France -- Depuis le début de la pandémie, la Caisse autonome de retraite des médecins français (Carmf) a tenu un décompte précis et pointilleux du nombre de médecins morts en pleine gestion des cas de coronavirus.
À trois reprises, la Carmf a communiqué officiellement sur le nombre de décès dans les rangs des médecins libéraux. Le 4 mai, elle annonçait 29 médecins libéraux décédés dont 17 médecins en activité, et 12 médecins retraités avant de revoir ses données à la hausse le 11 mai avec 38 médecins décédés dont 22 médecins en activité, et 16 médecins retraités.
Enfin, ce 5 juin, le nombre de médecins libéraux décédés atteignait 46, soit 26 médecins libéraux en activité, et 20 médecins retraités.
La Carmf signalait aussi avoir enregistré plus de 6000 demandes d'indemnisation d'arrêts de travail, en rapport avec le Covid-19.
5 médecins décédés dans le secteur public
Qu'en est-il dans le secteur public ? Longtemps, les pouvoirs publics se sont refusés à tout décompte "macabre" du nombre de médecins et de soignants décédés pendant l'épidémie, pour reprendre l'expression du Pr Jérome Salomon, directeur général de la santé (DGS). Toutefois, depuis le début 22 avril, les pouvoirs publics ont décidé de surveiller les infections chez les professionnels de santé salariés dans les établissements de santé.
Le point épidémiologique hebdomadaire de Santé publique France en date 4 juin dernier en fait une recension. Depuis le 1er mars, 30258 personnels ont été infectés, dont 25312 personnels de santé. Parmi eux, l'on compte 29% d'infirmiers, 24% d'aides-soignants, et 10% de médecins. Parmi ces 30258 cas, Santé publique France a relevé 16 décès liés à l'infection à SarsCov2, dont 5 médecins, 4 aides-soignants, un professionnel de santé autre et 6 professionnels non soignants.
Pour l'heure, face à ces décès, les syndicats, autant hospitaliers que libéraux, se sont contentés de dénoncer la pénurie en équipement individuel de sécurité, comme le Syndicat National des Praticiens Hospitaliers Anesthésistes Réanimateurs Elargi (SNPHARE) qui a publié une enquête sur le sujet (voir encadré), ou encore comme l'Ufml-S. qui a rendu hommage aux personnels soignants décédés.
Plaintes
Néanmoins, des familles de médecins décédés ont souhaité porter l'affaire en justice. Il en va ainsi de la veuve du Dr Éric Loupiac, médecin urgentiste à l'hôpital Lons-le-Saulnier (39), mort du Covid-19 le 24 avril dernier. Début mai, Claire loupiac annonçait dans les médias vouloir porter plainte contre l'Agence régionale de santé pour "mise en danger de la vie d'autrui", mais aussi contre le ministre de la Santé Olivier Véran, et sa prédécesseur Agnès Buzyn. Elle estime en effet que son époux décédé a dû assurer des gardes sans bénéficier des équipements de protection adéquats, notamment de masques.
La veuve du Dr Ali Djemoui a suivi la même procédure. Son mari, médecin généraliste à Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne), est décédé le 2 avril dernier du Covid-19. Son avocat Maitre Di Vizio, a porté plainte contre X pour homicide involontaire. Confronté à des patients Covid-19 dès le mois de février, le Dr Djemoui n'a pas bénéficié à ce moment-là des protections nécessaires, notamment des masques, fournis par l'État, via en l'occurrence l'ARS Ile-de-France.
Plus récemment, une initiative a été prise pour rendre hommage aux personnels soignants décédés. Ainsi, un ancien haut fonctionnaire, Jean-Pierre Lemoine , a demandé à Emmanuel Macron de faire rentrer au Panthéon le Dr Jean-Jacques Razafindranazy, urgentiste qui exerçait au Chu de Compiègne et premier médecin décédé du Covid-19 en France fin mars. Le président n'a pour l'heure pas donné suite à cette requête.
Quelles protections individuelles pour les soignants hospitaliers ?
Selon une enquête du SNPHARE qui a collecté entre le 7 et le 17 avril quelque 1305 réponses, mi-avril, 47% des praticiens hospitaliers ne disposaient toujours pas de protection individuelle : masque chirurgical, FFP2, blouse étanche ou sur blouse, ainsi que de lunettes et de solution hydre-alcooliques. Seuls 56% des établissements de santé avaient rendu le port du masque obligatoire et seuls 26% des répondants bénéficiaient d'un équipement de protection individuel (EPI) au début de la crise.
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Citer cet article: Plus de 50 médecins, libéraux et hospitaliers, décédés du COVID-19 - Medscape - 10 juin 2020.
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