Mexico, Mexique – Aujourd'hui l'espérance de vie des patients atteint du VIH sous antirétroviraux (ART) approche celle de la population générale. En revanche, les co-morbidités liées à l'âge (maladies cardiaques, diabète, ostéoporose etc.) deviennent ou redeviennent une préoccupation importante. La population de patients âgés VIH+ peut-elle pour autant avoir une vieillesse heureuse en considérant ce risque accru ? C’est à cette question qu’a tenté de répondre le Dr Andrew Carr (St Vincent's Hospital, Sydney) lors du congrès de l’International Aids Society (IAS) consacré au VIH/Sida qui s’est tenu à Mexico en juillet dernier [1]. On constate en effet que la mortalité chez le patient VIH+ traité avec succès, dépend peu de son traitement, mais est fortement associée aux facteurs de risque classiques et au mode de vie.
25% de patients VIH + sous traitement ont plus de 50 ans
Entre 2000 et 2015, le pourcentage de patients VIH + de plus de 50 ans sous traitement est passé de 8 à 25%. Cette augmentation résulte surtout du fait que les personnes diagnostiquées et traitées avant 50 ans vivent plus longtemps mais aussi du fait que la proportion de personnes diagnostiquées après 50 ans et traitées est plus importante. Les personnes VIH+ qui ont le pronostic le plus défavorable sont celles diagnostiquées tardivement avec une infection à un stade déjà avancé au moment du diagnostic, des taux bas de cellules CD4 ou qui ont nécessité plusieurs lignes de traitement.
Plus de risque de co-morbidités
Cette population peut-elle avoir une vieillesse heureuse considérant le risque accru de maladies cardiovasculaires (+50% d'infarctus aigu du myocarde), de diabète (20% des patients VIH+), d'ostéoporose et de risque fracturaire, d'insuffisances rénale et hépatique, de cancer (+8%) et de maladies mentales ? La réponse n'est pas évidente. Les données épidémiologiques de surveillance sont parcellaires pour les plus de 50 ans VIH+. Les raisons sont peut-être que les cliniciens sont moins formés aux besoins spécifiques de ces patients ou qu’ils sont diagnostiqués après que leur état de santé se soit dégradé pour d'autres raisons. Chez ces plus de 50 ans, les co-morbidités pourront, en effet, être plus sévères et les effets secondaires du traitement plus difficiles à gérer que chez des patients plus jeunes.
Comment gérer les co-morbidités ?
Les co-morbidités les plus fréquentes sont l'infarctus du myocarde, l'AVC, le diabète, les troubles rénaux et hépatiques, l'ostéoporose, les dyslipidémies, un cancer, une BPCO. Elles sont déjà difficiles à gérer en général, elles le sont encore plus chez des patients sous ART, avec un système immunitaire affaibli, polymédiqués et très souvent fumeurs (70%).
Dans ce contexte, le patient doit être vu plus fréquemment, son ART doit être adapté en fonction de ses co-morbidités et des médicaments associés pour éviter toute interaction préjudiciable. Un exemple est l'usage de l'abacavir dont on sait qu'il entraîne un risque accru d'infarctus aigu du myocarde autant chez l'adulte dans la quarantaine qu'au-delà de 50 ans, sachant qu'une alternative existe sous la forme du tenofovir alafenamide/emtricitabine (TAF-FTC).
Un autre exemple est celui du patient en surpoids (1,9 milliard d'adultes en 2016 soit 39% de la population mondiale) ou obèse (650 millions soit 13% de la population mondiale) à risque accru de maladies cardiovasculaires, de diabète, d'arthrose, etc. Chez ces patients, le choix du traitement antirétroviral doit être réfléchi sachant que certains ART peuvent entraîner une prise de poids. Chez le patient avec une insuffisance rénale chronique, la recommandation est de garder le débit de filtration glomérulaire (DFG) > 60 ml/min/1,73m², et on sait qu'une substitution du tenofovir (TDF) par le ténofovir alafenamide (TAF) améliore la fonction rénale. Le traitement antirétroviral peut également diminuer la densité minérale osseuse (DMO) et augmenter le risque de fractures comme cela a été montré avec le TDF. Pour suivre le patient, l'outil FRAX (Fracture Risk Assessment Tool) est recommandé.
5 clés de la prise en charge
L'OMS a publié des recommandations sur la prise en charge du patient VIH+ vieillissant dans les régions à revenus faibles ou modérés. Les actions proposées sont focalisées sur la consommation de graisses, du sel, du sucre, le tabagisme et l'alcool. Ces facteurs de risque doivent être absolument contrôlées chez des patients VIH + âgés.
La prise en charge doit être repensée avec :
un suivi cardiaque et métabolique plus fréquent,
un ajustement de l’ART pour éviter des sur-risques dus aux co-morbidités ou aux interactions médicamenteuses,
l'arrêt du tabagisme,
un bilan de la santé mentale (anxiété, dépression),
un contrôle de l'adhérence au ART et, si nécessaire, des conseils pour l'améliorer.
Cet article a été publié sur MediQuality le 23 août 2019.
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Citer cet article: VIH/Sida : comment vieillir à moindre risque sous ART ? - Medscape - 29 août 2019.
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