POINT DE VUE

Chirurgie bariatrique : comment choisir le type d’intervention selon le patient

Dr Boris Hansel

Auteurs et déclarations

2 novembre 2018

Le blog du Dr Boris Hansel - Diabétologue et nutritionniste

Dans quelles situations est-il préférable de recommander la sleeve gastrectomie plutôt que le by-pass gastrique? Explications du Dr Boris Hansel.

TRANSCRIPTION

Vous le savez, la chirurgie bariatrique représente incontestablement un volet important du traitement de l’obésité sévère et massive, en particulier quand il existe des comorbidités, notamment quand il y a un diabète de type 2. Il y a trois interventions qui sont couramment pratiquées : l’anneau gastrique, la sleeve gastrectomie et le by-pass gastrique, mais c’est essentiellement la sleeve et le by-pass qui sont aujourd’hui proposés, compte-tenu des résultats globalement décevants observés à long terme avec l’anneau gastrique.

Il y a une question qui reste débattue : quand est-il préférable de proposer l’une ou l’autre de ces deux interventions (donc sleeve ou by-pass) ?

La littérature scientifique est assez riche sur ce sujet et je voudrais vous donner mon avis en ce qui concerne deux questions :

  • d’abord, quelle intervention faut-il proposer en cas de diabète ?

  • et deuxièmement, quelle intervention proposer en cas d’obésité majeure, au-delà de 50, voire 60 kg/m2 d’indice de masse corporelle?

En cas de diabète : Il faut distinguer l’effet à court, moyen et long termes de la chirurgie bariatrique. À court terme, l’effet de la chirurgie bariatrique est spectaculaire, quelle que soit la technique utilisée, avec des rémissions du diabète observées dans 50 à 90 % des cas, en fonction des études qui se sont intéressées à la question. Quand on regarde, maintenant, à moyen terme, les choses se compliquent et beaucoup de travaux suggèrent que le by-pass gastrique est la technique de choix en cas de diabète de type 2, parce que cette technique serait plus efficace que la sleeve pour obtenir une rémission ou un contrôle durable du diabète au cours du temps. En réalité, si on regarde de près ces études, on vérifiera que le niveau de preuve est assez faible. Si maintenant on regarde ce qui se passe à long terme, les données fiables sont vraiment rares et il faut bien garder à l’esprit qu’un bon nombre de diabètes en rémission, qui étaient en rémission à court ou moyen terme, réapparaissent quand on regarde ce qui se passe à long terme. Par exemple, si on s’intéresse à l’étude de Mingrone, on voit que la moitié des patients en rémission du diabète à deux ans après un by-pass présentaient à nouveau un diabète authentique cinq ans après l’intervention. Et les données au-delà de cinq ans, on les a très rarement, et à dix, quinze ans, on ne sait pas véritablement ce que deviennent ces diabètes. Donc impossible de dire précisément quelle intervention serait la plus efficace à long terme après l’intervention chirurgicale.

Dans l’état actuel des connaissances, on a certes dit que le by-pass semble plus efficace que la sleeve pour atteindre une rémission ou un bon contrôle du diabète à 3, voire 5 ans… mais il ne faut pas oublier que de nombreux patients vont reprendre du poids au-delà de 5, voire 10 ans. Voilà pourquoi, pour ma part, je reste favorable à la sleeve gastrectomie en première intention, même quand il y a un diabète de type 2. Parce que je pense au traitement qu’il faudra proposer 5, 10, 15 ans plus tard en cas d’échec de la chirurgie bariatrique. Et si le premier traitement est une sleeve, on peut proposer un by-pass gastrique. Si, en revanche, on a proposé d’emblée un by-pass, les choses sont beaucoup plus compliquées.

Le cas d'obésité extrême : ces patients ont un indice de masse corporelle au-delà de 60 kg/m2. Alors a priori on pense que le by-pass gastrique est plus efficace que la sleeve — ce serait donc la première intervention à proposer en cas d’obésité extrêmement importante. Mais si on regarde la littérature, rien n’est moins sûr. Tout d’abord, des études récentes montrent qu’il n’y a pas tant de différences entre la sleeve gastrectomie et le by-pass gastrique. Je pense notamment à un essai randomisé qui a paru en janvier 2018 et qui n’a pas trouvé de différence significative entre les deux procédures à 5 ans chez des patients qui avaient un indice de masse corporelle moyen de 44. Il s’agit donc de patients en obésité massive et pas tout à fait d’obésité au-delà de 60 kg/m2, ce que je mentionnais — et là, il y a très peu d’études.

Il y a une étude, à laquelle j’ai eu la chance de participer, dans laquelle nous avons inclus 210 patients avec un indice de masse corporelle au-delà de 60 — en moyenne, il était de 66 — et dans cette étude rétrospective conduite à l’hôpital Bichat, le résultat était similaire, c’est-à-dire un effet semblable de la sleeve gastrectomie et du by-pass gastrique. Voilà pourquoi, encore, dans cette situation d’obésité extrêmement importante et au regard de la littérature scientifique, il est raisonnable de proposer une sleeve gastrectomie et non un by-pass en première intention.

Pour conclure, je pense qu’il faut bien réfléchir avant de proposer un by-pass et se souvenir d’une chose : l’obésité est une maladie chronique que la chirurgie ne guérit pas, en tout cas à long terme. Voilà pourquoi il est raisonnable de proposer — à mon sens, en tout cas — presque toujours une sleeve en première intention pour garder le by-pass en solution de recours si on en a besoin quelques années plus tard.

 

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