Munich, Allemagne -- Injecter au sein d’une tumeur des tissus mous des nanoparticules d’hafnium permettant d’amplifier l’énergie de la radiothérapie contribue à doubler le taux de réponses complètes par rapport à la radiothérapie utilisée seule, selon les résultats d’une étude menée sur 180 patients et présentée à l’occasion du congrès ESMO 2018 par le Dr Sylvie Bonvalot, chef de l’unité de chirurgie des sarcomes et tumeurs complexes (Institut Curie, Paris) [1].
NBTXR3, une nanoparticule inerte qui restitue 9 fois plus d’électrons
Les nanoparticules sont injectées en un geste unique avant la réalisation des premières séances de radiothérapie. Cette nouvelle technologie française développée par Nanobiotix. NBTXR 3 est une nanoparticule spécialement conçues pour être activées par les rayons X utilisés en radiothérapie. Une fois injectée dans la tumeur, elle s’accumule dans les cellules cancéreuses. Grâce à ses propriétés physiques, elle restitue 9 fois plus d’électrons au sein des tissus cancéreux que l’irradiation exclusive. Les effets locaux sont donc majorés grâce à ce « réfléchisseur local » de particules.
L’innocuité de ce traitement avait déjà été prouvée à l’occasion d’un essai de phase I/II qui avait aussi permis de déterminer la dose idéale à injecter localement : 10 % du volume tumoral avec une concentration fixée à 53,3 g/L.
Sarcomes des membres inférieurs
L’étude de phase II/III a inclus dans 32 centres européens et asiatiques 180 patients souffrant de sarcomes de tissus mous des extrémités ou du tronc non résécables initialement en raison de leur caractère avancé localement. Il s’agissait de tumeur à haut risque d’évolution locale ou à distance chez des patients âgés de plus de 18 ans. Les hommes ont été un peu plus représentés que les femmes (55 %), l’âge moyen des patients s’est établi à 60 ans et, dans plus de 90 % des cas, il s’agissait d’un diagnostic initial d’une tumeur à un stade localement avancé. Deux tiers des tumeurs étaient localisées au niveau des membres inférieurs, 16 % au niveau du tronc et 10 % concernaient les membres supérieurs. Le diamètre médian des tumeurs était de 85 mm et le volume de 525 à 717 mL
Plus de chirurgie en marge saine
La moitié du groupe a reçu, avant la radiothérapie, une injection unique de nanoparticules dans la tumeur, tandis que l’autre moitié a reçu le traitement standard, c’est-à-dire la radiothérapie seule. A la fin des séances de radiothérapie, tous les patients ont été opérés à afin de retirer la tumeur. « Dans le bras NBTXR3, 16,1 % des patients ont présenté une réponse pathologique complète (avec moins de 5 % de cellules tumorales viables), contre 7,9 % dans le bras comparateur p=0,048). Lorsque le seuil de 7 % de cellules résiduelles viables était choisi, les réponses s’établissaient respectivement à 24,7 et 14,8 %, et lorsque la valeur cible était de 10 %, alors 34,6 % des patients NBTXR3 étaient considérés comme répondeurs contre 19,8 % des témoins », explique le Dr Bonvalot. L’analyse du taux de nécrose tumorale est elle aussi en faveur du NBTXR3 avec 28,8 % de volume de mort cellulaire contre 19,2 %.
Grâce aux nanoparticules, 77 % des patients ont pu subir une chirurgie en marge saine contre 64 % des témoins.
D’autres tumeurs à l’étude
L’incidence des effets indésirables a été majorée sous NBTXR3 avec 31,5 % des patients concernés contre 15,6 %. Il s’agissait majoritairement de douleurs au site d’injection ou au sein de la lésion tumorale. Les auteurs notent aussi que 6 des 89 patients ont présenté une hypotension (grade 3 pour 5 d’entre eux et grade 4 pour un autre patient). Au total, 7,8 % des patients dans le bras traitement actif ont présenté un effet indésirable lié au traitement sous la forme d’une réaction immune de grade 3-4.
L’incidence des effets indésirables en post-chirurgie (complications cicatricielle, infection, hémorragies, nécrose…) a été, pour sa part, similaire dans les deux bras. Enfin, en dépit des effets indésirables, 100 % des patients sous NBTXR3 ont reçu les 50 gy d’irradiation prévue par le protocole contre 97,8 % des témoins.
Interrogée par Medscape.fr, le Dr Bonvalot explique, « ces résultats prometteurs nous confortent dans la réalisation d’autres études avec d’autres types de tumeurs comme c’est déjà le cas actuellement : tête et cou, foie, prostate, rectum et cancer du poumon non à petites cellules ».
Le laboratoire pharmaceutique Nanobiotix est le promoteur de cet essai multicentrique, dont l’Institut Curie est l’investigateur principal. Le Dr Sylvie Bonvalot déclare être consultante pour Nanobiotix. |
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Citer cet article: Nanoparticules boosters de la radiothérapie : réponse doublée dans les tumeurs des tissus mous - Medscape - 30 oct 2018.
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