Munich, Allemagne --- La radiothérapie améliore la survie globale chez les hommes nouvellement diagnostiqués pour un cancer de la prostate faiblement métastatique, selon une étude présentée au congrès de l’European Society of Medical Oncology (ESMO 2018) à Munich.
« Chez les hommes nouvellement diagnostiqués avec un cancer métastatique, le traitement standard consiste en un traitement médicamenteux », a expliqué le Dr Chris Parker, oncologue médical (Sutton, Royaume-Uni). Ici, nous avons voulu savoir si la radiothérapie pourrait non seulement contrôler la tumeur localement mais aussi ralentir la progression de la maladie métastatique ».
Lors de la conférence de presse, le Dr Ignacio Duran, oncologue médical, (Santander, Spain), qui commentait l’étude a rappelé que « les oncologues ont l’habitude de prendre en charge leurs patients d’une façon différente, en s’attaquant au principal carburant de la tumeur, la testostérone, et plus récemment avec de nouveaux traitements comme le docétaxel ou l’abitérone. Mais il n’avait encore jamais été envisagé de traiter la tumeur localement dans le cadre d’une maladie qui est déjà étendue. Et à ce titre, c’est révolutionnaire. Et même si le traitement ne bénéficie pas à tous les patients, cela ouvre une porte ».
Phase III avec 2061 patients
L’essai STAMPEDE a donc testé deux hypothèses. La première était de savoir si de s’attaquer à la tumeur primaire permettrait de ralentir la progression de la maladie globale et de contrer le raccourcissement de la survie chez les hommes avec un cancer métastatique. La seconde était de savoir si cet impact serait plus important chez les hommes pour lesquels le poids des métastases est plus faible.
L’étude randomisée de phase III a inclus 2061 patients (âge médian = 68 ans) au Royaume-Uni et en Suisse nouvellement diagnostiqués pour un cancer de la prostate métastatique. Lesquels ont été répartis de façon aléatoire entre un bras « traitement selon les standards actuels » (SOC) qui consiste (depuis 2016) en une privation androgénique plus du docétaxel et un bras SOC plus radiothérapie. Le protocole de radiothérapie était soit 55Gy/20f quotidiennement pendant 4 semaines ou 36Gy/f hebdomadaires pendant 6 semaines.
Une survie globale prolongée dans un sous goupe de patients
Les résultats montrent, après un suivi médian de 3 ans, que la radiothérapie de la prostate a amélioré la survie sans échec biologique, clinique ou marqué par le décès (hazard ratio HR 0,76, IC95% : 0,68-084) mais pas la survie globale (HR 0,92, IC95% : 0,80-1,06).
Mais le résultat à retenir est que la radiothérapie a amélioré d’un tiers la survie globale chez les 819 hommes qui avait la charge métastatique la plus faible (hazard ratio HR 0,68, IC95% : 0,68-084), soit une survie à 3 ans de 81% avec la radiothérapie versus 73% chez les contrôles. En revanche, la survie globale n’était pas améliorée avec la radiothérapie chez les 1120 hommes avec un envahissement métastatique élevé – défini par l’étude CHAARTED, à savoir au minimun 4 métastases osseuses plus au moins une métastase à un autre site.
La radiothérapie a été bien supportée, seul 5% des patients ont subi des effets indésirables de grade ¾ pendant la radiothérapie et 4% après. Ces effets indésirables ont été principalement d’ordre gastro-intestinal mais modérés et très largement contre-balancés par le bénéfice sur la survie, a considéré le principal investigateur.
En conclusion, la radiothérapie n’améliore pas la survie chez l’ensemble des hommes nouvellement diagnostiqués pour un cancer de la prostate métastatique – une situation qui reste peu fréquente dans les pays occidentaux, et mais concerne néanmoins environ 10% des hommes nouvellement diagnostiqués, a recontextualisé le Dr Ignacio Duran.
Nouvelle option de traitement
Néanmoins, cette approche peut bénéficier à un sous-groupe de patients puisqu’en effet, la radiothérapie améliore la survie chez les hommes avec un cancer prostatique d’emblée métastatique mais présentant peu de métastases. « Cela devrait donc constituer une nouvelle option de traitement, en complément du traitement médicamenteux, dans ce groupe de patients », a commenté le Dr Chris Parker. Cette nouvelle approche, facilement disponible et peu coûteuse, pourrait aussi s’avérer pertinente chez les hommes avec un cancer de la prostate non métastatique mais présentant une atteinte ganglionnaire pelvienne (N1M0), a-t-il ajouté.
Questionné sur la place de cette approche par rapport à une résection chirurgicale, l’orateur a répondu que les résultats ne permettent, bien évidemment, pas de répondre, mais que si la radiothérapie a une action positive en termes immunologique, elle pourrait s’avérer plus efficace que la chirurgie. La question d’un éventuel effet abscopal ne peut être exclus même si rien dans cette étude ne permet de l’affirmer, a-t-il aussi considéré, lors de la conférence de presse.
Commentant ces résultats pour l’ASCO, le Pr Karim Fizazi (Gustave Roussy, Villejuif) a affirmé que « pour les hommes nouvellement diagnostiqués avec un cancer oligométastatique, il est vraisemblable que ces résultats puissent changer la donne ». A l’avenir, a-t-il ajouté, chez les hommes avec une charge métastatique élevée, nous avons besoin d’études pour savoir si un traitement local s’attaquant de front à la tumeur améliore ou prévient les symptômes locaux, ce qui en soi pourrait justifier son utilisation en l’absence d’un bénéfice sur la survie globale.
Les auteurs d’un éditorial accompagnant l’article se montrent un peu plus réservés, compte-tenu des limites de l’étude (analyse en sous-groupe, choix de la localisation des métastases, etc), ils considèrent que la radiothérapie devait être envisagée comme une option possible mais que d’autres études sont nécessaires pour définir ses modalités [3].
L’étude a été financée par le Cancer Research UK, the Medical Research Council. Le protocole a été d’une aide d’Astellas, Clovis Oncology, Janssen, Novartis, Pfizer et Sanofi Aventis. Le Dr Parker a déclaré des bourses de recherche de Bayer et un financement comme orateur de Janssen. |
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Citer cet article: Cancer prostatique oligométastatique : une radiothérapie locale améliore la survie - Medscape - 23 oct 2018.
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