Saint-Denis, France — Dans un point d’information, l’ANSM rappelle qu’il est primordial d’être particulièrement attentifs aux signes évocateurs d’angioedème bradykinique d’origine médicamenteuse lors de la prise d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) d’antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) ou des gliptines [1].
Les angioedèmes bradykiniques d’origine médicamenteuse sont dus à l’inhibition d’enzymes qui dégradent la bradykinine, en particulier: l’enzyme de conversion pour les IEC ou les ARA II (sartans) et la dipeptidylpeptidase pour les gliptines.
Un diagnostic difficile ; des conséquences qui peuvent être graves
Le diagnostic d'angioedème bradykinique sous IEC ou sartan est difficile à faire car les délais d’apparition vont de quelques heures à plusieurs années après le début du traitement.
Aussi, il évolue par crises qui peuvent devenir de plus en plus fréquentes et/ou de plus en plus sévères, avec toujours une prédilection pour le secteur ORL, mais qui peuvent varier de sites. Chez certains patients, une récidive est possible dans les 6 mois suivant l’arrêt de l’IEC ou du sartan, ce qui peut compliquer le diagnostic.
L’agence du médicament souligne qu’il n'existe à ce jour aucun moyen diagnostic biologique rapide pour les identifier.
Elle ajoute que ces angioedèmes (AE) peuvent avoir des conséquences graves, qu’ils sont « imprévisibles » et à « plus à haut risque d’asphyxie en cas de localisation laryngée ».
Elle note que l’association d’un IEC ou d’un sartan avec une gliptine augmente le risque de faire un AE bradykinique.
Au final, « l’apparition d’un angioedème bradykinique chez un patient traité par IEC ou ARA II doit donc conduire à l’arrêt immédiat du médicament et à sa contre-indication à vie ».
Présentation clinique et traitement
Ces angioedèmes se présentent le plus souvent sous forme d’œdèmes de l'hypoderme, non prurigineux, d’apparition brutale, localisés principalement au niveau du visage, de la langue ou des voies aériennes supérieures (30% d'atteinte laryngée si AE de la face).
Les symptômes durent quelques heures à quelques jours. Ils débutent le plus souvent par une odynophagie et une dysphonie. La dyspnée aiguë peut s'installer rapidement conduisant à un décès par asphyxie dans 25 % des cas en l'absence de traitement spécifique.
L’AE bradykinique est le diagnostic différentiel l’angioedème IgE médié. Il est beaucoup moins fréquent, plus déformant. Il peut aussi être localisé à la muqueuse digestive et se présenter sous forme de douleurs abdominales d’intensité variée.
A la différence de l’AE par histaminolibération, il régresse spontanément malgré la poursuite du médicament en cause, ce qui conduit souvent à ne pas évoquer l’hypothèse médicamenteuse. Contrairement aux formes héréditaires ou acquises d’angioedèmes bradykiniques, les taux de C1 inhibiteur (pondéral ou fonctionnel) et de C4 sont normaux [1].
Ces œdèmes sont résistants au traitement par antihistaminiques ou corticoïdes et peu sensibles à l'adrénaline. Le traitement spécifique passe par l'injection d'icatibant (Firasyr®), un antagoniste des récepteurs B2 de la bradykinine qui s'administre par voie sous-cutanée à la dose de 30 mg.
Malgré l'absence de déficit en C1 inhibiteur – cause principale des angioedèmes bradykiniques non liés à l'utilisation des IEC – un traitement substitutif par concentrés de C1 inhibiteur est instauré systématiquement en cas d'œdème médicamenteux.
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Citer cet article: IEC, ARAII et gliptines : penser à l’angioedème bradykinique - Medscape - 22 nov 2019.
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