POINT DE VUE

COVID-19 : enfin quelques bonnes nouvelles

Pr Gilles Pialoux

Auteurs et déclarations

8 novembre 2020

Frémissement à la baisse de l’épidémie dans certaines métropoles, avancées dans la compréhension de l’immunité liée au coronavirus, et annonce de résultats encourageants pour un vaccin en phase 3. Ces divers éléments suscitent une lueur d’espoir. Le blog du Pr Pialoux.

TRANSCRIPTION/ADAPTATION—VIDEO ENREGISTREE LE 9 NOVEMBRE 2020

Paris, France — Bonjour. Gilles Pialoux — je suis chef de service de maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Tenon, à Paris, et professeur à Sorbonne-université. Je suis ravi de vous retrouver dans cette deuxième vague et deuxième étape de la guerre au COVID.

IdF : moins d’hospitalisations mais une situation toujours tendue en réa

Quelques bonnes nouvelles, si on peut dire, dans un océan de préoccupations et d’inquiétude.

Actuellement, à Tenon, on a un formatage de la superficie des lits pour le COVID autour de 97 lits pour un hôpital qui a un peu moins de 500 lits. Aujourd’hui, 9 novembre, cela respire un tout petit peu sur l’entrée en hospitalisation dans notre complexe — un petit frémissement qui est probablement, soit lié à la circulation du virus, qui aurait pu être freiné par le début du couvre-feu, puis par ce confinement light — une diminution des appels sur le SAMU, une diminution des appels sur SOS médecin.

 
Cela respire un tout petit peu sur l’entrée en hospitalisation.
 

En revanche, cela ne se tasse pas du tout en réanimation, pour l’instant. On attend évidemment les jours et les semaines qui viennent avec un total sur l’Île-de-France de 1077 patients en hospitalisation de réanimation, de soins intensifs pour 416 à l’APHP. On est au-delà du 100 % d’occupation.

 
Cela ne se tasse pas du tout en réanimation, pour l’instant.
 

À Tenon, par exemple , on a 20 lits de réanimation classique qui ont été transformés en 20 lits de réanimation COVID, plus, évidemment, un secteur de soins intensifs de 8 lits, plus un secteur de réanimation COVID négatif.

Et ce secteur de réanimation COVID positif est actuellement occupé par 19 malades sur 20, quasiment tous intubés — 18 sur 19 sont intubés et ventilés.

Donc le frémissement en réanimation ne se voit pas.

IdF: un peu plus de jeunes; un pic d’hospitalisations en réa revu à la baisse

On voit, un peu plus de sujets plus jeunes, mais la moyenne d’âge en réanimation est la même que pour la première vague, c’est quelque chose qui est important. Et puis, élément un petit peu positif, l’institut Pasteur estime que le pic descend un peu. On misait plutôt sur 1600, 1700 patients au pic, d’ici la mi-novembre, et désormais, on serait peut-être en dessous entre 1100 et 1400 pour l’Île-de-France. Donc, la route n’est pas terminée et, effectivement, on reste extrêmement mobilisés.

 
L’institut Pasteur estime que le pic descend un peu.
 

Quelle réponse immunitaire ? Trois papiers clés

Après ce point de situation, voici quelques informations plus scientifiques sur la réponse immunitaire avec trois papiers assez récents.

Un premier papier nous vient du groupe britannique REACT 2 [1], qui a la possibilité de faire des études en population générale avec les données sociodémographiques, ce que l’on ne peut pas en France.

Ce papier est sorti dans Waning Immunity avec 365 104 adultes qui ont été étudiés, parmi lesquels 17 576 se sont avérés avoir des anticorps anti-COVID. L’intérêt de cette publication, est de montrer sur une période de trois mois la décroissance des anticorps, notamment des anticorps neutralisants. Ce déclin des anticorps est progressif sur trois mois, d’environ 27 %, qui passe de 6 % à 4,8 %, puis à 4,4 % sur une période de trois mois de l’étude. Ce déclin de la réponse immune anticorps part de plus bas en termes de titre d’anticorps chez les personnes les plus âgées, et ce déclin est plus important chez les personnes plus âgées. Il est moins important, par contre chez les patients symptomatiques – mais on le savait déjà, puisqu’il y a une corrélation, même si elle est discutée, entre les anticorps neutralisants et la réponse immune et le fait d’avoir une pathologie COVID symptomatique (Lire COVID-19 : un quart des personnes perdraient leurs anticorps en moins de 3 mois).

 
Ce déclin des anticorps est progressif sur trois mois.
 

La deuxième publication est une publication très intéressante de Science datée du 23 octobre[2], d’une équipe française, avec de nombreux signataires, le premier auteur étant Paul Bastard (Paris Necker, INSERM U1163, Université de Paris,  NYU).

Elle rejoint une autre publication Science française datée du 13 juillet, qui avait déjà stipulé qu’il y avait une déficience dans la réponse interféron de type 1 chez les patients en forme très grave et en réanimation, notamment, avec des syndromes de détresse respiratoire sévère. La piste du déficit en réponse d’interféron de type 1 a été balisée par cette étude de Science du 23 octobre, qui montre qu’il s’agit d’une réponse probablement auto-immune observée dans les formes les plus sévères de COVID avec pneumopathie et qui se retrouverait chez 2,6 % de femmes et 12,5 % d’hommes.

 
Une déficience dans la réponse interféron de type 1 chez les patients en forme très grave et en réanimation.
 

C’est à la fois une explication sur cet aspect loterie, si l’on peut dire, de qui va en réanimation et qui n’y va pas, à comorbidités égales et, d’autre part, sur ce différentiel entre les hommes et femmes pour l’accès à la réanimation.

Bien sûr, cela ouvre aussi des perspectives thérapeutiques, puisqu’on comprend bien que des thérapeutiques anti-inflammatoires adaptées ciblant notamment l’interleukine 6, le TNF-alpha et l’interféron, avec l’administration peut-être précoce de l’interféron est certainement une piste thérapeutique intéressante.

Sur le plan de la réponse cellulaire , une autre dimension tout à fait intéressante est la réponse T. Là aussi, il y a un travail publié dans Nature [3]qui a analysé les réponses cellulaires à la fois sur les protéines structurales de type N et à la fois sur des protéines non structurales — nsp7 et nsp13. On s’aperçoit qu’il y a une réponse cellulaire qui n’est d’ailleurs pas totalement dépendante de la réponse anticorps — on peut avoir une réponse cellulaire sans avoir une réponse anticorps — Cette réponse cellulaire apparait aussi croisée, avec une réponse au SARS, au COVID 19. Le SARS aurait, donc, une réponse cellulaire en partie croisée — c’est certainement une piste intéressante pour la recherche vaccinale — .

 
On peut avoir une réponse cellulaire sans avoir une réponse anticorps.
 

Cette réponse T spécifique apparaîtrait aussi chez des personnes qui n’ont pas eu de manifestation clinique, donc des personnes soit asymptomatiques, soit des cas-contact.

Donc on voit que sur le plan de la réponse immunitaire, le jour même où on a les premiers résultats d’un essai vaccinal de phase 3 avec des résultats assez encourageants — 90 % de réduction avec le vaccin de Pfizer — il y a quelques bonnes nouvelles. Je pensais devoir en tenir compte sur cette vidéo pour Medscape édition française. Merci.  

 

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