POINT DE VUE

Végétarisme et diabète: quelles preuves?

Dr Boris Hansel

Auteurs et déclarations

13 décembre 2018

Le blog du Dr Boris Hansel - Diabétologue et nutritionniste

Faut-il proposer un régime végétarien, voire végan, en première intention pour traiter le diabète et prévenir les complications? Que dit la littérature?

TRANSCRIPTION

Aujourd’hui, je vais tenter de répondre à une question que patients et soignants se posent : est-ce que le régime végétarien, voire végétalien, est le régime idéal pour prévenir et traiter le diabète ?
 

Si on fait une recherche rapide sur Internet, on voit apparaître de nombreux articles de vulgarisation qui prônent l’alimentation végétarienne. Sur certains sites, cette alimentation permettrait d’éviter à coup sûr la survenue de diabète ou, en cas de diabète avéré, d’arrêter les traitements antidiabétiques. À l’évidence, ce discours est totalement faux. Ce qui est plus complexe, c’est de savoir si le régime végétarien est celui qu’il faut proposer en première intention chez les patients diabétiques, en espérant équilibrer le diabète et prévenir les complications.

Revues et méta-analyses

À ce sujet, des revues et des méta-analyses concluent assez fortement à l’intérêt des régimes pauvres, voire sans produits d’origine animale. On peut citer une revue récente, parue dans Current Diabetes Reports. Ici, on nous parle d’une part d’une réduction de l’incidence du diabète dans des études longitudinales et également d’une baisse de l’hémoglobine glyquée et des traitements nécessaires chez des patients qui sont diabétiques, dans des études randomisées où un régime végétarien est comparé à des régimes qui sont pauvres en graisses.

Pour ma part, je crois qu’il faut relativiser ces résultats et ces discours qui me semblent un peu trop forts. Concernant les études de cohorte, une grande prudence s’impose : si l’incidence du diabète est réduite jusqu’à de moitié, dans certaines études, chez les adeptes des régimes végétariens, il faut se rappeler qu’on est là dans la situation typique où il est impossible d’établir un lien de causalité entre une manière de s’alimenter et un risque de pathologie, compte tenu, tout le monde le sait, de l’importance des facteurs de confusion. Être végétarien est associé, en moyenne, à un mode de vie globalement plus sain — c’est quelque chose qui est bien connu.

Les essais randomisés

En ce qui concerne les essais randomisés, il faut dire qu’ils sont de courte durée, et surtout, quand on regarde les méta-analyses, on constate une perte de poids plus importante avec les régimes végétariens comparativement aux régimes testés dans les groupes contrôles. La première hypothèse pour expliquer cette différence de perte de poids entre les groupes, c’est que dans les études menées en ouvert, les sujets du groupe interventionnel sont influencés de façon plus ou moins consciente à perdre du poids, même si, en principe, on ne vise pas cette perte de poids. Donc, ce serait la perte de poids qui serait responsable de l’amélioration de l’équilibre glycémique plus que la qualité de l’alimentation elle-même. D’ailleurs, on sait bien que des régimes hyperprotéinés ou hypergras ont un effet spectaculaire sur l’équilibre glycémique des diabétiques en accompagnement de la perte de poids rapide.

Enfin, les essais randomisés n’ont jamais, à ma connaissance, comparé un régime végétarien à un régime de type méditerranéen qui comporte des produits d’origine animale. Là, c’est une faille importante et idéalement il faudrait comparer ces régimes si on veut vraiment conclure à la supériorité du végétarisme. C’est une faille d’autant plus importante qu’il y a une littérature riche en faveur de la diète méditerranéenne pour la prévention et pour le traitement des facteurs de risque cardiométaboliques, notamment pour améliorer l’équilibre glycémique des diabétiques. Il n’y a donc pas d’essai clinique comparatif entre le végétarisme et la diète méditerranéenne, mais il y a une méta-analyse en réseau récemment publiée qui permet d’effectuer indirectement cette comparaison entre le régime végétarien et le régime méditerranéen, et plus généralement avec d’autres types de régimes : le régime paléolithique, le régime hyperprotéiné, un régime à teneur réduite en glucides, ou encore un régime à faible index et charge glycémiques. Le résultat global de cette méta-analyse en réseau est en faveur de la diète méditerranéenne, quand on s’intéresse à l’équilibre glycémique. La diète méditerranéenne semble au moins aussi efficace, voire supérieure, au régime végétarien qui ne s’en sort pas si mal non plus et qui est un régime associé à un meilleur équilibre du diabète.

En résumé

À la question « le régime végétarien est-il LE régime à proposer en première intention chez le diabétique ? », la réponse, pour ma part en tout cas, est négative. Mon message reste celui que j’ai déjà eu l’occasion de mentionner ici sur Medscape : il faut proposer une diététique qui peut être suivie à long terme. Si le régime végétarien est le choix du patient, on peut tout à fait le respecter, voire un régime qui ne contient aucune graisse animale — à condition d’avoir un suivi diététique. Si en revanche le patient souhaite avoir des produits d’origine animale, on peut tout à fait lui proposer une autre diététique équilibrée et favorable pour sa santé, avec comme modèle la diététique méditerranéenne.

 

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