POINT DE VUE

Douleurs neuropathiques rebelles : orienter vers les centres spécialisés

Aude Lecrubier

4 février 2019

Paris, France -- Les patients souffrant de douleurs neuropathiques très résistantes devraient être orientés vers les structures spécialisées en douleur chronique (SDC), selon le Pr Patrice Queneau (membre de l’académie nationale de médecine) [1]. Entretien avec Medscape édition française.

Quelle est l’incidence des douleurs neuropathiques rebelles ? Quelles sont les plus fréquentes ?

Pr Patrice Queneau : Selon l’étude STOPNEP [2], 7 % des adultes français souffrent des douleurs chroniques rebelles d’une cause liée à un trouble neurologique, que l’on appelle les douleurs neuropathiques.

Les douleurs neuropathiques peuvent être liées à  de troubles centraux : sclérose en plaques, maladie de Parkinson, AVC, paraplégie… et à de lésions des nerfs périphériques : cancer, diabète, sciatiques rebelles, échecs de la chirurgie...Il faut aussi y ajouter les migraines et les céphalées chroniques quotidiennes « de tension » ou induites par mésusages et abus médicamenteux ainsi que les douleurs oro-faciales, le visage étant richement innervé. Ces dernières sont souvent rebelles, parfois sous-estimées quand à l’importance du handicap qu’elles induisent.

Pourquoi orienter vers une structure spécialisée en douleur chronique (SDC) ?

Pr Patrice Queneau : L’ensemble de ces douleurs, lorsqu’elles sont très résistantes peuvent devenir des indications de recours aux SDC. Ces structures associent plusieurs médecins et autre soignants formés à la douleur et offrent des stratégies de traitement alliant médicaments, prise en charge psychologique (thérapies cognitivo-comportementales par exemple) et ou des interventions techniques spécifiques (voir aussi encadré). Les traitements médicamenteux des douleurs neuropathiques sont souvent peu efficaces, ce qui conduit parfois à avoir recours à des techniques de stimulation ou d’interruption des voies de nociception.

Pouvez-vous donner des exemples où les SDC semblent particulièrement appropriés ?

Pr Patrice Queneau : Dans le cancer, par exemple, les SDC peuvent s’avérer utiles. A tous les stades du cancer, il y a des douleurs neuropathiques (lire Douleurs neuropathiques : les oubliées du cancer). Elles peuvent être induites par les traitements du cancer, par la chirurgie (notamment douleurs du sein fantôme), la radiothérapie, la chimiothérapie, les facteurs de croissance, les anti-aromatases...mais aussi la dépression et le stress. Dans ces cas là, nous sommes souvent face à des malades guéris qui sont face à une deuxième maladie, les douleurs chroniques, qui peuvent survenir des années après. Il ne faut pas oublier ces malades, dans ce deuxième temps. La prise en charge de ces douleurs est très difficile, très chronophage. Elle nécessite des médicaments mais aussi une prise en charge psycho-comportementale, de la rééducation, de la détente, de l’ergothérapie etc. C’est une des réussites des centres de la douleur, qui viennent optimiser la prise en charge (Prise en charge des douleurs aiguës et chroniques par l’hypnose).

Autre exemple, celui des céphalées qui se compliquent de neuropathies. Déceler la cause de céphalées n’est pas évident. Les douleurs peuvent être liées au manque de traitement, à l’excès de traitement ou à des situations d’errance (Lire Céphalées par abus médicamenteux : que faire ?  ). Là encore, les centres de la douleur sont efficaces pour faire la part des choses et prendre en charge ces douleurs.

Structures de la Douleur Chronique (SDC) : ce qu'on y fait

En cas de douleurs chronique persistante ou récidivante (plus de 3 mois), il est recommandé au médecin traitant ou spécialiste de la douleur d’orienter le patient vers une des 273 structures de la douleur chronique (SDC) en France (voir l’annuaire ici). Ils permettent une évaluation globale et une prise en charge multidimensionnelle de la douleur par une équipe pluridisciplinaire (algologue, psychiatre, psychologue, infirmier, etc.) avec réunion de synthèse. Les consultations longues permettent l'élaboration de projets de soins personnalisés. Différentes approches thérapeutiques médicamenteuses ou non y sont proposées (neurochirurgie de la douleur (implantation, stimulation du cortex ou de la moëlle), pose de cathéters intrathécaux ou intra-ventriculaires (mode d’administration des médicament antidouleur), relaxation, hypnose, acupuncture, éducation thérapeutique, etc.)

 

 

Le Pr Queneau n’a pas de liens d’intérêt en rapport avec le sujet.

 

 

 

 

 

 

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