TRANSCRIPTION
Gilles Pialoux — Bonjour. Gilles Pialoux — je suis ravi de vous retrouver sur Medscape après une petite pause. Je suis professeur de maladies infectieuses à Paris-Sorbonne et à l’hôpital Tenon, à Paris. Je reviens d’une conférence qui est assez connue, l’AASLD, la conférence américaine de l’association sur les maladies du foie, où il y a aussi un pôle infectiologique important.
Focus sur la NASH
Cette conférence a eu lieu à San Francisco et s’est terminée le 13 novembre dernier. Pourquoi cette conférence était importante ? D’abord parce qu’on voit effectivement le recul de l’hépatite C, de l’hépatite B, dans le champ de l’hépatologie.
Mais, la vedette cette année, incontestablement, c’était la NASH, la stéatose hépatique non alcoolique, avec à peu près une douzaine de firmes qui sont en lice pour trouver un traitement efficace la NASH, avec des essais de phase 2 pour la plupart assez encourageants, avec une diminution des LDL et une diminution de la stéatose — il faudra suivre le développement de ces molécules, comme on l'a déjà souligné sur Medscape.
San Fransisco : 7500 sans-abris dans un état déplorable
Côté environnement, il est difficile de ne pas faire un petit point en revenant sur l’état actuel de cette ville en termes de sans-abris, avec environ 7500 homeless, dans des états psychiatriques et cliniques tout à fait catastrophiques[1,2].
Des études ont été montrées chez les homeless, notamment féminines, qu'il y avait un taux de contamination par le virus de l’hépatite C autour de 49 % et, parmi celles-ci, environ deux tiers étaient coinfectées par le virus du VIH[3].
Un amendement californien a été voté, tout récemment, qui a instauré une taxe pour les entreprises de la Silicon Valley et les start-ups afin d’aider ces homeless[3] . Mais, aujourd’hui, l’image marquante de San Francisco, pour tous les congrès qui s’y tiennent, c’est celle de milliers de sans-abris qui campent devant le siège de Twitter.
Hépatite C : toujours plus proches de l’éradication
Côté hépatite C, il y a eu des données concrètes : on avance vers l’éradication. Nous avons eu les résultats de l’essai Expedition-8 mené par Abbvie avec l’association de glécaprévir/pibrentasvir (Maviret®). L’étude a été menée, cette fois, chez les cirrhotiques compensés de tous génotypes, de 1 à 6, avec des résultats tout à fait saisissants, parce que sur les 273 patients enrôlés dans l’étude, la réponse virologique soutenue a été de 100 %, ce qui est synonyme de guérison.
Dans une autre étude, en vraie vie, menée chez 573 patients avec l’association triple sofosbuvir, velpatasvir, voxilaprévir (Vosevi®), là aussi pour des génotypes étendus entre 1 et 4, en échec de traitement de première intention (ce qui est important), la réponse virologique soutenue a été obtenue au-delà de 90 %, selon les génotypes.
Ce sont deux informations extrêmement réconfortantes.
Greffe d’organes de donneurs contaminés par l’hépatite C : preuve de concept
Un autre élément a fait beaucoup de bruit dans les couloirs de l’AASLD, c’est le proof of concept que l’on peut greffer des organes provenant de donneurs décédés contaminés par le virus de l’hépatite C[5].
Pour l’instant, il n’y a pas de recommandations dans ce sens, mais le concept est né d’une triple constatation :
1)il y a une augmentation du manque de greffons dans les pays industrialisés;
2)cette infection par le virus de l’hépatite C est de plus en plus facilement traitables — comme vous l’avez vu huit semaines dans l’essai Expedition-4 pour des cirrhotiques compensés —;
3) phénomène américain, mais qui peut gagner l’Europe, il y a une augmentation des décès par overdose avec les opioïdes de synthèse* qui induit, en proportion, un nombre de personnes décédées VHC+ de plus en plus important[6].
La preuve de concept a été démontrée par deux équipes.
Une équipe de Harvard Medical School, a démontré chez 8 candidats à la greffe cardiaque qu’il était possible d’utiliser un transplant venant d’un donneur contaminé par le VHC, de faire un traitement préexposition, prégreffe, en l’occurrence par l’association glécaprévir/pibrentasvir déjà citée, avec la première dose qui est administrée le jour même de la greffe venant d’un donneur décédé PCR HCV+[7].
L’expérience a été menée dans une région où, en 2016, sur 262 indications indiscutables à la greffe, on n’avait trouvé que 97 greffons.
La deuxième démonstration a été faite par une équipe de Toronto, Feld JJ et coll., chez neuf patients candidats à la greffe pulmonaire[8]. Là aussi, les chercheurs ont utilisé un greffon issu de donneur contaminé par le virus de l’hépatite C, avec un encadrement par un traitement par l’association double de Gilead sofosbuvir/velpatasvir pendant 12 semaines et, dans les deux cas, a été observée 100 % de réponse virologique soutenue chez le receveur, témoignant que c’est une voie importante pour la greffe.
Transmission de l’hépatite C par les fluides nasaux
Enfin, une étude autrichienne, présentée au congrès, a apporté des précisions sur le mode de transmission du virus de l’hépatite C chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. L’étude a démontré la présence de l’ARN du VHC dans les fluides rectaux — ça, on le savait déjà — mais aussi dans les fluides nasaux, indépendamment de la présence de sang, qui fait et qui confirme que les rapports anaux non protégés et aussi les échanges de pailles ou de pipes à crack, etc. sont des modes de transmission du VHC importants[9].
Je vous remercie beaucoup.
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* en premier lieu le fentanyl, un antidouleur dont l’Amérique essaye de contourner et de limiter dans son usage détourné
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Citer cet article: Maladies du foie : en direct de l’AASLD - Medscape - 5 déc 2018.
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