TRANSCRIPTION
Bonjour, aujourd'jui je vais vous parler des organisations de prise en charge des patients en cardiologie suivant leur statut d’infection à coronavirus. Pour cela, je vais m’inspirer d’un document de l’ARS Île-de-France[1] qui vient d’être rendu publique, et d’un texte de l’American College of Cardiology qui est également disponible en ligne. [2]
En cardiologie, trois types de prises en charge se présentent à nous : 1) les pathologies chroniques, 2) les décompensations aiguës, et 3) les explorations des patients à la recherche de pathologies cardiaques (ou pour aller plus loin dans leur exploration).
Dans le cadre d’un patient chronique :
hypothèse 1 : il n’y a pas d’argument pour une infection à coronavirus — il faut, bien entendu, éviter que ce patient ne se rende à l’hôpital et pour cela privilégier la téléconsultation ou le travail avec nos collègues cardiologues de ville pour que le patient ne se rende à l’hôpital que pour des raisons importantes.
hypothèse 2 : le patient a des signes d’infection à coronavirus — il y a alors avoir trois possibilités : soit il n’a pas de critères de gravité et pas de terrain de débilité, et dans ce cas-là, il n’a pas d’indication à être hospitalisé ; soit il a un terrain de comorbidité sans avoir de critères de gravité — par exemple un sujet très âgé ou un patient avec une insuffisance cardiaque sévère stade 3 à 4 — alors ce patient, par exemple pour la cardiologie, sera hospitalisé dans un secteur COVID+ qui n’est pas obligatoirement le service de cardiologie, mais souvent les organisations locales ; la troisième possibilité est bien sûr la présence de critères de gravité. Dans ce cas, on revient à celle de n’importe quel patient qui justifierait, le cas échéant, d’aller en réanimation.
Prise en charge des pathologies aiguës — un œdème pulmonaire, une embolie pulmonaire, ou voire, un infarctus du myocarde :
S’il n’y a pas d’arguments en faveur d’une infection à coronavirus, il sera pris en charge comme à l’usuel dans l’unité de soins intensifs ou dans un service de cardiologie dédié COVID négatif.
S’il y a des arguments en faveur d’une infection à coronavirus, il sera orienté vers les lits COVID positifs qui peuvent l’accueillir. Soit ce sera une organisation locale dans les centres qui font que certaines de leurs unités de soins intensifs seront COVID+ et d’autres COVID –, par exemple l’USI cardio ou l’USI neuro, soit au sein de l’USI cardio si on met des lits dédiés, soit par exemple une organisation entre l’USIC et l’USC, c’est aussi une possibilité. Et dans ce cas-là, le patient sera pris en charge dans cette unité pour pouvoir être isolé, ou la possibilité, bien sûr, d’avoir des lits isolés au sein de l’unité de soins intensifs de cardiologie, si cela s’avérait nécessaire. De toute manière, ce nombre de patients va augmenter.
Deuxième possibilité – bien sûr, s’il n’y avait pas d’arguments il sera hospitalisé comme à l’usuel – c’est dans le cadre de l’infarctus du myocarde — c’est la situation difficile — ou dans le cadre des syndromes coronaires aigus sans sus-décalage du segment ST. Dans le cadre de l’infarctus du myocarde aigu en l’absence de signes d’infection à coronavirus, il est pris en charge comme à l’usuel.
En présence de signes d’infection à coronavirus, l’une des questions qui se posent est : faut-il thrombolyser ? Cela a été évoqué, notamment par le document de l’American College of Cardiology. Et si on fait une coronarographie, on sait très bien que nos salles de coronarographie sont rarement à pression négative et qu’il faut, dans ce cas-là, bien préparer, bien équiper l’équipe pour pouvoir faire cette coronarographie dans les meilleures conditions. Sinon, dans le cadre des syndromes coronaires aigus sans sus-décalage du segment ST, il faut bien réfléchir à différencier les infarctus de type 2, puisqu’on peut avoir des élévations de troponine qui peuvent être liées à une souffrance myocardique secondaire, et à une infection à coronavirus, voire des cas de myocardite, et sans obligatoirement que ce soit un syndrome coronaire aigu.
Les explorations fonctionnelles invasives, notamment des pathologies cardiaques, ou certains examens qui peuvent être retardés (ex. angioplastie programmée pour une ischémie myocardique silencieuse, ablation de FA paroxystique). Ce sont des actes non urgents et pour lesquels, bien sûr, il est recommandé de les reculer pour ne pas exposer ces patients à un risque d’infection à l’hôpital et pour respecter le confinement au maximum. Donc, autant que possible, pour les patients qui n’ont pas d’urgence, on peut reculer l’acte d’exploration ou l’acte interventionnel si cela est une indication chez un patient parfaitement stable.
Ces documents vous permettent donc d’avoir une vision assez large de la prise en charge. Il va être mis à jour dans une version 2 en impliquant, notamment, les cardiologues libéraux et également les cardiologues prenant en charge des patients en SSR. Je vous remercie.
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Citer cet article: COVID-19 : comment s'organise la prise en charge des patients en cardiologie? - Medscape - 25 mars 2020.
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