Paris, France – Certaines études sont moins classiques que d’autres : celle-ci en fait partie. Une équipe indienne a montré que la pratique du yoga et d’exercices de respiration (pranayama) pendant 3 mois après un infarctus du myocarde peut améliorer la FEVG et réduire les taux de mortalité à 5 ans. Ces résultats ont fait l’objet d’un abstract présenté au congrès de l’European Society of Cardiology 2019 et sont commentés pour Medscape édition française par le Pr Atul Pathak (Clinique Pasteur, Toulouse) [1].
Une étude sur 2470 patients
Y-a-t-il un lien entre la fraction d’éjection après angioplastie pour infarctus du myocarde ST+ (STEMI) et la mortalité à 5 ans ? La pratique du yoga et de la méditation peut-elle améliorer une valeur objective telle que la fraction d’éjection de patients après une angioplastie ? Pour répondre à ces 2 questions, le Pr Naresh Sen (HG SMS hospital, Jaipur, Inde) et son équipe ont mené une étude sur 2470 patients (entre 25 et 68 ans) ayant bénéficié d’une angioplastie après STEMI dans 3 centres entre 2010 et 2012. Les patients ont été divisés en 2 groupes, l’un faisait des exercices de yoga et de respiration pranayama (n=1470) tandis que l’autre a constitué un groupe contrôle (n=1000). « Les patients du group yoga ont suivi pendant trois mois un programme quotidien de yoga nouveau et élaboré spécifiquement pour les patients cardiaques, comprenant du yoga et de la méditation en matinée et une série d’exercices de respiration en soirée » a expliqué le Pr Sen au journal Congress News[2].
Augmentation de la FEVG de 11% versus 4%
Premier résultat, parmi les patients STEMI, les chercheurs ont noté une relation inverse graduée entre la catégorie de fraction d’éjection mesurée au temps index d’hospitalisation (FA =34%, entre 35 et 45%, entre 46 à 54%, et =55%) et la mortalité à 5 ans. Mais, ils ont aussi montré que les taux de mortalité à 5 ans associés à ces différentes catégories de fraction d’éjection étaient, respectivement, de 21% ;14,3% ;12,2% et 11% dans le groupe yoga/pranayama versus 25% ;17,5% ;14,4% et 13% dans le groupe contrôle (p<0,004). La fraction d’éjection ventriculaire gauche a donc été augmentée dans le groupe yoga/pranayama de 11% + 3% versus 4% + 1% dans le groupe contrôle.
Parmi les mécanismes potentiels pour expliquer les effets du yoga et de la respiration (pranayama), le Pr Sen évoque « la réduction de la pression dans la circulation pulmonaire et coronaire, un remodelage moindre du ventricule gauche, un meilleur approvisionnement en oxygène dans le sang et une altération endothéliale réduite des vaisseaux coronaires avec une libération moindre de médiateurs inflammatoires, comme les interleukines et la protéine C réactive » [2]. Si les auteurs notent qu’une FEVG basse après angioplastie reste un facteur de risque important de mortalité post-hospitalisation, même après ajustements sur les caractéristiques du patient, une pratique régulière du yoga et de la respiration pranayama sont susceptibles de réduire la mortalité après un infarctus du myocarde.
Une ré-organisation de la balance sympatho-vagale

Pr Atul Pathak
Invité par Medscape édition française à apporter un commentaire, le Pr Atul Pathak a jugé cet abstract très intéressant. Selon lui, la force de cet abstract réside dans le nombre de patients – plus de 2 000 – et le fait que le critère d’évaluation est objectif – ni de la qualité de vie, ni du ressenti – mais de la variation de la fraction d’éjection. « Il y a donc un vrai intérêt car cette étude évalue de façon factuelle le bénéfice de ce type d’intervention ».
Pourquoi ça marche ? « Les exercices respiratoires que l’on propose avec le yoga sont des exercices au cours desquels la fréquence respiratoire permet d’activer le système vague, le système protecteur, le système parasympathique et de mettre au repos le système sympathique. Cette ré-organisation de la balance sympatho-vagale est probablement une explication à ce bénéfice clinique » considère le Pr Pathak.
Quelles sont les limites méthodologiques que pose les études qui ont évalué jusqu’à présent l’effet du yoga et de la méditation, et dont les résultats sont souvent positifs ? Le cardiologue toulousain en voit au moins trois : « quel est le bras contrôle du bras placebo ? Qui est le patient qui est inclus dans ces études car il est difficile de faire abstraction de ceux qui ont déjà fait du yoga et qui ont des pratiques qui s’apparentent au yoga ? Quid du biais induit par l’expérience et la qualité de l’instructeur ». Des points qu’il faudra résoudre si l’on veut promouvoir ce type de pratique.
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Citer cet article: Post-infarctus : la pratique du yoga et de la respiration améliore la FEVG - Medscape - 3 sept 2019.
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