Enregistré le 17 septembre 2019, à Barcelone, Espagne
La présentation de CREDENCE à EASD, et la publication simultanée d’une méta-analyse sur les gliflozines, démontrent la possibilité de différer le déclin de la fonction rénale chez les diabétiques à très haut risque CV et rénal. Explications de Ronan Roussel.
TRANSCRIPTION
Bonjour, je suis Ronan Roussel, professeur de médecine à l’Université de Paris et chef de service de diabétologie à l’Hôpital Bichat, à Paris. Nous sommes à l’EASD, à Barcelone. En début de congrès il y eu une présentation avec des données complémentaires de CREDENCE, une étude de protection rénale et cardiovasculaire (CV) associée avec un inhibiteur de SGLT2, la canagliflozine, chez une population à très haut risque à la fois rénal et CV.
La première présentation date d’il y a déjà quelques mois chez les néphrologues à l’ASN. Elle a été à nouveau faite à l’ADA et complétée ici à l’EASD [1], dans un contexte qui est celui d’une autre publication qui est une méta-analyse.
CREDENCE est un essai comparant la canagliflozine à un placebo chez des patients à très haut risque rénal et CV, et la démonstration d’une protection d’environ un tiers du critère principal, qui était un critère composite rénal, avec notamment le doublement de la créatinine ou l’arrivée en dialyse ou en mort d’origine rénale. Donc une protection qui est une démonstration, puisqu’il s’agit du critère primaire, alors qu’on avait déjà une suspicion d’un tel bénéfice avec les résultats des études antérieures – l’empagliflozine dans EMPA-REG, la dapagliflozine notamment dans DECLARE, et la canagliflozine dans CANVAS qui est un essai cette fois-ci purement de sécurité CV. Il s’agissait donc, dans toutes ces études, de critères secondaires. CREDENCE assoit d’une part la canagliflozine, la molécule testée, mais également les autres par un effet de classe qui est relativement admis pour ce critère de jugement, la protection rénale, qui va permettre de combler un besoin thérapeutique qui est certain, qui est celui des patients diabétiques de type 2 qui ont une fonction rénale déclinante et souvent, associé à cela, une protéinurie qui reste importante malgré les traitements bien conduits, c’est-à-dire le contrôle glycémique, le contrôle de la pression artérielle et le mono-blocage par IEC ou ARA-2 du système rénine-angiotensine et qui, malgré cela, restent des patients progresseurs avec une pente de déclin de la fonction rénale qui permet, en général, de prédire malheureusement l’arrivée en dialyse à un terme qui est relativement court, de quelques années. On a donc là vraiment la démonstration, avec un haut niveau de preuve, de la possibilité de différer cela, et sans doute, puisqu’il y a toujours une hétérogénéité de réponse pour certains patients à faible niveau de protéinurie, de stabiliser le déclin de la fonction rénale.
C’est un contexte particulier, puisque simultanément dans Lancet Diabetes & Endocrinology, une méta-analyse vient d’être publiée – c’est très à la mode, chaque nouvelle étude va générer quelques méta-analyses complémentaires, ce n’est pas toujours passionnant puisque cela enfonce bien souvent des portes ouvertes. Cela dit, cette méta-analyse publiée par Neuen et al. a un intérêt particulier puisqu’elle s’intéresse au critère le plus grave, donc qui était secondaire dans toutes ces études, le plus grave au niveau rénal, puisqu’il s’agit de l’arrivée en dialyse. À vrai dire, c’est un critère composite : arrivée en dialyse ou transplantation ou mort d’origine rénale. Et c’est l’arrivée en dialyse qui est l’élément majeur dans ce critère composite. À nouveau, comme on s’y attend, il y a une réduction d’environ un tiers du risque de survenue de ce critère principal qui est la mort du rein d’une façon ou d’une autre, avec une réponse relativement homogène à travers les différentes molécules qui ont fait l’objet de publications dans cette classe des inhibiteurs de SGLT2. C’est un résultat absolument majeur qui est issu de ces études puisque, certes, c’est un événement qui n’est pas si fréquent que cela, mais qui est évidemment gravissime, à la fois pour le patient — cela altère considérablement sa qualité de vie — mais également financièrement. C’est en effet un coût extrêmement élevé, qui va selon les pays de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de milliers de dollars ou d’euros de prise en charge par an pour ces patients en dialyse, avec un nombre de sujets à traiter — c’est toujours un élément intéressant à prendre en considération — sur cinq ans d’environ une trentaine, entre 30 et 40 patients.
Si on rappelle la définition des patients : ce sont des patients à haut risque CV et rénal qui ont été inclus dans ces études. CREDENCE, ce n’est pas spécialement à haut risque rénal, mais dans l’ensemble des études à haut risque vasculaire, c’est une population relativement large chez qui on va éviter ces événements de façon tout à fait pertinente. La méta-analyse regroupe beaucoup de patients et permet donc de regarder la tendance en fonction de la filtration glomérulaire de départ. Évidemment, plus vous partez de bas de filtration glomérulaire, plus vous êtes à risque élevé d’arriver en dialyse dans les années qui suivent. Il est intéressant de voir que l’inhibition du SGLT2 maintient une protection même dans les catégories d’EGFR, de filtration glomérulaire, les plus basses, de l’ordre de 30–45, avec peut-être une petite atténuation de l’effet — on reste plutôt dans les 27 % à 30 % de réduction du risque par rapport à un tiers du risque globalement. Petite réduction du risque relatif sur une population à très haut risque absolu, et donc beaucoup de pertinence aussi dans cette population.
C’est un médicament sur lequel les cardiologues se penchaient déjà avec beaucoup d’intérêt de par son effet dans l’insuffisance cardiaque. Il est clair que les néphrologues vont également s’approprier ce médicament, et ce sera sans doute pour le plus grand bien des patients. La suite, ce sera les autres études qui sont en cours avec ce type de traitement, notamment VERTIS avec l’ertugliflozine, qui est encore une autre molécule de cette classe, qui permettra de renforcer le clou, même si cette étude est sur la sécurité CV.
Merci de votre attention.
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Citer cet article: Confirmation de la protection rénale des inhibiteurs de SGLT2 chez les diabétiques - Medscape - 25 sept 2019.
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