Bactéries résistantes en temps de COVID, une menace pour les soins intensifs

Caroline Vrancken

Auteurs et déclarations

28 octobre 2020

Virtuel — La première vague d’infections par le SRAS-CoV-2 a littéralement submergé la capacité des unités de soins intensifs (USI), ce qui a conduit à l’aménagement d’espaces supplémentaires et à la mobilisation de personnel venant d’autres unités. De plus, une utilisation accrue d'antibiotiques et d'agents immunosuppresseurs (par exemple, stéroïdes, anticorps monoclonaux) a été observée. Ces changements ont pu avoir un impact sur la propagation de la résistance microbienne.

Dans une étude observationnelle multicentrique présentée lors de la Conférence 2020 de l’ESCMID sur la maladie à coronavirus (ECCVID), les auteurs ont comparé l'incidence de la colonisation et de l'infection par les entérobactéries résistantes au carbapénème (CRE) et/ou par l'Acinetobacter baumannii résistante au carbapénème (CR-Ab) chez tous les patients adultes consécutifs admis dans cinq USI situées dans les trois principaux hôpitaux de la ville de Bologne, située dans le nord de l'Italie, au cours de deux périodes distincts : la 1ère allant de janvier-avril 2019, et la 2ème couvrant la même période, mais en 2020.

Pendant la pandémie, ces cinq USI ont adapté leurs activités et ont déployé un certain nombre de lits ainsi que du personnel afin d'aider au mieux les patients atteints de COVID-19. Un dépistage hebdomadaire des CRE par écouvillonnage rectal et une surveillance des CRE/CR-Ab via des échantillons respiratoires provenant de patients sous respirateur ont été effectués au cours des deux périodes. Les rapports de taux d'incidence et les taux hebdomadaires de colonisation et d'infection pour chaque période ont été comparés.

Incidence en hausse de l'infection par CR-Ab pendant la période Covid

Au cours de la 1ère période, il y eu 1 345 admissions au sein des USI. Le séjour médian en USI était de 2 jours et le nombre total de jours-patients était de 7817. Au cours de la 2ème période, 1 367 admissions aux soins intensifs ont été comptabilisés, avec une durée médiane du séjour de 3 jours et le nombre total de jours-patients était de 8 700.

Respectivement, durant la 1ère et la 2ème période, l'incidence de la colonisation par CRE était de 47,3 et 40,2, tandis que l'incidence de l'infection par CRE était de 3,83 et 2,29 pour 10.000 jours-patients. Il n'y a pas eu de changements significatifs dans le rapport des taux d'incidence ou la distribution hebdomadaire au cours des deux périodes d'étude.

En revanche, l'incidence de la colonisation par CR-Ab était de 5,1 pendant la 1ère période et de 36,8 durant la 2ème période, tandis que l'incidence de l'infection par CR-Ab est passé de 5,1 à 26,4 pour 10.000 jours-patients entre la 1ère et la 2ème période. Au cours de la 2ème période, les taux d'incidence de la colonisation et de l'infection par CR-Ab ont respectivement augmenté de 7,5 et 5,5 fois par rapport à la 1ère période.

Les auteurs concluent qu'une augmentation considérable de la colonisation et de l'infection par CR-Ab a été observée durant la 1ère vague de la pandémie, tandis que l'infection par CRE est restée stable. Les unités de soins intensifs bondées, la disponibilité réduite des équipements de protection, en plus du recours important aux antibiotiques et aux thérapies immunosuppressives, ont pu favoriser la propagation de la CR-Ab. Dans le contexte de la pandémie, des mesures pour lutter contre les agents pathogènes difficiles à traiter sont nécessaires dans la prise en charge des patients aux soins intensifs.

 

Cet article a été initialement publié sur MediQuality, membre du réseau Medscape.

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