Nombre de cas, dépistage, prise en charge à domicile, masques et désinfectants : point de situation en France

Caroline Guignot

9 mars 2020

France  – Le décompte international des cas d’infection liée au nouveau coronavirus est de 110 041 cas confirmés ce lundi 9 mars au matin, dont 29 306 concernent 107 pays hors de Chine. Le nombre de personnes guéries est de 62 000 et celui des décès de 3 825. Les principaux pays touchés, outre la Chine, sont aujourd’hui l’Italie et la Corée du Sud, qui comptabilisent tous deux près de 7 400 personnes touchées, ainsi que l’Iran. En Europe, la France est le second pays en termes de fréquence des cas confirmés. Le dernier décompte réalisé le 8 mars 15 heures par Santé Publique France indiquait un total de 1 126 cas d’infection par le Covid-19 dont 19 patients sont décédés. Selon le point détaillé réalisé la veille par le directeur de la Direction générale de la santé, Jérôme Salomon, lorsque 949 cas confirmés étaient alors comptabilisés (dont 45 en réanimation, 16 décès et 12 guérisons), les régions principalement touchées sont les régions Grand-Est, Hauts-de-France, Bourgogne-Franche Comté et Auvergne-Rhône-Alpes. Les 16 décès enregistrés étaient principalement des hommes (n=11), majoritairement âgés de plus de 70 ans et atteints de comorbidités.

Si la France reste au stade 2 de l’épidémie, elle a pris de nouvelles mesures : fermeture des crèches, écoles, collèges et lycées pour une durée de 15 jours en Haut-Rhin, Oise et à Ajaccio, interdiction des rassemblements dans les territoires les plus touchés, restriction des visites aux personnes hospitalisées et institutionnalisées et, depuis hier, interdiction de tous les rassemblements de plus de 1 000 personnes sur l’ensemble du territoire (hors concours, manifestations, transports en commun).

En Europe, la France est le second pays en termes de fréquence des cas confirmés.

Restriction des visites, Plans blancs et bleus enclenchés

Le 6 mars, le Ministre de la Santé, Olivier Véran a indiqué que les récentes évolutions épidémiologiques liées au Covid-19 imposaient que tous les établissements de santé déclenchent leur plan de mobilisation interne, correspondant au niveau 1 de leur Plan blanc (plan de gestion des tensions hospitalières et des situations sanitaires exceptionnelles). Selon la situation locale, le déclenchement du niveau 2 du Plan blanc pourra être nécessaire. D’ores et déjà, les visites doivent être limitées à une seule personne, avec interdiction des visites par des personnes mineures ou présentant des symptômes.  Un décret déplafonnant les heures supplémentaires pour les professionnels de santé de l’hôpital va également être publié pour assurer la continuité des soins.

De même, les établissements du secteur médico-social, notamment les Ehpad, sont invités à mettre en place des mesures de restriction, les visites aux résidents étant fortement déconseillées, et interdites aux personnes symptomatiques. Des consignes concernant les gestes barrières à mettre en application, l’information des personnels, résidents et visiteurs, l’utilisation des masques, la venue des publics, le nettoyage des locaux... ont été synthétisées. Il est ainsi fortement recommandé d’interdire les visites aux mineurs. Les établissements médico-sociaux ont aussi été invités à enclencher la mise sous tension du Plan bleu qui leur permet de faire face aux événements inhabituels ou graves. Il comprend des mobilisations particulières dans le champ de l’hygiène, dans la lutte contre le risque d’isolement, l’augmentation potentielle en personnel et l’adaptation d’un plan de continuité d’activité.

Ces informations ont été diffusées par courrier de la DGS .

Le dépistage n’est plus systématique dans les régions les plus touchées

Le 6 mars, Olivier Véran indiquait que l’obligation systématique de tester tous les cas suspects est désormais levée pour les régions où la circulation du virus est très active. Le directeur de la DGS, Jérôme Salomon, a justifié cette décision par le fait que la plupart des personnes infectées par le virus sont peu symptomatiques et ne consultent pas. Il est donc illusoire d’imaginer contenir la diffusion du virus dès lors qu’il circule déjà très activement. En revanche, les tests restent indiqués dans toutes les formes graves ou sévères, chez les personnes accueillies à l’hôpital pour des symptômes suspects ainsi que pour ceux qui y seraient accueillis pour un autre motif tout en présentant des signes évocateurs comme une toux, par exemple. Les tests restent aussi utiles pour les regroupements de cas et la recherche des cas contacts.

Il est illusoire d’imaginer contenir la diffusion du virus dès lors qu’il circule déjà très activement.

Prise en charge en ville : quelle organisation ? 

Autre évolution du dispositif : afin d’éviter la saturation des capacités d’hospitalisation liée à la prise en charge des patients « cas confirmés Covid-19 », les agences régionales de santé (ARS) ont désormais la possibilité de mettre en place une organisation de la prise en charge à domicile des patients ne présentant pas de critères de gravité, de comorbidités ou un motif d’hospitalisation différent de la pathologie Covid-19, en lien avec les médecins généralistes et les acteurs du domicile. Cette filière ambulatoire peut notamment s’appuyer « sur un recours élargi à la télémédecine » a précisé le ministre.  A ce titre, en écho aux attentes du président du Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom) Patrick Bouet, le décret relatif aux conditions de réalisation de la télémédecine  a été assoupli ce jour afin notamment de levée l’obligation de passer par son médecin traitant et d’avoir eu une consultation présentielle dans les 12 mois précédant la consultation à distance. 

