,3 points)
Nombre d’actes SOS Médecins pour suspicion de COVID-19 : 2394 (-20%)
Nombre de passages aux urgences pour suspicion de COVID-19 (réseau OSCOUR®) : 5374 (-29%)
Nombre de nouvelles hospitalisations de patients COVID-19 (SI-VIC) : 9382 (-31%)
Nombre de nouvelles admissions en réanimation de patients COVID-19 (SI-VIC) : 1391 (-33%)
Nombre de décès liés à la COVID-19 (incluant les décès en hospitalisation et décès en EHPA et autres EMS) : 2928 (-25%)
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Citer cet article: Campagne vaccinale contre la COVID-19 : qui, quand, comment? - Medscape - 4 déc 2020.
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