Cancer du poumon NAPC : record de survie historique avec le pembrolizumab

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

4 juin 2019

Chicago, Etats-Unis -- Le pembrolizumab (Keytruda®, Merck), immunothérapie non-encore disponible en France, augmente considérablement la survie globale des patients atteints de cancer du poumon non à petites cellules à un stade avancé, selon les données à cinq ans de l’essai clinique de phase Ib KEYNOTE-001 présentées au  congrès de l'ASCO 2019 et publiées simultanément dans le Journal of Clinical Oncology[] 1,2].

Plus précisément, 23,2% des personnes naïves de traitement et 15,5% des patients ayant déjà été traités par chimiothérapie étaient en vie au bout de cinq ans, le bénéfice le plus important étant observé chez les patients dont l'expression du biomarqueur PD-L1 était plus élevée.

Pour rappel, sans pembrolizumab le cancer du poumon NAPC est associé à un très mauvais pronostic avec un taux de survie à 5 ans de 5,5% en moyenne.

« Ces données sont similaires à ce que nous avons vu dans d'autres cancers traités par immunothérapie en ce sens qu'il existe une population de patients pouvant vivre cinq ans ou plus. Cependant, nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir pour améliorer les résultats pour tous les patients atteints de CPNPC avancé. Nous attendons avec intérêt de nouvelles recherches pour nous aider à déterminer comment identifier ces patients », a déclaré le Dr David L. Graham, expert de l'ASCO, lors de la présentation des résultats à la presse.

Dr Edward B. Garon

 « Le fait que des patients participant à cet essai soient encore en vie après 7 ans est assez remarquable. Et les données montrent que la plupart des patients qui se portent bien après deux ans de traitement par pembrolizumab vivent cinq ans ou plus », a commenté pour sa part le Dr Edward B. Garon, auteur principal de l'étude (UCLA, Los Angeles, Etats-Unis).

Une survie globale considérablement augmentée

L’essai KEYNOTE-001 a inclus 550 personnes atteintes d’un cancer du poumon non à petites cellules dont 101 patients naïfs de traitement et 449 patients qui avaient reçu un traitement antérieur. A l’origine, tous les patients ont reçu 2 mg / kg de pembrolizumab toutes les 3 semaines ou 10 mg / kg toutes les deux ou trois semaines. Toutefois, au cours des dernières années, le protocole a été remplacé par une dose unique de 200 mg/3 semaines, quel que soit le poids.

Les patients ont été suivis pendant une durée médiane de 60,6 mois, environ 5 ans. À ce stade, 18% des participants (n=100) étaient encore en vie. Parmi ceux naïfs de traitement, 23% étaient toujours en vie après 5 ans, contre 15,5% de ceux précédemment traités.

Parmi les personnes recevant du pembrolizumab après avoir suivi un traitement antérieur, 42% avaient une réponse médiane de 16,8 mois. Pour ceux qui avaient reçu le pembrolizumab en première ligne, 23% avaient une réponse médiane de 38,9 mois.

 
Le fait que des patients participant à cet essai soient encore en vie après 7 ans est assez remarquable. Dr Edward B. Garon
 

Des résultats corrélés au niveau d’expression de PD-L1

Les chercheurs ont observé que les niveaux les plus élevés d'expression de PD-L1 étaient associés à une survie plus longue.

Plus précisément :

Chez les personnes naïves de traitement, 29,6% des personnes ayant une expression de PD-L1 ≥ 50% étaient en vie après 5 ans, contre 15,7% de celles ayant des niveaux d'expression inférieurs à 50%.

Chez les personnes qui avaient reçu un traitement auparavant, 25% de celles avec des niveaux d'expression de PD-L1 ≥ 50% étaient en vie après 5 ans, contre 12,6% lorsque les niveaux d'expression étaient inférieurs à 50 %.

Enfin, seulement 3,5% des personnes ayant des niveaux d'expression inférieurs à 1% étaient en vie après 5 ans.

