Cancer du poumon : une deuxième grande étude montre l’intérêt du dépistage par scanner basse dose

Dr Isabelle Catala

13 février 2019

Marseille, France -- Après l’étude américaine National Lung Screening Trial (NLST), l’essai NELSON est le deuxième vaste essai à montrer l’intérêt du scanner basses doses chez des patients à risque de cancer du poumon. Il indique, en outre, qu’analyser le volume et la vitesse de croissance des nodules détectés permet un dépistage nettement plus précis. Ces résultats ont été commentés par le Dr Sébastien Couraud (pneumologie et oncologie thoracique, Hospices civils de Lyon) à l’occasion du 23ème Congrès de Pneumologie de Langue Française (CPLF).

Les résultats de l’étude Nelson ont été présentés le 25 septembre 2018 à l’occasion de la 19th World Conference on Lung Cancer (Abstract PL02.05) et sont détaillés dans la publication de nos confrères de Medscape US. Le protocole de l’étude a été publié en 2011 [2].

Céder à la tentation du dépistage

En réalisant des scanner basses doses tous les deux ans (3 scanners au total), il est possible de faire baisser, à 10 ans de suivi, la mortalité par cancer du poumon de 26 % chez les hommes et de 49 % chez les femmes dans une population à haut risque définie par des personnes de 50 à 75 ans ayant fumé plus de 15 cigarettes par jour pendant plus de 25 ans ou plus de 10 cigarettes par jour pendant plus de 30 ans ou ex fumeur ayant cessé l’intoxication depuis moins de 10 ans. Ce résultat tiré de l’étude NELSON a fait dire au Dr Sébastien Couraud qu’il faut désormais « céder à la tentation du dépistage » [1]. Un avis que ne partage pas la Haute Autorité de Santé qui a retoqué en 2016 la possibilité de généraliser un tel dépistage en France (voir encadré).

Scanners tous les deux ans

L’étude NELSON est le deuxième essai randomisé – après l’étude américaine NSLT – à prouver l’intérêt d’examens scanners basse doses répétés (à 1 an, 2 ans puis 2,5 ans) dans une population choisie de patients à risque de cancer du poumon. Menée aux Pays-Bas et en Belgique, l’étude NELSON a inclus 15 792 personnes tirées au sort pour être suivi par scanners basses doses (7 915) ou être inclus dans un bras témoin. (7 915). Les participants du bras actif étaient évalués à l’inclusion par un scanner, examen répété avec un délai de 1 an, puis 2 ans puis 2,5 ans. Ils étaient suivis sur une période de 10 ans. Au total, 5 cancers ont été détectés au premier scanner de suivi, 19 au deuxième et 28 au troisième. Pour le Dr Couraud, « il faut savoir définit un intervalle ni trop court ni trop long entre les différents examens, et deux années semblent une bonne mesure ».

Chez les hommes inclus dans cette étude observationnelle (soit 84 % des 7 915 personnes inclues), la mortalité par cancer du poumon a pu être abaissée de 25 % de 8 à 10 ans après l’inclusion. Chez les femmes, ces chiffres sont encore plus importants avec une baisse de 61 % de la mortalité à 8 ans, de 53 % à 9 ans et de 49 % à 10 ans. « Ces chiffres confortent l’idée que le dépistage doit être mis en place dès 50 ans car le gain possible est particulièrement marqué », analyse le Dr Couraud.

Evolution volumique

Fait intéressant et qui différencie, l’étude NELSON de l’étude américaine, les investigateurs européens se sont, ici, appuyés sur le volume et le temps de doublement des nodules pour affiner leurs résultats. « Contrairement à l’étude américaine NSLT qui se fondait sur une positivité de dépistage lorsque le nodule était d’une taille supérieure à 5 mm, dans l’étude NELSON, trois types de résultats de scanners ont été individualisés, explique le Dr Couraud. Un volume de nodule inférieur à 50 mm3 correspond à un dépistage négatif, une taille supérieure à 500 mm3 à un dépistage dit positif. Entre 50 et 500 mm3, le dépistage est dit indéterminé et nécessite la réalisation d’un nouveau scanner basse dose à 3 mois afin d’estimer le temps de doublement. Quand celui-ci est supérieur à 400 jours, alors le dépistage est négatif, dans le cas contraire, il était jugé positif ».

L’évaluation volumique et du temps de doublement a permis d’obtenir bien moins de faux positifs qu’avec le protocole de suivi NLST : 24,6 % de tests positifs avec le NLST dont 96 % de faux positifs contre 9,3 % d’indéterminés avec NELSON, 2,2 % de positifs conduisant à un taux de cancers de 0,9 % au final.

« Les résultats de l’étude NELSON tendent à prouver qu’en matière de dépistage, il faut oublier la taille, préférer le volume et s’assurer avant de poser un diagnostic positif que la lésion grossit » a considéré le Dr Couraud.

 

Un essai dans la vraie vie en France

En France, le dépistage systématique par scanner basse dose chez les patients à risque de cancer du poumon a été jugé en 2016, ni possible, ni efficace, par la HAS. Une seule étude de dépistage dans la « vraie vie » avec scanner faible dose a été mise en place, sous l’impulsion du Dr Olivier Leleu, chef du service de pneumologie au centre hospitalier d’Abbeville, impressionné par les résultats de l’étude NSLT. Il s’agit de l’étude DEP KP80 :1 059 patients ont été recrutés, 252 ont décliné le scanner et 37 ne respectaient pas les critères d’inclusion. Sur 770 examens réalisés, 47 (6 %) ont été positifs, 662 (86 %) négatifs et 61 (8%) indéterminés. Sur les 47 dépistages positifs, seuls 19 cancers ont été confirmés : il s’agissait de cancer in situ ou stade I pour 58 % des patients, de stade II pour 16 %, de stade IIIA pour 10 % et de stade IIIB ou C pour 16%.

 

 

 

 

 

 

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