Cancer du poumon: la protonthérapie réduit l'impact CV

Susan London

23 novembre 2020

Virtuel – Opter pour la protonthérapie plutôt que la radiothérapie conventionnelle dans le traitement du cancer du poumon réduit quasiment de moitié la dose de radiation reçue par le cœur et le risque d'accidents CV dans les années qui suivent. C'est ce que révèle une étude de cohorte dont les résultats ont été présentés lors du congrès annuel de l'American Society for Radiation Oncology (ASTRO 2020) [1].

« La dose reçue par le cœur est corrélée aux effets indésirables CV qui suivent une radiothérapie. La protonthérapie fait partie des stratégies pour réduire cette dose » explique le principal investigateur, le Dr Timothy Kegelman (University of Pennsylvania, Philadelphie, Etats-Unis), qui rappelle que les patients avec un cancer du poumon ont souvent des facteurs de risque cardiovasculaires.

Lui et ses collègues ont conduit une étude rétrospective avec des patients souffrant d'un cancer du poumon non à petites cellules localement avancé. Les participants avaient été traités par chimiothérapie plus radiothérapie conventionnelle (104 patients) ou bien avec chimiothérapie plus protonthérapie (98 patients).

Les investigateurs ont étudié l'incidence de six accidents cardiovasculaires : l'infarctus du myocarde, la fibrillation atriale, la maladie coronaire, l'insuffisance cardiaque, l'AVC et l'accident ischémique transitoire. Les patients ayant eu précédemment un accident CV n'étaient pas considérés comme une population à risque pour cet accident spécifique après la radiothérapie.

La cohorte « protonthérapie » était plus âgée, plus fumeuse et la prévalence des événements cardiovasculaires antérieurs au traitement contre le cancer était plus élevée que dans l'autre groupe (46,9% vs 31% ; P=0,03).

La dose médiane totale était identique pour les deux groupes (66,6 Gy), mais le groupe « protonthérapie » avait reçu des doses significativement moindres au niveau du cœur (6,9 vs 13,3 Gy).

Incidences de l'infarctus, AVC et AIT diminuées

Après un suivi médian de 29 mois, l'incidence des accidents ischémiques transitoires (AIT) était significativement moins élevée dans le groupe « protonthérapie », en comparaison avec le groupe « radiothérapie conventionnelle » (1,1% vs 8,2% ; P=0,04). Même constatation pour les incidences de l'infarctus du myocarde (2,3% vs 9% ; P=0,06) et de l'AVC (3,2% vs 6,1% ; P=0,5).

L'incidence des événements cardiovasculaires totaux était similaire dans les groupes « protonthérapie » et « radiothérapie conventionnelle » (53,1% vs 47,1%; P=0,48). De même, le taux de survie à trois ans était le même dans les deux groupes (38,8% vs 42,1% ; P=0,99).

« Nos études futures auront pour but d'examiner les relations potentielles entre la gravité de l'événement cardiaque, le type de radiothérapie et la dose délivrée aux structures cardiaques » commente le Dr Kegelman. Son centre de recherche participe à l'essai clinique de phase III RTOG 1308  qui compare la radiothérapie conventionnelle à la protonthérapie chez des patients atteints d'un cancer du poumon inopérable. Cet essai, qui devrait s'achever fin 2025, permettra de mieux évaluer la morbidité et la mortalité cardiaque.

Un nombre croissant de preuves

« Cette étude s'ajoute à un nombre croissant de preuves sur l'importance potentielle de la dose reçue par le cœur quelle que soit la modalité de radiothérapie » indique le Dr Daniel Gomez (Memorial Sloan Kettering Cancer Center, New York). L'essai RTOG 0617 et l'essai Lung ART ont mis en évidence des corrélations entre des doses moindres de radiation au niveau du cœur et une meilleure survie chez les patients atteints d'un cancer du poumon, rappelle-t-il.

« Il est maintenant bien établi que les protons diminuent la dose reçue par le cœur. On suppose donc qu'ils améliorent du coup le devenir des patients, mais les mécanismes précis ne sont pas clairs » poursuit-il.

La protonthérapie a eu de bons résultats dans un essai clinique de phase II avec un seul bras chez des patients atteints d'un cancer du poumon non à petites cellules. « La phase III, randomisée, qui est en cours utilise une protonthérapie plus moderne et a inclus plus de participants. Ce sera bien plus informatif » prédit le Dr Gomez.

 

Cette étude n'a pas fait l'objet d'un financement spécifique. Le Dr Kegelman n'a pas rapporté de conflit d'intérêt. Le Dr Gomez a indiqué recevoir des honoraires de Varian.

 

L’article a été publié initialement sous le titre Lung Cancer: Proton Beam Likely Reduces Cardiovascular Events sur MDedge, groupe Medscape. Traduit/adapté par Marine Cygler.

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