POINT DE VUE

Intoxication au CO: quelles nouveautés?

Dr Dominique Savary

Auteurs et déclarations

8 avril 2020

Le blog du Dr Dominique Savary – urgentiste, réanimateur

Le Dr Savary commente deux nouvelles études sur la prise en charge des intoxications au monoxyde de carbone (CO), notament usr les séquelles neurologiques et le mode d’oxygénation.

TRANSCRIPTION

« Bonjour. Je ne vous retrouve pas aujourd’hui sur Medscape pour vous parler du COVID-19, mais plutôt de l’intoxication au monoxyde de carbone (CO), et notamment de deux articles qui sont sortis en 2019, l’un dans le American Journal of Emergency Medecine[1] et l’autre dans Prehospital and Disaster Medecine[2]. Ces papiers ont été écrits par des équipes turques, certes pas de haut niveau scientifique, mais qui avaient l’intérêt de parler de choses pragmatiques pour la pratique aux urgences.

L’intoxication au CO est très fréquente. Dans 30 % des cas, on passe à côté du diagnostic, mais c’est quand même 50 000 passages aux urgences par an (cela a été évalué aux États-Unis). Détecter cette pathologie est difficile parce qu’il s’agit d’un gaz, comme vous le savez, incolore, inodore, et que la fameuse coloration rouge cerise, classiquement décrite, est en fait très rarement trouvée dans la pratique.

Séquelles neurologiques de l’intoxications au CO

Le premier papier [1] s’est intéressé aux séquelles neurologiques de ces patients qui faisaient des intoxications au CO et a essayé de trouver quels étaient les prédicteurs de ces séquelles retrouvées à 2 jours et à 2 ans. Les chercheurs ont montré très clairement que sur un effectif de 70 patients qui avaient été suivis en rétrospectif, des séquelles neurologiques, des manifestations à type de convulsions, d’apraxie, d’amnésie, d’agnosie, de parkinsonisme, ou même de cécité corticale, étaient plus souvent retrouvées non pas en fonction du taux d’HBCO qui serait plus élevé, mais en fonction de l’examen clinique initial qui est pathologique, avec les examens cliniques neurologiques. On retiendra donc très clairement, qu’en présence d’une intoxication au CO à l’urgence, dès lors qu’il y a des troubles neurologiques, il faut probablement adresser ces patients à une consultation de neurologie parce qu’ils sont à haut risque d’avoir des séquelles et des manifestations neurologiques secondaires.

Le mode d’oxygénation

Le deuxième papier [2] s’est intéressé au mode d’oxygénation des patients. Bien entendu, étaient exclus de l’étude les patients très graves, et comme on le fait classiquement en France, ont été orientés vers du caisson hyperbare les patients qui avaient des troubles de conscience et les femmes enceintes. Donc cette recherche s’est intéressé principalement aux patients qui étaient vus à l’urgence et qui, en France, ont tendance à être mis sous oxygène pendant une durée d’environ 6 heures. Le but de l’étude était de savoir si proposer une continuous positive airway pressure (CPAOP) à ces patients versus un masque à haute concentration, permettait de réduire le temps à l’urgence et d’améliorer à la fois l’HBCO et la symptomatologie. Les chercheurs ont suivi deux groupes de patients et il en ressort qu’il pourrait être intéressant de continuer les recherches autour de la CPAP, puisque dans leur cohorte, très clairement, il y avait une amélioration du taux d’HBCO beaucoup plus rapide pour le groupe de patients qui étaient mis sous CPAP versus les patients qui avaient un masque à haute concentration. Il est important de préciser que c’était quand même, malgré tout, des niveaux de CPAP qui étaient très élevés (12 centimètres d’eau), ce qui est parfois assez difficile à supporter pour nos patients ; et c’étaient des CPAP externes, de type Boussignac, qui étaient utilisés dans l’étude.

Le deuxième point était de regarder s’il y avait une amélioration plus rapide des symptômes, et en particulier est-ce que les patients avaient souvent des nausées, des céphalées quelques troubles, quelques vertiges. Là aussi, a priori, la CPAP faisait mieux et plus rapide [en termes] d’amélioration de ces symptômes dans ce groupe de patients. C’est donc probablement une technique intéressante à l’urgence lorsqu’on reçoit par exemple toute une famille qui a été confinée et qui fait une intox au CO lorsqu’on a plein de patients au milieu de ces urgences, et qui nécessitent d’avoir une oxygénothérapie prolongée. Peut-être que d’avoir des systèmes annexes comme de la CPAP permettrait de réduire le délai à l’urgence et d’améliorer plus rapidement la symptomatologie.

Voilà, je vous souhaite beaucoup de courage à tous pour gérer cette crise du COVID et je vous dis à bientôt sur Medscape. »

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