COVID grave : et si l’intubation n’était pas la solution ?

Dr Isabelle Catala

10 avril 2020

France -- Changement de cap sur la prise en charge des syndromes de détresse respiratoire aigües (SDRA) liés au Covid-19, conduisant à une hospitalisation en réanimation avec une mortalité de 30% à 60%. Si l’intubation était conseillée dans un premier temps, l’oxygénothérapie à haut débit et la ventilation non invasive trouvent désormais leur place dans le traitement de la pneumopathie grave à Covid.

Les lésions pulmonaires retrouvées ne sont pas celles attendues dans un SDRA

Dans un premier temps, l’intubation était conseillée dès que la saturation était insuffisante (SpO2 <92 % sous 6 l au masque à haute concentration). Ces protocoles étaient dérivés de ceux utilisés pour le SDRA classique. Mais le 30 mars 2020, des réanimateurs italiens et allemands, publiaient dans l’American Journal of Respiratory Critical Care Medicine une lettre dans laquelle ils avançaient que les pneumopathies Covid sont plus proches dans leur présentation clinique des oedèmes pulmonaires liés à l’altitude que des SRDA.

Dans cette publication, le Dr Luciano Gattinoni, qui a repris une série de patients hospitalisés dans le nord de l’Italie, précise que les lésions retrouvées n’étaient pas celles attendues dans un SDRA : dans les Covid, l’hypoxémie sévère est associée à des volumes gazeux pulmonaires conservés. C’est pour cette raison qu’il propose de privilégier une pression de fin d’expiration positive limitée (PEPP) et une ventilation avec des paramètres les moins en force possibles afin de limiter l’apparition secondaire de lésions induites par l’hyperpression. Cette approche prudente – et adaptée aux caractéristiques physiologiques du patient – « pourrait permettre de passer un cap en douceur, sans lésions liées au traitement ».

Une approche de même type est proposée par le Dr Cameron Kyle-Sidell, urgentiste au centre médical Maimonides à Brooklyn (New York, Etats-Unis) qui partage son expérience dans une vidéo avec le Dr John Whyte, directeur médical de WebMD.

Oxygénothérapie à haut débit et ventilation non invasive

Qu’en est-il en France ? Initialement, les techniques non invasives n’étaient pas indiquées en raison du risque lié à l’aérosolisation des particules virales. La SFMU ne les conseillait pas et contre-indiquait même fin mars l’optiflow (l'oxygénothérapie nasale à haut débit). Devant la baisse du nombre des respirateurs disponibles et en raison des risques de transmission associés à l’intubation, de nouveaux protocoles ont été proposés : désormais et depuis début avril, l’oxygénothérapie à haut débit et la ventilation non invasive (VNI) – sous pression positive continue (CPAP) ou Boussignac – sont proposés pour tenter d’éviter l’intubation.

En présence de patients traités de cette façon, les soignants doivent porter une tenue complète de protection et un masque FFP2 pour limiter le risque aérosol.

Bien qu’il n’existe pas encore de recommandations officielles, les réanimateurs s’accordent pour avancer que ces techniques doivent être utilisées en cas d’impossibilité de maintenir une SpO2 supérieure à 92 % avec un débit d’oxygène à 6 l par minute au masque à haute concentration. L’oxygénothérapie à haut débit doit débuter à 40 l par minute avec une FiO2 à 60, la CPAP doit pour sa part être réglée initialement avec un débit de 20 l d’oxygène par minutes. L’objectif est d’obtenir une SpO2 >92 % et baisse de la fréquence respiratoire. L’intubation n’est indiquée qu’en cas de fatigue respiratoire, de troubles de la conscience ou d’hypoxie malgré l’augmentation du couple FiO2/débit.  

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