Paris, France – Alors que le dernier bulletin de Santé publique France fait part d’une « augmentation de l’ensemble des indicateurs de suivi de l’épidémie à SARS-CoV-2 », le Ministre de la santé, Olivier Véran, a pris la parole hier soir pour alerter sur une circulation très active du virus sur le territoire, dans une conférence de presse télévisée qui pourrait bien marquer la reprise des points d’information hebdomadaires, comme au temps de la crise. Pas de mesures drastiques parmi ses annonces, mais un rappel au respect des gestes barrières, un appel à chacun à réduire (encore) une part de ses contacts sociaux, et des restrictions supplémentaires à venir localement. Parmi les objectifs visés : « préserver à tout prix les soins courants » dans les hôpitaux tout en reconnaissant que « la fatigue des soignants est réelle ». Et face à l’ « embouteillage » du dépistage, des tests antigéniques et salivaires sont attendus en renfort pour octobre.
Epidémiologie : le virus circule activement
« Le taux d'incidence qui compte le nombre de nouvelles contaminations par semaine est en hausse constante. Il était hier soir dans notre pays de 83 cas pour 100 000 habitants, alors qu'il était à 40 à la fin du mois d'août, à 25 au milieu du mois d'août et à 10 à la fin du mois de juillet » a indiqué le ministre.
En revanche, avec une personne qui en contamine 2 autres tous les 15 jours, « le virus va moins vite [qu’au printemps dernier] et c'est une différence notable ». Mais il n’est pas devenu moins dangereux avec l’été, a-t-il souligné.
Confirmation s’il était nécessaire que le virus circule fortement chez les jeunes : « Au cours de l'été, on a eu un taux de 140 pour 100 000 dans la tranche d'âge des 15-44 ans, dont 50 étaient symptomatiques ». Le risque est aujourd’hui que « le virus passe des plus jeunes qui font moins de formes graves, mais qui peuvent en faire, vers les personnes moins jeunes et vulnérables».
D’autant que le virus circule de plus en plus chez les plus de 65 ans. Le Ministre a d’ailleurs incité cette population à se protéger encore davantage. Après avoir évoqué « des mois de confinement très pénibles », il s’est adressé directement aux personnes les plus fragiles face au Covid et à celles susceptibles de formes graves de la maladie avec ce message : « je vous demande de vous protéger encore plus ».
Il a, par ailleurs, indiqué que « la famille, les rassemblements amicaux sont des lieux massifs de contamination » et que « les gestes barrières, des réflexes de bon sens sont les seuls à même de nous protéger ».
Le risque est de voir les services hospitaliers à nouveau engorgés. « Une circulation plus active du virus finit forcément par se traduire par davantage d'hospitalisations et par davantage de cas graves en réanimation. Nous voyons aujourd'hui le nombre de malades Covid en réanimation remonter de façon préoccupante avec des différences significatives entre les régions » s’est inquiété Olivier Véran.
Régions : des restrictions à venir pour Lyon et Nice
« Le seuil d'alerte, nous l'avions établi à 50 cas pour 100 000 habitants. Aujourd'hui, 53 départements ont dépassé ce seuil et sont donc classés dans cette fameuse zone de circulation active du virus et dans certains territoires, notamment dans certaines villes. Nous sommes d'ores et déjà là, à Marseille. Nous sommes à près de 6 fois ce seuil en Guadeloupe, à 5 fois ce seuil à Bordeaux, 4 fois ce seuil à Lyon et à Paris à plus de 3 fois ce seuil » a rappelé le Ministre.
A Marseille, Bordeaux et à la Guadeloupe qui ont largement dépassé la côte d’alerte, « il faudra sans doute prendre des mesures encore plus fortes ». Elles seront décidées au niveau local, mais le Ministre a d’ores et déjà évoqué « la possible fermeture des bars ou à l'interdiction de rassemblements publics ».
Au vu de l'évolution des indicateurs épidémiologiques, Lyon et Nice pourraient bien connaître le même sort. D'ici ce samedi, les préfets du Rhône et des Alpes-Maritimes devraient proposer au gouvernement des mesures visant à « enrayer la circulation du virus et limiter son impact sur le système sanitaire » a annoncé Olivier Véran. « Les maires de Nice et Lyon ont d'ailleurs déjà commencé à prendre des mesures par anticipation» a précisé le Ministre.
