POINT DE VUE

Confinement, stress…le sommeil des français impacté par le COVID-19

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

28 mai 2020

France — En 2015, 16 % des Français déclaraient souffrir d’insomnie et 17 % de troubles du rythme du sommeil, selon une étude de l’INSV / MGEN [1].

Aujourd’hui, l’épidémie de Covid-19 et le confinement n’ont rien arrangé si l’on en croit plusieurs études [2,3]. Le stress et les changements d’habitudes de vie liés à cette période incertaine ont mis à mal le sommeil d’une bonne partie de la population.

Covid-19 : un stress délétère pour le sommeil

Dans un article publié récemment sur le « sommeil pendant l’épidémie de Covid-19 », l’Institut National du Sommeil et de la Vigilance (INSV) a reprécisé l’importance du stress sur le sommeil [2].

« On sait qu’un stress chronique engendre des troubles du sommeil, des difficultés à l’endormissement et des réveils nocturnes. Cela est provoqué par une modification du fonctionnement de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien entraînant une augmentation du cortisol notamment le soir à un moment où physiologiquement il est au plus bas », explique le Dr Marie-Françoise Vecchierini (neuro-psychiatre, spécialiste du sommeil à l’Hôtel Dieu, Paris).

 Or, « une grande variété de sources de stress peut affecter le sommeil en lien avec l'épidémie de Covid-19, notamment des « changements majeurs dans la routine, l'incertitude », l'angoisse pour sa santé, la situation économique, ou encore la supposée durée de cette situation inédite », expliquait récemment le Dr Krishna M. Sundar, directeur du Sleep-Wake Center de l'université de Utah (Etats-Unis).

Confinement : un sommeil dégradé pour 47 % des français

Ces craintes d’une détérioration du sommeil pendant l’épidémie ont été confirmées par une enquête du réseau Morphée intitulée « Sommeil et Confinement ». L’étude qui s’est déroulée entre le 11 et le 23 avril a révélé que pendant le confinement, 47 % des 1786 participants avaient déclaré avoir moins bien dormi dont 14% « beaucoup moins bien » (30 % ont déclaré dormir « comme d’habitude » et 13 % « mieux »).

Lire les commentaires du Dr Sarah Hartley sur l'étude Morphée dans Troubles du sommeil durant le confinement : quel impact ?

 

Dessin Héloïse Chochois : Quand l e Covid-19 empêche de dormir

Ont aussi été constatés, une diminution de la qualité de sommeil, une augmentation de la durée du sommeil (+42 minutes en moyenne), un décalage des horaires vers le soir (+50 minutes en moyenne) avec des levers plus tardifs (+1h08 en moyenne).

Le principal facteur ayant pu impacter le sommeil était l’utilisation des écrans : 52% des répondants ont indiqué utiliser les écrans plus de 3 heures pendant la soirée versus 23 % auparavant. Mais, la baisse de l’activité physique pour certains, et la moindre exposition à la lumière du jour (-25 minutes en moyenne pendant le confinement) ont aussi pu avoir des effets néfastes.

« Ces modifications [des habitudes de vie] observées sont plutôt délétères pour le sommeil, avec une possibilité que les difficultés perdurent après le confinement vu les horaires décalés », concluent les auteurs de l’étude.

 
Ces modifications [des habitudes de vie] observées sont plutôt délétères pour le sommeil. Dr Marie-Françoise Vecchierini et Dr Krishna M. Sundar
 

Or, les troubles du sommeil ont des répercutions importantes sur la santé physique (cardiovasculaire, neurologique, baisse de l’immunité…) et psychique (dépression, paranoïa…) mais aussi un impact social et économique.

Lutter contre les troubles du sommeil en cette période déstabilisante

Pour faire face à ces difficultés de sommeil, l’INSV rappelle quelques règles de bonne hygiène du sommeil : maintenir les liens sociaux, l’activité physique, s’exposer à l’ensoleillement, conserver son rythme de sommeil, dormir dans un environnement calme, modérer sa consommation d’excitants, et limiter le temps d’écran le soir.

Pas plus de place pour les somnifères en première ligne dans le contexte du Covid-19 donc qu’en temps normal, comme le répétait encore récemment le Dr Marc REY (neurologue, Président de l'INSV) [2] : « Beaucoup d’attention a été attirée sur les effets secondaires des somnifères. Ils ne sont plus la solution » qu’ils soient anciens ou nouveaux, comme les inhibiteurs des récepteurs aux orexines.

Concernant ces derniers (non encore commercialisés en France), le Dr Rey a précisé pour Medscape édition française, qu’ils restaient « l’objet d’un champ de recherche » et que l’on ne pouvait pas envisager l’insomnie « comme une maladie que l’on peut traiter avec une pilule ».

Il a rappelé que le traitement de première ligne de l’insomnie chronique était la thérapie cognitive comportementale et une nouvelle fois déploré son absence de remboursement. « Le message est brouillé », a-t-il conclu.

Lire le dossier

 

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