La Nouvelle-Orléans, Etats-Unis — La voie est désormais grande ouverte pour faire du remplacement valvulaire par voie transcutanée (TAVI) le traitement de référence du rétrécissement aortique. Présentées lors du congrès de l’American College of Cardiology (ACC) , deux nouvelles études (PARTNER-3 et Evolut Low Risk) révèlent, en effet, la non-infériorité des valves percutanées par rapport aux bioprothèses chirurgicales, cette fois chez les patients à bas risque [1,2].
Les résultats ont été publiés simultanément dans le New England Journal of Medicine. Très attendus, ils ont suscité beaucoup d’enthousiasme lors de la conférence de présentation, comme le rapporte notre consœur de Medscape édition internationale. Et pour cause: jusqu’à présent réservé aux patients à haut risque chirurgical, voire à risque intermédiaire, le TAVI apparait dès lors comme un traitement de choix pour la grande majorité des patients.
Des patients plus jeunes
L'étude PARTNER-3 (Placement of Aortic Transcatheter Valves) a comparé la bioprothèse implantée par ballonnet de troisième génération (Sapien 3™, Edwards Lifesciences) à la valve chirurgicale chez des patients présentant une sténose aortique sévère, considérés comme à bas risque chirurgical [1]. Au total, 1 000 patients âgés en moyenne de 73 ans ont été randomisés entre les deux techniques.
L’évaluation du risque chirurgical est basée sur le score de risque de la Society of Thoracic surgeons (STS score), qui estime le risque de décès à 30 jours. Dans cette étude, les patients présentaient un score STS moyen de 1,9%. Pour rappel, les patients à bas risque ont un score STS inférieur à 4%. Ceux à risque intermédiaire ont un score compris entre 4 et 8%. Au delà de 8%, le risque de décès post-opératoire est considéré comme élevé.
Le critère primaire d’évaluation est un critère composite associant mortalité, AVC et réhospitalisation à un an. Dans PARTNER-3, le TAVI s’avère même nettement supérieur à la chirurgie avec ce critère composite puisque son incidence est de 8,5% chez les patients ayant reçu une bioprothèse posée par voie transcutanée à l’aide d’un ballonnet, contre 15,1% chez ceux implantés par chirurgie.
En considérant les critères isolément, les résultats restent en faveur du TAVI. Ainsi, le taux d’AVC est de 1,2% après implantation d’une valve percutanée, contre 3,1% chez les patients recevant une bioprothèse chirurgicale. La mortalité toutes causes apparait également très faible dans le groupe TAVI, avec un taux de décès respectivement de 1 et 2,5%.
A 30 jours, les différences sont également significatives, le taux d’AVC et de décès combinés est de 1% dans le groupe TAVI, contre 3,35% dans le groupe chirurgie. De plus, l’implantation d’une valve Sapien 3™ est associée à une récupération plus rapide des performances physiques, notamment en termes d’endurance, selon le test des six minutes de marche.
Ces résultats font suite à ceux de l’étude PARTNER-2, qui ont validé l’utilisation des valves TAVI de deuxième génération Sapien XT chez les patients à risque intermédiaire (Score STS moyen de 5,8%). Les résultats sont apparus équivalents, l’incidence du critère composite taux de décès+AVC étant de 19,3% dans le groupe TAVI, contre 21,1% dans le groupe chirurgie.
Faible mortalité
La seconde étude, Evolut Low Risk porte, quant à elle, sur les modèles de valves TAVI auto-expandables en supra-annulaire (CoreValve®, Evolut R® ou Evolut PRO®, Medtronic) [2]. Dans cet essai, 1 468 patients à bas risque chirurgical (Score STS<3%) souffrant d’une sténose aortique ont été randomisés pour un remplacement de valve par voie transcutanée ou par chirurgie. La moyenne d’âge est de 74 ans.
