La France doit-elle maintenir le dépistage de la toxoplasmose congénitale ?

Nathalie Barrès

Auteurs et déclarations

15 juillet 2020

France--Le Collège des gynécologues et obstétriciens français a mandaté un groupe d’experts pour adapter le dépistage prénatal de la toxoplasmose aux bonnes pratiques internationales, compte tenu de la diminution de l’incidence de la maladie et des coûts liés aux tests.

Pourquoi remettre en cause ce dépistage ?

En France, seulement 31% des femmes enceintes seraient immunisées contre la toxoplasmose. Seules 0,2 à 0,25% de femmes connaîtraient une séroconversion durant leur grossesse, ce qui représente 1000 à 1300 nouvelles infections chez des femmes enceintes par an, soit une diminution d’environ 70% au cours des 3 dernières décennies. Ce constat est la conséquence de l’évolution des mesures d’hygiène tant au niveau individuel, qu’au niveau de l’industrie alimentaire. Par ailleurs, les traitements disponibles ont montré un bon ratio coût/efficacité. Le risque de transmission materno-fœtale serait de l’ordre de 25 à 29% et dépendrait notamment du moment de la séroconversion (3 à 6,6% au premier trimestre, 61 à 71% au troisième).

Quels sont les risques en cas de transmission materno-fœtale ?

Les données 2006-2017 du Centre National de référence de la toxoplasmose indiquent que si dans 90% des cas l’enfant ne présente pas de symptômes, des symptômes cérébraux et des lésions rétiniennes sont présents chez les 10% restants. Deux tiers des formes symptomatiques sont considérées comme modérées et un tiers comme sévères. Les risque d’infection fœtale et de toxoplasmose symptomatique chez l’enfant diminuent avec l’âge gestationnel au moment de l’infection (59-61% au premier trimestre, 17-25% au second, 9-11% au troisième). 

Quels sont les protocoles de soins ?

Bien qu’il n’existe pas de recommandations officielles, un groupe de spécialistes a proposé un protocole de soins, révisé récemment. Celui-ci fait appel à un traitement idéalement administré dans les 3 semaines suivant la séroconversion pour limiter l’impact de celle-ci pour le fœtus. Ce protocole consiste à prendre de la spiramycine avant 14 semaines de gestation et plus favorablement l’association pyriméthamine/sulfadiazine au-delà. En cas de diagnostic anténatal de toxoplasmose congénitale, l’association précédemment citée sera administrée jusqu’à l’accouchement.

Quel est la pertinence du programme de dépistage français actuel ?

En France, le programme de dépistage prénatal consiste en une surveillance mensuelle des femmes séronégatives afin de pouvoir mettre en place un traitement le plus rapidement possible en cas de séroconversion. Une interruption de grossesse peut également être envisagée dans le cas de formes graves. Les tests sérologiques et les PCR sur liquide amniotique actuellement disponibles sont performants. Plusieurs évaluations ont été réalisées et ont conclu à l’intérêt économique du dépistage actuellement pratiqué en France. Pour autant, le dispositif français n’est pas en adéquation avec les recommandations de plusieurs sociétés internationales qui ne préconisent pas ce dépistage, et ce, principalement pour des raisons financières. Or, ce dépistage contribue très probablement à la bénignité de la maladie en France du fait d’une prévention précoce de la toxoplasmose congénitale. Ainsi, le panel d’experts du Collège des gynécologues et obstétriciens français se prononce en faveur du maintien de ce dépistage.

Mesures préventives

En 2005, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) a hiérarchisé des mesures préventives qu’il est toujours utile de rappeler aux femmes concernées, dont les plus importantes sont : la cuisson de la viande (rouge ou blanche) au-dessus de 67°C à cœur ; bien se laver les mains, avec brossage des ongles ; laver soigneusement les végétaux pour éliminer toute trace de terre ; laver les ustensiles de cuisine et les surfaces de travail. La présence d’un chat est un facteur de risque d’infection. La litière de celui-ci doit être nettoyée tous les jours à l’eau bouillante, si possible par une autre personne que la femme enceinte ; la viande peut être congelée à -12°C durant au minimum 3 jours pour détruire les kystes du parasite.

Cet article a été publié initialement sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape.

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