Une bonne tolérance

Des effets secondaires liés à l'immunité sont survenus chez 17% des participants, un taux similaire à celui observé après 3 ans de suivi. L’hypothyroïdie était l’effet indésirable le plus fréquent. L'effet indésirable le plus grave observé était la pneumonie.

Suite à cet essai, les chercheurs vont s’atteler à identifier les meilleurs candidats au traitement par pembrolizumab et tenter de comprendre et de lever les obstacles empêchant le système immunitaire de détruire les tumeurs. Enfin, l’intérêt de différentes associations de pembrolizumab avec d’autres traitements vont être explorées.

    Questionnements et perspectives françaises

    Interrogé par Medscape édition française sur ces résultats, le Pr Nicolas Girard (Institut Curie, Paris) a salué les bons résultats de cette première étude évaluant la survie globale à 5 ans. « Toutefois, 80 % des patients décèdent encore et certaines questions restent en suspens concernant la durée optimale de traitement (ici les patients sont traités deux ans) et l’intérêt des associations thérapeutiques », a-t-il précisé.

    Concernant le coût élevé du traitement et le fait que le pembrolizumab ne soit pas encore disponible en France, le Pr Girard a indiqué qu’un premier remboursement était attendu à l’automne pour l’association chimiothérapie + pembrolizumab en première ligne de traitement dans les adénocarcinomes.

    « Ce traitement est très attendu par les patients et les médecins en raison des résultats impressionnants sur l’augmentation de la survie. Les négociations de prix freinent son arrivée sur le marché français mais le fait qu’un nombre de plus en plus important de patients semble bénéficier du traitement devrait accélérer le processus », a-t-il souligné.

    Retrouver les commentaires du Pr Elisabeth Quoix sur l’étude ici.

    Rappel des indications du pembrolizumab dans le cancer du poumon

    -Keytruda est indiqué en monothérapie dans le traitement de première ligne des patients adultes atteints d'un cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) métastatique dont les tumeurs expriment PD-L1 avec un score de proportion tumorale (TPS) ≥ 50 %, sans mutations tumorales d'EGFR ou d'ALK.

    -Keytruda, en association à une chimiothérapie pémétrexed et sel de platine, est indiqué dans le traitement de première ligne des patients adultes atteints de CBNPC métastatique non épidermoïde dont les tumeurs ne présentent pas de mutations d'EGFR ou d'ALK.

    -Keytruda, en association au carboplatine et au paclitaxel ou au nab-paclitaxel, est indiqué dans le traitement de première ligne des patients adultes atteints de CBNPC métastatique épidermoïde.

    -Keytruda est indiqué en monothérapie dans le traitement des patients adultes atteints de CBNPC localement avancé ou métastatique dont les tumeurs expriment PD-L1 avec un TPS ≥ 1 %, et ayant reçu au moins une chimiothérapie antérieure. Les patients présentant des mutations tumorales d'EGFR ou d'ALK doivent également avoir reçu une thérapie ciblée avant de recevoir Keytruda.

    L’étude a reçu des financements de Merck Sharp & Dohme Corp.

    Edward B.  Garon a des liens d’intérêts avec : Dracen, AstraZeneca (Inst); Bristol-Myers Squibb (Inst); Dynavax (Inst); Genentech (Inst); Iovance Biotherapeutics (Inst); Lilly (Inst); Merck (Inst); Mirati Therapeutics (Inst); Neon Therapeutics (Inst); Novartis (Inst).

    Matthew David Hellmann a des liens d’intérêts avec : Shattuck Labs, AstraZeneca; Bristol-Myers Squibb, AstraZeneca/MedImmune; Genentech; Janssen; Merck; Mirati Therapeutics; Nektar; Novartis; Shattuck Labs; Syndax

    N. Girard a des liens d’intérêts avec AstraZeneca, BMS, Boehringer-Ingelheim, MSD, Pfizer, Roche, AstraZeneca, BMS, Amgen, AstraZeneca, BMS, Boehringer-Ingelheim, Eli Lilly, MSD, Pfizer et Roche.

     

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