France -- Alors que les urgences vivent une crise sans précédent, les médecins urgentistes font eux aussi entendre leur voix. Après les revendications du collectif Inter-Urgences, principalement composé de personnels paramédicaux, l’Association des Médecins Urgentistes de France (AMUF) se manifeste à son tour et fait valoir ses « solutions » pour éviter l’hémorragie d’urgentistes. Dans un communiqué en date du 9 août, l’AMUF réclame la hausse de l’indemnité de garde des praticiens hospitaliers, l’octroi systématique de la prime d’activité multisites et le retour de la Capacité de Médecine d’Urgence.
Départ dans le privé et abandon de la spécialité de médecine d’urgence
« De nombreux collègues démissionnent pour partir dans le privé, abandonnent la spécialité de médecine d’urgence ou encore diminuent leur temps de travail pour échapper au rythme infernal de travail imposé à l’hôpital dans un contexte de pénibilité accrue, notamment liée aux hospitalisations brancards du fait du manque de lits dans l’hôpital » écrit l’AMUF en préambule du communiqué. Après avoir dressé un constat assez sombre, mais désormais sans surprise, de la situation actuelle qualifiée de « catastrophique », l’association d’urgentistes, dirigée par le Dr Patrick Pelloux, avance ses solutions.
Alignement avec les tarifs de l’intérim
Qui sont d’abord et essentiellement d’ordre financier. Il s’agit avant tout de revaloriser les tarifs de gardes en faisant passer les praticiens hospitaliers de 265 euros d’indemnité à 480 (tarif des PH universitaires). C’est pour l’AMUF un moyen d’éviter que les urgentistes passent à temps partiel et complètent leur salaires avec de l’intérim. Bref, à payer des tarifs d’intérim, autant les payer aux médecins en postes ce qui permettra de les fidéliser.
Car l’AMUF l’affirme, « la Ministre de la santé se trompe en stigmatisant l’intérim. La réalité est que les collègues qui ont quitté l’hôpital public ou y ont diminué leur temps de travail n’utilisent, pour la très grande majorité d’entre eux, l’intérim que pour compléter leur rémunération tout en maîtrisant leur temps de travail ».
Octroi systématique d’une prime d’activité multisites
Un constat qui s’applique plus particulièrement aux centres hospitaliers généraux (il semble en effet que les CHU et en particulier l’AP-HP soient relativement à l’abri pour l’instant). A en croire l’AMUF : « le choix des ARS de fermer les structures de proximité du fait du manque d’effectifs, pour regrouper les moyens sur un nombre de sites limités dans les grandes villes est complètement contre-productif et aggrave même la situation », l’association constate, en effet, que « ces hôpitaux sont surchargés et les conditions de travail sont souvent pire que dans les urgences qui ont fermées et les praticiens s’en vont. »
C’est pourquoi, l’AMUF demande, en prévision de la généralisation des équipes territoriales avec la mise en place des groupements hospitaliers territoriaux (GHT), « l’octroi systématique de la prime d’activité multisites dont le montant est d’un peu plus de 400 euros ».
Rétablissement de la Capacité de Médicine d’Urgence
L’autre piste proposée par l’AMUF, et qui va faire pousser des cris d’orfraie dans le milieu des urgentistes, c’est le rétablissement d’une voie annexe de formation, la Capacité de Médicine d’Urgence qui n’est plus intégrable depuis 2018. Cette formation ouverte aux généralistes a permis de former les plus anciens des urgentistes encore sur le terrain (et nombre de leurs confrères étrangers), avant d’être remplacée par le DESC de Médecine d’urgence de 4 semestres avec des stages qui est aujourd'hui le principal diplôme des urgentistes.
Or, depuis 2017, la seule formation possible est de DES de médecine d’urgence ; formation qui n’a pas encore, quoi qu’en disent certains, une véritable attractivité auprès des jeunes internes. Preuve en est le rang de choix et le taux de droit au remord qui serait proche de 20 %.
Rétablir une formation sans stage – qui était principalement choisie par des médecins étrangers – est-ce une si bonne idée que propose l’AMUF ? Ne peut-on pas y voir une option qui va encore accroitre les différences entre praticiens hospitaliers, praticiens hospitaliers contractuels, praticiens hospitaliers attachés, médecins étrangers en formation les anciens internes, les faisant fonction d’internes, les généralistes attachés…
Les listes de gardes seront-elles plus complètes pour autant. Pas sûr.
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Citer cet article: Crise des Urgences : les médecins montent à leur tour au créneau - Medscape - 16 août 2019.
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