Royaume-Uni -- Alors que la campagne de vaccination contre la grippe est lancée en France, ce mardi 13 octobre 2020, dans un contexte d’épidémie de Covid en recrudescence, une étude anglaise suggère que les personnes infectées à la fois par la grippe et le SARS-CoV-2 seraient plus de deux fois plus à risque de décéder que les personnes infectées par le nouveau coronavirus seul.
Ces données préliminaires ont été fournies par l’agence anglaise de santé publique Public Health England (PHE)[1] et rapportées par le BMJ [] 2].
L’analyse de 58 cas de co-infections de janvier à avril 2020 a également révélé que les personnes atteintes des deux virus étaient plus à risque de contracter une maladie grave. La plupart des cas de co-infections concernaient des personnes âgées et plus de la moitié d'entre elles sont décédées.
Les données, publiées en preprint sur medRxiv1[1], sont sorties alors que le PHE a lancé un programme élargi de vaccination contre la grippe pour l'Angleterre qui ciblera 30 millions de personnes cet hiver.
Le Pr Jonathan Van-Tam, médecin chef adjoint de l’Angleterre, a déclaré lors d’une conférence de presse du PHE : « Il existe maintenant des données émergentes qui suggèrent clairement que la co-infection par la grippe et le Covid-19 est associée à un mauvais pronostic. L’une de ces maladies est actuellement évitable par la vaccination, et c’est le point vraiment important. »
En France, ce sont plus de 15 millions de personnes qui sont jugées « à risques », (plus de 65 ans, personnes atteintes de certaines maladies chroniques, femmes enceintes…) et qui vont recevoir un bon de l'Assurance maladie pour se faire vacciner, en sus des 300 000 professionnels de santé libéraux.
Taux de mortalité de 43,1% chez les personnes co-infectées
L'étude cas-témoins de PHE (non revue par des pairs), a comparé les taux de co-infection et estimé l'impact sur la mortalité. Elle a porté sur 19 256 personnes testées à la fois pour la grippe et le SARS-CoV-2 du 20 janvier au 25 avril 2020.
Elle a trouvé 58 personnes co-infectées, parmi lesquelles le taux de mortalité était de 43,1% (25). 80% (20) des personnes décédées, avaient plus de 70 ans.
Les probabilités de décès étaient 2,27 fois plus élevées (intervalle de confiance à 95% 1,23 à 4,19) chez les personnes co-infectées que chez les personnes atteintes du SARS-CoV-2 seul et l’étaient 5,92 fois (3,21 à 10,91) par rapport aux personnes n'ayant ni grippe ni Covid-19. Pour les auteurs, un « effet synergique » serait donc possible chez les personnes co-infectées.
Aussi, la co-infection était plus souvent associée à des formes graves de la maladie. Concernant le fait d’être ventilé et/ou de décéder, le risque de décès était 6,43 fois plus important chez les personnes co-infectées (RR de 3,61 à 11,47) que chez les personnes qui n’étaient pas infectées par les deux virus. De même, avec le critère d’évaluation combiné soins intensifs et/ou décès, le risque de décès était 6,33 fois plus important chez les personnes co-infectées (RR de 3,57 à 11,23) que chez les personnes qui n’étaient infectées par aucun des deux virus.
Une infection qui empêcherait l’autre ?
Plus rassurant, le risque de tests positifs pour le SARS-CoV-2 était 58% plus faible chez les cas positifs pour la grippe. Une donnée cohérente avec celles de New York divulguées récemment, où moins de 3% des personnes Covid+ avaient une co-infection avec la grippe, tandis que 13% de celles dont le test était négatif pour le SARS-CoV-2 étaient positives pour la grippe [3].
D’après le PHE, des données ont montré par la passé que le fait d'être infecté par un virus respiratoire signifiait que les gens étaient moins susceptibles d'être infectés par un autre à court terme. Mais, l’agence souligne que des recherches sont nécessaires pour comprendre la relation entre la grippe et le SARS-CoV-2, la grippe étant arrivée au début de l'hiver dernier, et le SARS-CoV-2 un peu plus tard.
La faible circulation des virus grippaux dans l’hémisphère sud, cette année pourrait être, en partie, expliquée par cette « compétition virale », indique le HCSP dans un avis publié récemment mais sans confirmation.
« Le faible taux de grippe dans l’hémisphère Sud est peut-être le fait d’une concurrence entre les virus mais je n’en suis pas très sûr. Par contre, ce qui est certain, c’est que les mesures barrières qui sont utilisées pour lutter contre la Covid vont également permettre de limiter la circulation du virus grippe », a commenté le Pr Daniel Floret, vice-président de la Commission Technique des Vaccinations à la HASpour Medscape édition française.
« Comme pour l’hémisphère sud, nous pouvons espérer que l’épidémie de grippe sera moins forte cette année », conclut-il.
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Citer cet article: Co-infection COVID-19 et grippe: un risque de décès plus que doublé? - Medscape - 13 oct 2020.
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