POINT DE VUE

Céphalées par abus médicamenteux : que faire ?

Pr Alain Serrie

Auteurs et déclarations

24 octobre 2018


Enregistré le 15 octobre 2018 à l’Académie de médecine

Paris, France--Les céphalées par abus médicamenteux sont définies par des céphalées plus de quinze jours par mois, un usage répété et important de plus de trois mois d’antalgiques (AINS, codéine) et /ou antimigraineux (triptans, ergots de seigle) et une aggravation des céphalées sous « traitement », selon l’International Classification of Headache Disorders.

Dans cette vidéo, réalisée lors de la présentation du rapport de l’Académie de médecine pour améliorer la prise en charge des douleurs chroniques, le Pr Alain Serrie (chef du Service de Médecine de la douleur – Médecine palliative de l’hôpital Lariboisière, membre correspondant de l’Académie de médecine) décrit le risque de mésusage des triptans, l’engrenage dans lequel tombent certaines femmes, qui augmentent les doses de tripans pour soulager des crises qui deviennent de plus en plus fréquentes.

« Ces médicaments auto-induisent des céphalées alors qu’au démarrage, ces mêmes médicaments ont rendu la vie agréable et traité rapidement, en moins de 2 heures, les céphalées », explique le spécialiste de la douleur.

Ces médicaments auto-induisent des céphalées alors qu’au démarrage, ces mêmes médicaments ont rendu la vie agréable

Pour sortir de l’impasse, il préconise d’abord d’éduquer les patientes, en leur expliquant ce paradoxe apparent, puis d’initier un sevrage.

Quel sevrage ?

« Le sevrage peut être réalisé en ambulatoire mais il faut une force et une conviction rare. Il s’agit soit d’un sevrage « à la hussarde », où on arrête brutalement et prend autre chose, soit on arrête brutalement et ne prend rien, soit c’est l’arrêt progressif. Avec l’arrêt progressif, en général, il y a toujours rechute […] Quand il ne peut pas se faire en ambulatoire, le sevrage peut se faire en hospitalisation. Le sevrage est alors brutal mais avec des perfusions de tricycliques en intraveineux ».

Le sevrage en hospitalisation présente l’avantage de déconnecter du milieu habituel, d’une prise en compte par l’entourage et l’employeur qu’il s’agit de quelque chose de sérieux et de mettre en place un traitement de substitution par des tricycliques en intraveineux, précise-t-il. Le relais est pris après 4 à 5 jours de perfusion par une prescription per os pendant au moins 3 à 6 mois.

Les patients vont alors retrouver un état de confort, une vigilance et une mémorisation des faits de la vie quotidienne. Ils doivent bénéficier d’un suivi individualisé, avec un agenda, un contact téléphonique, de nouvelles consultations à 3 mois et 6 mois.

Ce que l’on ne voit pas

Mais à côté de ces mésusages invalidants, combien de femmes sont contentes de leur mésusage et continue leur abus sans s’inquiéter ? s’interroge le Pr Serrie.

« Il y a peut-être là un rôle d’éducation, d’alerte et de vigilance du pharmacien. Si une femme en est à sa 5ème ou 6ème boite de triptans dans le mois et qu’elle vient depuis 10 mois, le pharmacien peut lui demander ce qu’il se passe », souligne-t-il.

Quels mécanismes d’action ?

Les antalgiques de type AINS, paracétamol, codéine et dérivées modifient probablement les voies neurologiques de la douleur.

Les antimigraineux comme les dérivés de l’ergot de seigle et les triptans induisent une activation permanente des récepteurs 5 HT (5 hydroxy tryptamine) au niveau du cerveau. Les dérivés de l’ergot de seigle par une élimination très lente au niveau cérébrale (plus de deux semaines) et les triptans par répétition de l’usage.

(Source DMG Paris-Diderot)
Déclaration d’intérêts
Medtronic, Mylan, Sanofi Aventis, Grunenthal, TEVA, Takéda, Astellas, MEDA Pharma, MUNDI Pharma, Ethypharm, Kyowa Kirin, Bayer, Prostrakan, Sigvaris, Archimedes pharma, Abbott.

 

 

 

 

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