La majorité des patients implantés par TAVI ont reçu une prothèse de deuxième génération Evolut R®. La dernière génération de valve de cette catégorie (Evolut Pro®) a été choisie pour 22% des patients du groupe bénéficiant de cette technique.
Le critère d’évaluation est également un critère composite. Il n’inclut pas le taux de nouvelle admission à l’hôpital, mais associe uniquement la mortalité et le taux d’AVC, avec un suivi plus long. Les résultats apparaissent équivalents dans les deux groupes, avec une incidence du critère de 5,3% à deux ans dans le groupe TAVI, contre 6,7% avec la chirurgie, ce qui confirme la non-infériorité du TAVI.
A 30 jours, l’incidence des AVC est plus faible chez les patients ayant reçu une prothèse auto-déployée (0,5% contre 1,7%), tout comme le taux de complications hémorragiques (2,4% vs 5,7%) ou de fibrillation atriale, nettement moins élevée après un TAVI (7,7% vs 37,4%).
En revanche, le taux d’implantation de pacemaker est plus élevé chez ces patients (17,4% vs 6,1%). Il en est de même pour l’incidence des régurgitations aortiques modérés ou sévères (3,5% vs 0,5%). Des résultats non négligeables pour une population de patients généralement plus jeunes.
A un an, la mortalité reste faible dans les deux groupes (0,4% vs 1,2%). Après la pose de la bioprothèse TAVI, le gradient de pression s’avère également moins élevé que celui observé sur des prothèses implantées par chirurgie (8,6 mmHg vs 11,2 mmHg).
La durabilité des valves en question
Si les résultats de ces études sont à nouveau en faveur des prothèses par TAVI, elles ne permettent pas de se prononcer sur leur durabilité, une question d’autant plus cruciale que les patients à bas risque sont généralement plus jeunes. Les quelques données disponibles sont toutefois rassurantes. C’est le cas dans l’essai NOTION, qui a montré à cinq ans un taux de ré-intervention comparable entre les bioprothèses chirurgicales et les valves TAVI.
Les deux essais devraient encore se poursuivre pendant une dizaine d’années pour répondre à cette question. « Des conclusions définitives sur les avantages et les inconvénients des prothèses TAVI en comparaison avec la chirurgie dépendent d’un suivi à long terme », ont rappelé les auteurs de PARTNER-3.
Certains redoutent toutefois une extension trop hâtive des indications à ces patients à bas risque, largement majoritaires et désireux de bénéficier des prothèses TAVI. Dans un commentaire publié sur Medscape édition internationale, le Dr John Mandrola (Baptist Health Medical Group, Louisville, Etats-Unis), qui a dit craindre une généralisation du TAVI chez ces patients, sans attendre les résultats à long terme, a appelé à la modération.
Il a toutefois salué les progrès obtenus avec les dernières générations des bioprothèses. « Un patient traité par TAVI se retrouve rarement en soins intensifs, rentre généralement chez lui le lendemain et a moins de risque d’avoir un AVC ou de décéder », a commenté le cardiologue.
Avant de conclure: « nous avions jusqu’à présent l’habitude de nous interroger pour savoir dans quel cas le TAVI est approprié. Il va désormais, falloir se demander: dans quel cas n’est-il pas approprié ? »
Un avis partagé par le Pr Gilles Montalescot (Chef du service de cardiologie, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris). Pour le cardiologue français, reste à savoir qui sont les patients qui ne pourront bénéficier un TAVI et pour qui la chirurgie sera préférable, a-t-il expliqué lors d'un échange avec le Pr Gabriel Steg (Hôpital Bichat-Claude Bernard, Faculté de Médecine Xavier Bichat, Université de Paris Diderot) à l'occasion d'un entretien vidéo sur Medscape.
Les essais PARTNER-3 et Evolut ont été financées respectivement par Edwards et Medtronics. |
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Citer cet article: Sténose aortique: deux études en faveur du TAVI chez les patients à bas risque - Medscape - 21 mars 2019.
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