Cancers œsophage/estomac : mieux vaut privilégier les faibles doses de chimiothérapie chez les patients fragiles

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

2 juin 2019

Chicago, Etats-Unis—« Less is more » le moins est le mieux » est en passe de devenir un nouvel adage pour certains traitements du cancer ; [un concept] qui paye en termes de qualité de vie pour les patients », a commenté le Dr Monica M. Bertagnolli, présidente de l’ASCO, lors d’une conférence de presse donnée en amont du congrès de l’ American Society of Clinical Oncology .

Les propos de la présidente de l’ASCO visent ici les résultats de l’essai de phase III GO2, réalisé chez des patients âgés et/ou fragiles atteints de cancers de l’estomac et de l’œsophage inopérables [1].

L’objectif de l’essai était de comparer le rapport bénéfice-risque de faibles doses d’oxaliplatine (Eloxatine®) et de capécitabine (Xeloda®) versus des doses plus élevées.

Résultat : les faibles doses de chimiothérapie sont aussi efficaces mais moins toxiques.

« Jusqu’ici les essais de chimiothérapie palliative dans les cancers de l’estomac et de l’œsophage n’avaient pas inclus de patients fragiles ou âgés. Le bénéfice de la chimiothérapie dans cette population n’était donc pas connu », a souligné l’auteur principal de l’essai, le Pr Peter S. Hall (Université d’Edimbourg, Royaume-Uni).

Ce dernier a, toutefois, précisé que dans la vraie vie, la plupart des oncologues ne donnaient pas les doses « standards » de chimiothérapie à ces patients par peur des effets secondaires, mais sans avoir de données fiables auxquelles se référer pour guider leur pratique.

« Nous espérons que nos données aideront les patients et les médecins à mieux choisir [le traitement], en sachant que la chimiothérapie à faibles doses peut permettre de maintenir une certaine qualité de vie, tout en ralentissant la progression de la maladie », explique-t-il.

Fragilité : trouver la dose optimale d’oxaliplatine + capécitabine

En 2017, l’équipe du Pr Hall avait déjà montré, dans une population similaire de patients [2] que :

- l’association d’oxaliplatine et de capécitabine était plus efficace pour contrôler la maladie que la capécitabine seule ;

- que la bithérapie était beaucoup moins toxique que la trithérapie à base d’oxaliplatine, de capécitabine et d’épirubicine (Ellence®).

Ce nouvel essai, présenté à l’ASCO, avait donc pour objectif de trouver la dose optimale d’oxaliplatine et de capécitabine pour ces patients fragiles.

Le bénéfice clinique, la tolérance, la qualité de vie, le niveau de satisfaction des patients ont été évalués via un nouvel outil appelé OTU pour Overall Treatment Utility pour « Utilité Globale du Traitement ».

Entre 2014 et 2017, 514 patients âgés de 51 à 96 ans (âge moyen 76-77 ans), trop fragiles pour recevoir de l’oxaliplatine + de la capécitabine + de l’épirubicine, ont été randomisés pour recevoir trois dosages différents d’oxaliplatine + capécitabine.

Régime A : 130 mg/m² d’oxaliplatine tous le 21 jours et 625 mg/m² de capecitabile deux fois par jour en continu.

Régime B : 80 % de doses de A

Régime C : 60 % des doses de A

Les patients avec une fonction rénale altérée ont reçu 75 % des doses de capécitabine.

Une meilleure tolérance pour une efficacité équivalente

Après 9 semaines de suivi, la survie globale et la survie sans progression étaient similaires dans les différents groupes (différences NS). La survie globale moyenne était de 7,5 mois dans le groupe A, de 6,7 mois dans le groupe B et de 7,6 mois dans le groupe C. La survie sans progression moyenne était de 4,9 mois dans le groupe A, de 4,1 mois dans le groupe B et de 4,3 mois dans le groupe C.

En parallèle, les patients qui avaient reçu le régime C avaient un meilleur score OTU que les patients qui avaient reçu les régimes A et B, principalement en raison d’une meilleure tolérance et d’une meilleure qualité de vie.

Le régime C était associé aux meilleurs scores OTU même chez les patients les plus jeunes et les moins fragiles. En revanche, aucun des sous-groupes de patients ne bénéficiait des doses les plus élevées (régime A).

En termes de tolérance, les effets secondaires de grade 3 ou plus étaient plus souvent observés chez les patients des groupes A et B que chez les patients du groupe C (56% pour A et B et 37% pour C).

Enfin, les patients du groupe C avaient plus de probabilité d’avoir un bon score OTU (groupe C : 43 %, groupe A : 35 %, groupe B : 36 %).

Au final, les chercheurs indiquent que « ces résultats devraient guider les futurs traitements ».

« Le traitement à faibles doses devrait être proposé aux patients qui peuvent recevoir une chimiothérapie mais qui sont trop âgés ou trop fragiles pour recevoir une dose standard, et ce, avec l’assurance que les résultats seront supérieurs, sans compromettre le contrôle de la maladie ou la survie », a conclu le Pr Hall.

 

 

Le Pr Hall a des liens d'intérêt avec Roche, Pfizer, Eisai, Novartis, AstraZeneca, DaiichiSankyo. D. Swinson : Merck. J. Wadsley : Genzyme, Esai, Ipsen, Celgene, Imaging Equipment Limited, AstraZeneca. S. Falk : Merck Serono, Celgene, Gilead Sciences. M. Seymour: Amgen.

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