Parallèlement, la CSMF insiste pour une « mise en place coordonnée et régulée d'équipes mobiles de médecins et de professionnels de santé volontaires qui se rendront au domicile des patients potentiellement infectés pour les prendre en charge, effectuer le diagnostic et leur assurer les soins nécessaires ». Olivier Véran doit à ce sujet recevoir les représentants des organisations médicales libérales ce lundi 9 mars.

Le décret relatif aux conditions de réalisation de la télémédecine a été assoupli ce jour.

Pour l’heure, une fiche résumant les principes de la prise en charge ambulatoire des cas confirmés est diffusée par le ministère. Elle rappelle que la décision doit être prise au cours d’une consultation débutant par « un temps d’information sur la pathologie et sur les mesures barrières à mettre en œuvre » et avec l’accord du patient, après s’être assuré que les critères cliniques (absence de certaines comorbidités, présentation clinique) et organisationnels (pièce dédiée, hygiène, accès aux moyens de s’alimenter et communiquer,...) présentés dans le document, ainsi que le suivi (stabilité respiratoire, état général…) soient assurés durant la « période symptomatique par le médecin (libéral ou hospitalier) au cours de consultations conventionnelles, appels téléphoniques ou lors de téléconsultations ». « Une attention toute particulière doit être apportée à la consultation du début de la deuxième semaine, période où l’on peut constater une aggravation des patients ».

Une attention toute particulière doit être apportée à la consultation du début de la deuxième semaine, période où l’on peut constater une aggravation des patients.

La problématique des masques, la grogne des libéraux dans son sillage

Avec la prise en charge ambulatoire des cas confirmés, les questions relatives à la disponibilité des masques sont à nouveau soulevées. Pour rappel, le port de masque de type chirurgical doit être systématique pour les patients en cas de contact avec une autre personne. Les médecins libéraux doivent, selon les principes de la prise en charge ambulatoire , porter un masque chirurgical et des lunettes en cas de prise en charge d’un patient.

La distribution de 15 millions de masques chirurgicaux issus des stocks de la réserve nationale décidée le 27 février et la réquisition par décret de l'ensemble des stocks et des masques en cours de production sur l'ensemble du territoire national en vigueur depuis le 4 mars ne suffisent pas à calmer les inquiétudes. Il faut dire que la tension concernant ces approvisionnements tient notamment au retard de réaction des pouvoirs publics , selon les fabricants eux-mêmes.

La mise à disposition de masques chirurgicaux et non de haut niveau de protection FFP2 pose notamment question. Si les pouvoirs publics ont souligné que les deux types de masques ont scientifiquement été décrits comme équivalents dans la prise en charge de la grippe, plusieurs organisations professionnelles ont émis des critiques à ce sujet : l' UFMLS a indiqué dans un communiqué que la protection des soignants «  ne saurait être appuyée par une étude basée sur l'efficacité des masques de modèle américain sur le virus de la grippe, sous une méthodologie qui induit des biais incompatibles avec une certitude » . Il rapporte également que les remontées de terrain signalent la dotation par l'Etat de masques périmés, et l'impossibilité de fournir des masques aux patients, les pharmaciens n'en disposant plus. Une inquiétude partagée également par la CSMF , qui insiste pour que «  les professionnels de santé effectuant des gestes invasifs en particulier sur la sphère oropharyngée puissent bénéficier de masques filtrants de protection de type FFP2 aujourd'hui réservés aux seuls personnels hospitaliers formés excluant de fait les médecins spécialistes libéraux  », et par le SML   qui «  réclame que ces masques, dont l’usage est réservé aux professionnels hospitaliers, soient également distribués en ville aux médecins libéraux, toutes spécialités confondues. Nombre d’entre eux en ont besoin afin de pouvoir réaliser des actes invasifs dans les meilleures conditions de sécurité. » Ce dernier regrette dans le même temps «   des difficultés [que les médecins libéraux] rencontrent pour avoir accès à une information claire et concise, immédiatement exploitable dans leur pratique »  (Lire aussi Covid-19 : les médecins ne sont pas assez protégés).

Les pharmaciens peuvent préparer des solutions hydro-alcooliques

Un arrêté publié le 6 mars 2020   permet désormais que les solutions hydro-alcooliques destinées à l'hygiène humaine soient préparées, en cas de rupture de leur approvisionnement, par les pharmaciens d'officine et de pharmacies à usage intérieur, et ce jusqu’au 31 mai. Le conseil de l’ordre des pharmaciens publie sur son site les conditions de préparation recommandées par l’OMS. Un décret précisant les prix maximums de vente des différents conditionnements des solutions hydroalcooliques et les tarifs maximums devant être appliqués par les laboratoires à destination des revendeurs a également été publié.

 

Cet article a été publié initialement sur Univadis.fr sous l’intitulé : Coronavirus : Plans blancs et bleus activés, les professionnels de ville mobilisés

 

 

 

 

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