France -- L'installation en libéral fait toujours autant rêver les jeunes médecins, même si passer le pas en effraie plus d'un. C'est l'enseignement qui ressort de l’enquête menée par la commission jeunes médecins du Conseil national de l’Ordre (CNOM), composée des structures représentatives des étudiants, internes et jeunes médecins (ANEMF, ISNI, ISNAR-IMG, ReAGJIR, SNJMG, JEUNES MEDECINS ISNCCA, SIHP et SNJAR) et de conseillers nationaux, rendue publique ce 11 avril.
Le CNOM a fait parvenir une enquête à un large panel de médecins entre le 7 janvier et le 27 février dernier. Au total, 15 319 médecins y ont répondu dont 10797 médecins installés (70%), 2443 internes (16%) et 2079 remplaçants (14%). 90% de ces professionnels avaient une spécialité médicale, dont 60% de médecins généralistes. Les femmes et les jeunes médecins ont représenté le gros du contingent, 60% des répondants à l'enquête était de sexe féminin et 52% avaient moins de 40 ans.
Un profond décalage
Première constatation : il existe un décalage entre l’aspiration à s’installer en libéral et sa concrétisation. En effet, si 75% d'entre eux envisagent une activité libérale et/ou mixte (par ordre décroissant : 27% en mixte, 24% en libéral, et 21% en maisons de santé pluriprofessionnelle (MSP)), dans la réalité, seuls 12% des nouveaux inscrits s'installent en libéral et 1% en mixte. En revanche, 62% des nouveaux professionnels sont salariés.
Et, au final, cinq ans plus tard, seuls 35% ont passé le pas et se sont installés en libéral.
Exercice regroupé et accompagnement humain
A quoi aspirent les jeunes médecins au moment de l’installation ? D’abord, à ne plus travailler de manière isolée. Pour 87% des remplaçants et 81% des internes, la présence d'autres professionnels de santé sur le territoire d'installation est capitale.
Viennent ensuite la qualité de vie et l'équilibre entre vie privée et professionnelle, qui comptent pour beaucoup. La figure du médecin vivant son exercice professionnel comme un sacerdoce est révolue : pour les internes, les horaires et le rythme de travail vont déterminer le type d'installation chez 82% d'entre eux, les remplaçants, pour des raisons que l’on peut expliquer, y sont moins attachés (46%). Et lorsqu'ils souhaitent s'installer en libéral, les maisons de santé pluri-professionnelles (MSP) et l'exercice coordonné, sont plébiscitées par 72% des internes.
Néanmoins, l'accompagnement humain semble vraiment l’élément déterminant pour s'installer. Ainsi, à la question : « Dans l'optique d'un accompagnement de votre projet professionnel, par qui aimeriez-vous être guidé ? », 68% souhaiteraient être guidés par une consœur ou un confrère, 53% par une collectivité territoriale, et 48% par l'Ordre des médecins.
Proximité familiale, services publics et conjoint importent beaucoup
Mais l’enseignement-clé de l’enquête, c’est que la qualité de vie et donc l'environnement – en termes de proximité familiale et de services publics – sont extrêmement déterminants dans le choix de l’installation. Pour les internes, la présence de services publics dans les territoires où s'installer est essentielle tout comme la proximité familiale (62% et 61% d'entre eux, respectivement, les plébiscitent). Idem, pour les remplaçants avec de chiffres du même ordre. Cette recherche d’un cadre de vie non-isolé est d’autant plus prégnante que les jeunes médecins, lorsqu’ils sont en âge de s’installer vers 30 ans, ont bien souvent une vie de famille, avec conjoint voire enfant(s). Autre facteur clé qui peut déterminer ou non l'installation en libéral : le conjoint. La situation du conjoint influe sur cette décision pour 86% des internes, et pour 77% des célibataires qui envisagent de vivre en couple.
Il semblerait aussi que le remplacement favorise l'installation en libéral : 81% des médecins installés ont été remplaçants. Ce que le CNOM et la Commission jeunes médecins interprètent comme un changement de paradigme : « pour les jeunes médecins, il ne suffit plus de s’installer dans un cabinet, mais il s’agit de s’insérer dans un territoire » écrivent-ils dans un communiqué commun accompagnant a sortie de l’enquête.
Soutien financier : pas déterminant
Si l'étude montre que les jeunes médecins (43%) et les internes (59%) craignent la faillite en cas d'installation – ce qui peut notamment s’expliquer par un manque de formation, durant les années d'étude, à la gestion économique d'un cabinet –, en revanche, les aides financières ne semblent pas déterminantes dans le choix de l'installation en libéral : pour 48% des sondés, elles sont peu ou pas déterminantes. « Les solutions à apporter aux problèmes de démographie médicale dépassent donc largement les mesures financières », selon le CNOM et la Commission jeunes médecins qui ajoutent que « les mesures coercitives » seraient aussi « totalement contre-productives ». Il convient plutôt, « d’accompagner [les jeunes médecins], mais aussi de leur permettre de travailler en groupe, au sein d’un réseau de professionnels, et dans de bonnes conditions d’exercice », conclut le CNOM.
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Citer cet article: Installation des jeunes médecins : ce qu’ils recherchent - Medscape - 16 avr 2019.
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