Toulouse, Rennes, Dijon et Paris pourraient être les prochaines sur la liste des villes à restrictions renforcées. Le taux d'incidence en population générale y est également élevé, de l'ordre de 3 à 4 fois le seuil d'alerte quand le taux d'incidence pour les personnes âgées de plus de 65 dépasse, lui, le seuil d'alerte. « Les seuils critiques ne sont pas encore atteints, mais nous serons extrêmement attentifs à l'évolution de la situation dans ces métropoles » a déclaré Olivier Véran.
Politique de tests à grande échelle : l’embouteillage
Ça coince du côté des tests, victimes en quelque sorte de leur succès – et de leur accessibilité aisée. Le Ministre l’a reconnu tout en défendant la stratégie de dépistage du gouvernement. « Nous avons réussi le pari du dépistage massif, mais nous sommes – au regard du nombre de tests réalisés chaque jour – confrontés à de réelles difficultés organisationnelles que nous devons résoudre » a-t-il admis.
Chaque Français peut bénéficier d’un test gratuitement et sans ordonnance et le pays a dépassé les 1 200 000 tests hebdomadaires. Mais la conséquence directe de cette stratégie de tests à grande échelle, « c’est un embouteillage ». D’où la politique de priorisation des tests, qu’avait annoncé Jean Castex vendredi dernier. Sont désormais prioritaires : les personnes avec une prescription médicale, celles qui sont symptomatiques, les soignants, les aides à domicile, les cas contacts.
En Île-de-France, 20 centres de prélèvements pour les publics prioritaires vont être déployés à Paris, à Trappes, Bondy, à Evry à partir de lundi prochain, en plus des 590 laboratoires à l’œuvre actuellement. Ces centres ouverts de 8 heures à 14 heures pourront réaliser «au moins 500 tests PCR chacun par jour», a précisé le ministre qui a également tenu à rappeler que « le test n'est pas un geste barrière » et que rien ne sert « de se tester trop souvent ».
Tests antigéniques et salivaires : c’est pour bientôt
Les tests antigéniques similaires au test PCR mais dont le résultat peut être obtenu en moins de 30 minutes, ont obtenu les autorisations commerciales, a indiqué Olivier Véran. Ils pourront donc «devenir demain un complément utile dans la stratégie de dépistage». Des expérimentations ont été autorisées et initiées en Île-de-France grâce aux hôpitaux de l'AP-HP, de concert avec l’Agence régionale de Santé. «Nous avons également d'ores et déjà passé des premières commandes à hauteur de 5 millions de tests antigéniques qui seront arrivés d'ici à début octobre», a annoncé le ministre.
A noter : la Haute Autorité de Santé (HAS) a annoncé le vendredi 18 septembre qu'elle était favorable au recours et au remboursement des tests virologiques (RT-PCR) sur prélèvement salivaire pour les personnes symptomatiques pour lesquelles le prélèvement nasopharyngé est difficile voire impossible. En revanche, elle ne les recommande pas pour les personnes asymptomatiques, chez qui ils sont très peu performants.
Jeunes enfants : port du masque obligatoire en crèche
Le Ministre a cité un avis rendu le jour même par le Haut conseil à la santé publique indiquant que « les enfants jeunes sont peu à risque de formes graves et peu actifs dans la chaîne de transmission du coronavirus. Le risque de transmission existe principalement d’adulte à adulte, d’adulte à enfant, mais rarement d’enfant à un enfant ou d’enfant à un adulte ».
Par conséquent, « le port du masque sera désormais obligatoire pour tous les professionnels de crèche, y compris en présence des enfants ». Par ailleurs, le Ministre a insisté sur le fait que « les enfants doivent aller à l’école et il n’y a pas lieu de renvoyer les élèves chez eux, voire de fermer des établissements entiers à la première alerte », c’est-à-dire lorsqu’il n’y a qu’un seul cas.
En clair, lorsqu’un enfant est testé positif, il doit être isolé sept jours chez lui. « Mais les autres enfants de sa classe pourront normalement continuer à se rendre à l’école » a-t-il insisté.
Crédit photo: Ministères sociaux DICOM, Nicolo Revelli-Beaumont SIPA Press
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Citer cet article: Montée en puissance du COVID-19: Olivier Véran affine sa stratégie - Medscape - 18 sept 2020.
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