Les syndicats appellent à la grève dans tous les hôpitaux de l'AP-HP à partir du 18 avril

Dr Emmanuel Cuzin

17 avril 2019

Paris, France – Démarrée aux Urgences de Saint-Antoine, la grève prend de l’ampleur et s’étend désormais à tous les hôpitaux de l’Assistance Publique- Hôpitaux de Paris (AP-HP). Huit syndicats de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (CGT, CFDT, SUD, CGC, CFTC, FO, UNSA, SMPS) ont déposé vendredi un préavis de grève entre le 18 et le 20 avril, réclamant « de véritables négociations » sur l'emploi, les salaires et les restructurations en cours.

Effet boule de neige

Dans un contexte de la permanence des soins tendu sur tout le territoire (situations de tensions récurrentes, pénurie de personnel, etc…), la série d’agressions qui s’est déroulé à l’hôpital Saint-Antoine a été la goutte qui a fait déborder le vase. Le 18 mars dernier, les urgences de cet hôpital parisien ont démarré une grève illimitée. Un mois plus tard, quatre hôpitaux de l’AP-HP (Lariboisière, Pitié-Salpêtrière, Saint-Louis, et Tenon) ont rejoint le mouvement, un tiers des personnels des urgences étant en grève. Aujourd’hui le phénomène s’amplifie et s’étend à tout l’hôpital puisque huit syndicats de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ont déposé vendredi un préavis de grève entre le 18 et le 20 avril, réclamant « de véritables négociations » sur l'emploi, les salaires et les restructurations en cours.

Promesse insuffisante

Face à ces revendications, Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP, veut jouer l’apaisement. Il a ainsi reçu l'ensemble des représentants syndicaux des personnels pour tenter de contenir le mouvement. En signe d’apaisement, il a promis, la semaine dernière, 45 postes supplémentaires de soignants (non médicaux). Sachant que l’APHP compte 25 services d’urgence, le calcul est vite fait : Martin Hirsch propose moins de deux postes supplémentaires par service d’urgence ! Le directeur général a également évoqué la possibilité d'une « réponse tangible » sur les rémunérations. Selon Libération , le directeur de l’AP-HP aurait affirmé, dans une lettre aux syndicats, « sa volonté de renforcer la sécurité de l’ensemble des sites pour éviter la reproduction d’agressions … de renforcer les équipes … et de mieux tenir compte de l’augmentation d’activité en ajustant les effectifs à l’évolution du nombre de passage, tout en soulignant la difficulté de recrutement. » Une promesse, loin d’être suffisante, pour les syndicats qui ont décidé d’étendre le mouvement.

Interrogé par Medscape édition française, le Dr Christophe Prudhomme (CGT-santé), porte parole de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF) demande « que soient appliquées les recommandations de l’Association Samu Urgence France nécessaires pour assurer la sécurité des patients. Cela signifie créer 700 postes. Ce que conteste l’AP-HP. Cet objectif n’est pas négociable, reste à connaitre le rythme de création de ces postes. Il n’y a pas de problème de démographie du personnel soignant en dehors des médecins. Il s’agit d’un problème strictement financier. » Voir aussi l’interview du Dr Prudhomme en fin d’article sur les raisons de la colère.

Le système est au bord de la rupture

Cette crise était prévisible. En effet, le nombre de patients aux urgences des hôpitaux est passé de 12 millions en 2002 à 22 millions en 2018. Logiquement, cette situation aurait dû s’accompagner d’une augmentation parallèle des effectifs. Mais, c’est tout l’inverse qui est envisagé puisque Martin Hirsch prévoit de supprimer 5 000 emplois à l’AP-HP dans les cinq prochaines années, et comme tous les services sont concernés par ces mesures contraires à la logique, la situation n’est pas prête de s’améliorer.

C’est pourquoi, chose rare, tous les syndicats de l’AP-HP ont appelé à la grève à partir du 18 avril, réclamant « l'arrêt des fermetures de services (...), des plans d'économies et des suppressions d'emploi, la titularisation des contractuels, une revalorisation des salaires et un budget à la hauteur des besoins de la population. »

Pour Christophe Prudhomme, « cette crise est le résultat du retard pris en terme de dotation en personnel et d’aménagement des services d’urgence. Face à l’augmentation continue du nombre de passages, le système est au bord de la rupture. Depuis 20 ans, nous répétons la même chose mais nous ne sommes pas entendus. L’organisation des soins en ville est telle, qu’il serait au mieux, possible, moyennant une réorganisation, de freiner le nombre de passages aux urgences, mais pas d’entamer une décroissance. »

 

« Il y a une vraie colère »

Medscape édition française : Sur quoi porte la revendication sur les salaires ?

Christophe Prudhomme : La pénibilité du travail est telle, que nous demandons une prime de 300 € nette par mois pour chaque agent des urgences. Cette demande est incontournable.

Comment soulager la charge de travail aux urgences ?

Christophe Prudhomme : L’hospitalisation « brancard » - quand les patients restent sur des brancards par faute de lit d’hospitalisation - augmente la mortalité et crée une surcharge de travail. Nous demandons ainsi qu’il y ait zéro « hospitalisations brancard. » C’est possible en remplaçant les lits supprimés en chirurgie par des lits de médecine. Il faut arrêter de supprimer des lits. Nous sommes frontalement opposés à la logique de l’AP-HP et à la logique gouvernementale.

Etes-vous décidé à une action dure ?

Christophe Prudhomme : La grève s’étend à toute l’AP-HP. Il y a une vraie colère. Nous nous donnerons les moyens pour que ce mouvement s’étende à l’ensemble du territoire. Nous sommes prêts à poursuivre, pénalement à titre personnel, les directeurs d’hôpitaux si les décisions prises ont abouti à une perte de chance. Nous accompagnerons les patients en cas de plainte.

 

 

 

 

 

 

 

 

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